
Les tensions sur les chaînes d’approvisionnement brident la reprise

C’est l’une des préoccupations majeures de quasiment tous les dirigeants d’entreprises : s’approvisionner en matières premières et composants. Peu de secteurs échappent aux contraintes qui pèsent sur l’offre de produits et de services, montre une enquête publiée jeudi par l’Insee lors de la présentation de son point de conjoncture. Interrogés en avril dernier par l’institut de statistiques, les dirigeants d’entreprises françaises ont mis en avant une augmentation des difficultés d’approvisionnement touchant l’ensemble des sous-secteurs de l’industrie ainsi que le bâtiment. Dans la plupart des cas, la part des entreprises signalant des problèmes d’approvisionnement dépasse non seulement le point haut atteint en avril 2020, au moment du grand confinement, où d’autres facteurs (insuffisance de main d’œuvre, contrainte financière…) prédominaient, mais aussi, et assez nettement, le niveau moyen des années précédentes.
Dans les biens d’équipement, les difficultés d’approvisionnement, mentionnées par 43% des dirigeants interrogés, atteignent un niveau inégalé depuis au moins quinze ans. Cette hausse inédite est très marquée dans la fabrication d’équipements électriques, comme le confirme à L’Agefi Benoit Coquart, le directeur général de Legrand, mais elle concerne aussi les produits informatiques et électroniques ou encore les machines et équipements. Le secteur des matériels de transport est celui où la hausse des difficultés d’approvisionnement est la plus forte entre l’automne 2020 et le printemps 2021. «La part des entreprises déclarant des difficultés d’approvisionnement atteint 39 % en avril 2021», constate l’Insee. Sur les années récentes, ce secteur a déjà connu d’autres périodes de tensions dans ce domaine. Fin 2018, la moitié des entreprises interrogées déclaraient des difficultés d’approvisionnement, soit davantage qu’en avril 2021.
Une faible visibilité dans l’automobile
La progression des derniers mois concerne en particulier l’industrie automobile, tandis que le point haut d’avril 2020 provenait des entreprises des autres matériels de transport, notamment la construction aéronautique. Touché par une pénurie de composants électroniques dès la fin de l’an dernier, le secteur automobile fait désormais les frais d’interruptions de production récentes dans des usines de fonderies de puces au Japon ainsi qu’au Texas. Luca de Meo, directeur général de Renault, a déclaré jeudi que le groupe pâtissait, comme l’ensemble du secteur, d’une faible visibilité en la matière. Il a estimé que cette pénurie devait être l’occasion de «revisiter certaines stratégies en matière de chaîne d’approvisionnement qui ont été mises en place il y a 20 ans et qui ne sont plus valides».
De son côté, le président du directoire de Volkswagen, Herbert Diess, a souligné que le groupe allemand était en contact régulier avec des fournisseurs de puces tels que NXP Semiconductors et Intel, ainsi qu’avec des fonderies de puces, afin de trouver des moyens d’assurer un approvisionnement suffisant pour ses chaînes de production. Il demande en outre instamment à ses fournisseurs de garantir à l’avenir un approvisionnement en puces sur le long terme.
Les services davantage touchés par les restrictions sanitaires
Moins exposé à ce problème, Thales, présent dans l’aéronautique et la défense, a néanmoins précisé que sa division «identité et sécurité numérique», qui consomme des volumes importants de puces dans ses activités de cartes bancaires et de cartes SIM, avait commencé à ressentir les effets de cette pénurie au premier trimestre 2021. Les répercussions devraient être «un peu supérieures» au deuxième trimestre dans cette division, a prévenu Pascal Bouchiat, directeur général finance et systèmes d’information, en ajoutant que la situation était «sous contrôle» et que l’équipementier français disposait de «leviers» pour en atténuer l’impact.
Du côté des prestataires de services, l’enquête de l’Insee montre que les difficultés qui entravent le plus l’activité sont avant tout liées à leur exposition aux mesures de restriction sanitaire. La part des entreprises du secteur hébergement-restauration qui signalent des difficultés d’offre frôle ainsi les 60% en avril, soit un doublement par rapport à fin 2020, alors que cette proportion est restée assez stable depuis la mi-2020 dans l’information-communication et les services aux entreprises, en évoluant entre 20% et 30%.
Par ailleurs, la part des entreprises ayant déclaré que les mesures liées à la crise sanitaire ont un effet défavorable sur leur productivité, quelle qu’en soit la cause, atteint 46 % en avril (après 43 % en janvier). «Elle retrouve quasiment son niveau d’octobre 2020 (47 %), date de la première interrogation à ce sujet», précise l’Insee. Cette part est stable dans le bâtiment mais en hausse dans tous les secteurs industriels. Bien qu’il puisse engendrer un surcroît de productivité, le recours au télétravail est perçu de plus en plus négativement par certaines entreprises, notamment dans les services. Les autres raisons avancées par les dirigeants pour expliquer une baisse de productivité sont liées aux mesures de réorganisation mises en place en matière de logistique, d’approvisionnement ou d’ordonnancement des travaux. Ces facteurs sont particulièrement ressentis dans la fabrication de biens d’équipement et de matériels de transport.
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L'armée israélienne appelle à l’évacuation de la ville de Gaza avant un assaut terrestre d’ampleur
Gaza - L’armée israélienne a appelé samedi matin les habitants de la ville de Gaza à l'évacuer vers une zone déclarée «humanitaire» plus au sud, en prévision d’un assaut au sol sur cette agglomération, la plus grande du territoire palestinien dévasté par près de 23 mois de guerre. Le colonel Avichay Adraee, porte-parole arabophone de l’armée, a lancé cet appel sur les réseaux sociaux alors que l’ONU, qui estime à environ un million les résidents de la région, a averti d’un «désastre» à venir en cas d’expansion de l’offensive sur Gaza-ville. L’armée israélienne, qui dit contrôler environ 75% de la bande de Gaza et 40% de cette agglomération, affirme vouloir s’en emparer pour venir à bout du Hamas et libérer les otages qu’il retient encore. L’appel à évacuer intervient après que le président américain, Donald Trump, a affirmé vendredi que les Etats-Unis étaient «en négociation approfondie avec le Hamas», dont l’attaque sans précédent en Israël le 7 octobre 2023 a déclenché la guerre. «Nous leur disons: +Libérez-les (otages NDLR) tous immédiatement», sinon «ça va être terrible», a-t-il dit. M. Trump a également avancé que certains des otages pourraient être «morts récemment». L’armée israélienne estime à ce stade que 25 des 47 captifs restants à Gaza - sur 251 enlevés le 7-Octobre - sont morts. Le mouvement islamiste palestinien avait donné son accord en août à une proposition de trêve et libération des otages présentée par les médiateurs (Egypte, Etats-Unis et Qatar). Le gouvernement de Benjamin Netanyahu exige qu’il rende les armes et dit vouloir prendre le contrôle sécuritaire de la bande de Gaza. «L’armée ment» Dans son message, le colonel Adraee précise que pour «faciliter le départ des habitants» de la ville de Gaza, le secteur côtier d’Al-Mawasi, dans le sud du territoire, est déclaré «zone humanitaire». Selon l’armée, cette zone comprend des «infrastructures humanitaires essentielles», et est approvisionnée «en nourriture, tentes, médicaments et équipements médicaux». Depuis le début de la guerre, qui a ravagé la bande de Gaza, désormais en proie à la famine sur 20% du territoire selon l’ONU, l’armée a souvent bombardé des zones déclarées «humanitaires» et «sûres», affirmant y viser des combattants du Hamas. «L’armée ment aux gens, quand nous allons chercher de l’aide (...) ils ouvrent le feu», s’indigne Abdelnasser Muchtaha, 48 ans, déplacé à l’ouest de la ville de Gaza après avoir quitté son quartier pilonné de Zeitoun. Il affirme vouloir «pour l’instant» rester sur place. Déja déplacé à Al-Mawasi, avec sa famille, Bassam al-Astal, 52 ans, assène que la zone n’est «ni humanitaire ni sûre». «C’est là qu’il y a chaque jour le plus de martyrs, il n’y a pas de place pour les tentes, pas de services humanitaires, pas d’eau, pas d’assainissement, pas d’aide alimentaire», dit-il. Vendredi, l’armée israélienne a encore intensifié ses opérations dans la ville de Gaza bombardant, après un appel à évacuer, une tour d’immeuble dans le centre, qui s’est écroulée comme un château de cartes. Selon l’armée, le Hamas y avait installé «des infrastructures» pour «préparer et mener des attaques» la visant. Elle avait auparavant prévenu qu’elle ciblerait «dans les jours qui viennent» des «infrastructures terroristes», en particulier dans des tours d’immeubles. Le Hamas a rejeté comme «des prétextes fallacieux et des mensonges éhontés» les affirmations d’Israël selon lesquelles il utilisait ces bâtiments. «Propagande diabolique» La Défense civile du territoire palestinien, où le Hamas a pris le pouvoir en 2007, a fait état de 42 personnes tuées vendredi par des tirs ou bombardements israéliens, dont la moitié dans la ville de Gaza. Compte tenu des restrictions imposées aux médias à Gaza et des difficultés d’accès sur le terrain, l’AFP n’est pas en mesure de vérifier de manière indépendante les bilans de la Défense civile. Le Hamas a dans le même temps diffusé une vidéo montrant deux otages - Guy Gilboa-Dalal et Alon Ohel - au moment où les proches et soutiens de ces captifs se mobilisaient à travers Israël pour marquer leurs 700 jours de détention et réclamer leur retour. La séquence montre M. Gilboa-Dalal demandant à M. Netanyahu de ne pas mener d’offensive dans la ville de Gaza. «Aucune vidéo de propagande diabolique ne nous affaiblira ni n'émoussera notre détermination», a réagi le Premier ministre israélien, après s'être entretenu avec les parents des deux hommes, selon son bureau. L’attaque du 7-Octobre a entraîné la mort de 1.219 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l’AFP basé sur des données officielles. Les représailles israéliennes ont fait au moins 64.300 morts à Gaza, en majorité des femmes et des enfants, selon le ministère de la Santé de Gaza, placé sous l’autorité du Hamas, dont les chiffres sont jugés fiables par l’ONU. Equipe de l’AFP dans la bande de Gaza © Agence France-Presse -
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