
Les actionnaires d’Ipsos privent leur ancien PDG de son indemnité exceptionnelle

Mardi matin, l’assemblée générale(AG) d’Ipsos a rejeté à 65% la nomination d’Hubert Mathet, vice-président de la Société française des analystes financiers (Sfaf), résolution déposée par cinq sociétés de gestion actionnaires du spécialiste des études de marché et de sondages d’opinion, et non agréée par le conseil d’administration. ISS et Proxinvest recommandaient de soutenir cette résolution, tandis que Glass Lewis s’était rangé dans le camp d’Ipsos. «Si la résolution que nous soutenions n’a pas été adoptée, nous estimons cependant que le score obtenu de 35% est un signe positif, compte tenu d’un taux de participation très élevé, confie Pierre Nebout, responsable de l’investissement coté chez LBO France, qui soutenait la nomination d’Hubert Mathet. Malgré le rejet de notre résolution, nous restons ouverts au dialogue avec la société et espérons toujours une évolution de la gouvernance. Le soutien d’ISS et de Proxinvest nous conforte dans l’idée qu’il s’agit d’une démarche non pas irrégulière, mais souhaitable pour la Place de Paris : trop peu de candidats non cooptés sont proposés au vote des actionnaires sur la Place de Paris.» En séance, Didier Truchot a estimé que cette méthode n’était pas constructive, même s’il a reconnu que la gouvernance d’Ipsos pouvait toujours progresser. D’ailleurs, l’assemblée d’Ipsos relevait encore de l’ancien monde, avec des votes à main levée et des résultats dévoilés alors que la salle n’a pas encore voté, sans compter un vote groupé sur sept résolutions ! Le quorum s’élevait à 80,57%, signe de l’engagement des actionnaires.
Une nouvelle AG devrait être convoquée
«Beaucoup d’investisseurs avec qui nous avions échangé étaient alignés avec nous, mais se sont autocensurés pour ne pas s’exposer et conserver un dialogue privilégié avec Ipsos, regrette Pierre Nebout. Certains actionnaires semblent avoir préféré sanctionner la gouvernance en votant massivement contre la rémunération du président.» En effet, la rémunération de Didier Truchot, quand il était PDG, a été rejetée à environ 58%. Et pourtant, Didier Truchot contrôle près de 19% des droits de vote d’Ipsos. Celui qui a été PDG jusqu’au 30 septembre 2021 et directeur général par intérim jusqu’au 14 novembre 2021 a manifesté sa sidération, rappelant que sa politique de rémunération avait été adoptée à 94,26% l’an dernier. «J’ai demandé et obtenu une rémunération très inférieure à celle des autres dirigeants d’entreprises de même taille cotées à Paris, dans le SBF 80. Je l’ai fait par décision personnelle», a déclaré Didier Truchot, rappelant qu’il touchait 25 fois la rémunération médiane des salariés d’Ipsos, contre un multiple autour de 250 fois dans le S&P 500, avec des rémunérations de 14 millions de dollars. Compte tenu de ce vote négatif, «cela me prive de mon bonus annuel et de mon indemnité exceptionnelle, poursuit Didier Truchot. Je serai le seul à ne pas toucher de bonus, alors que les résultats 2021 ont été les meilleurs que l’entreprise ait connus». Le conseil se réunira pour «se mettre d’accord sur quelque chose d’équitable pour la société et pour moi, poursuit-il. Nous ne laisserons pas les choses en l’état». Même si le package de Didier Truchot ne semblait pas excessif – 438.000 euros de fixe, 346.000 euros de variable et 1,1 million d’euros d’indemnité de cessation des fonctions de PDG –, les actionnaires ont semblé vouloir sanctionner la gouvernance. Pour renouer ce dialogue avec les actionnaires, la société devrait les reconvoquer en AG à l’automne, avec une nouvelle proposition de rémunération. D’aucuns espèrent aussi une évolution de la gouvernance. «‘Wait and see’», a déclaré Ben Page, nouveau directeur général d’Ipsos pendant l’AG.
Par ailleurs, les actionnaires ont rejeté les rémunérations des trois directeurs généraux délégués (DGD), à 59% pour Pierre Le Manh, 55% pour Laurence Stoclet et 51% pour Henri Wallard. Dans son programme de veille sur les AG, l’AFG soulignait que, malgré sa démission, Pierre Le Manh a touché des indemnités de départ et de non-concurrence excédant deux fois sa rémunération annuelle, fixe et variable. Toutefois, ces résolutions sont seulement consultatives. La politique de rémunération des DGD n’a obtenu que 50,5% d’approbations. Alors qu’il ne reste plus qu’un DGD, Laurence Stoclet, le président Truchot se dit favorable à ne plus avoir de DGD.
La quatrième résolution, sur les conventions réglementées, a été adoptée de justesse, à environ 50,5%, même si aucune convention nouvelle n’a été prise. Un taux si faible d’approbation devrait constituer une alerte pour le conseil d’Ipsos…
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