
«Le pacte entre Nexans et Madeco a ouvert la porte à une prise de contrôle rampante»
- L’Agefi: Nexans dévoile ce jour ses résultats 2013. Qu’attendez-vous après l’avertissement d’octobre et l’augmentation de capital de novembre derniers?
- Colette Neuville: Force est de constater que le plan de restructuration ambitieux annoncé en février 2013 ne semble pas en bonne voie. Malgré ses nombreuses déclarations sur la solidité financière du groupe, le management a lancé une augmentation de capital de 284 millions d’euros, correspondant à un accroissement de 43% du nombre d’actions. Or, la nécessité d’une levée de capitaux de cette ampleur après les émissions obligataires de 2012 est discutable. En tout état de cause, elle aura pour effet mécanique de réduire l’objectif de 11% de retour sur capitaux propres. Dans ces conditions, eu égard aux mauvaises performances du groupe, le niveau élevé de rémunération du PDG, Frédéric Vincent, ne paraît pas justifié, d’autant que les critères qualitatifs manquent totalement de transparence.
- Vous critiquez aussi les conditions de cette levée de fonds?
- Cette augmentation de capital a été autorisée par l’AG de mai 2012 dans des conditions très peu transparentes. Lors de l’AG et dans la communication qui a suivi, il n’a été fait mention que de la limite en valeur nominale, 14 millions d’euros, sans préciser que ce niveau correspond à 50% du capital ! D’autre part l’importance de la décote a provoqué une forte dilution des minoritaires qui n’ont pas pu suivre, tout en permettant à Madeco de monter à 25,27% du capital et des droits de vote à très bon compte.
- Pourtant ce renforcement de Madeco n’était-il pas prévu par le pacte d’actionnaires de mars 2011, révisé en novembre 2012?
- L’accord de 2011 permettait à Madeco de monter à 20% du capital, et de passer de 1 à 3 sièges au conseil d’administration. C’était déjà beaucoup pour un actionnaire de référence. La société a néanmoins accepté, par l’avenant de novembre 2012, de l’autoriser à porter sa participation jusqu’à 28% du capital. Le pacte prévoyait par ailleurs une modification des statuts. Il s’agissait de supprimer les droits de vote double et de relever le seuil de limitation des droits de vote de 8% à 20%. En fait, c’était ouvrir la porte au contrôle rampant, car, si la limitation à 8%, en vigueur jusque-là portait sur la totalité des résolutions, la limitation nouvelle à 20% porte sur certaines résolutions seulement, comme les «fusions et augmentations de capital significatives», et dont une liste est détaillée dans l’accord. En revanche, la limitation à 20% ne s’applique pas aux résolutions relevant de l’AGO, comme la nomination d’administrateurs, la distribution de dividende ou encore les conventions réglementées.
- Cet accord peut-il être facilement rompu?
- Au-delà du non-respect des obligations contenues dans le pacte, Madeco peut s’en délier unilatéralement en cas d’offre publique sur Nexans initiée par un tiers n’agissant pas de concert avec Madeco, mais également si un autre actionnaire vient à détenir 15% du capital de Nexans, ce qui est bien plus inhabituel.
- Vous vous insurgez contre ce pacte, qui a pourtant été voté dans le cadre d’une convention réglementée lors de l’AG de 2011...
- C’est vrai. L’AG du 31 mai 2011 l’a approuvé à plus de 99%. Et celle du 11 novembre suivant a aussi voté à plus de 99% la suppression des droits de vote double et la modification du plafonnement des droits de vote. Mais il reste à vérifier la régularité de ces votes, ce que je n’ai pu faire, faute d’avoir eu accès aux documents sur lesquels tout actionnaire a pourtant un droit de communication. En tout état de cause, la direction qui a négocié ce pacte, et le conseil qui l’a approuvé, ont engagé lourdement leur responsabilité en ouvrant incontestablement la porte à une prise de contrôle rampante de Madeco, tout en le présentant comme conforme aux règles de bonne gouvernance. Et ce, alors même que cet accord portait atteinte à l’égalité des actionnaires, en disposant que Nexans s’engageait à informer Madeco des opportunités d’achats de blocs hors marché dont elle aurait connaissance.
- Que craignez-vous aujourd’hui?
- Si Madeco, devenu Indexans, ne peut lancer une OPA sur Nexans sans rompre ses accords, rien ne l’empêche d’apporter ses titres à une offre initiée par un tiers. Dans un contexte de consolidation du secteur et de pertes de parts de marché par Nexans, l’italien Prysmian semble un parfait prédateur. Dans un tel scénario, Indexans pourrait recevoir des actions Prysmian en échange de ses titres Nexans, et être ainsi indifférent au prix offert aux minoritaires, ou plutôt intéressé à ce que le prix soit le plus bas possible, comme dans l’offre en cours d’Axa PE sur le Club Med.
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Immigration clandestine : raid policier dans une usine Hyundai-LG aux Etats-Unis, près de 500 arrestations
Washington - Près de 500 personnes, dont une majorité de Sud-Coréens, ont été arrêtées par la police de l’immigration dans une usine de fabrication de batteries des groupes sud-coréens Hyundai et LG dans l’Etat de Géorgie (sud-est), soupçonnées de travailler illégalement aux Etats-Unis. Le raid, mené jeudi, résulte d’une «enquête pénale liée à des accusations de pratiques d’embauche illégales et à de graves infractions fédérales», a expliqué vendredi Steven Schrank, un agent du service d’enquêtes du ministère américain de l’Intérieur, au cours d’une conférence de presse. Il s’agit de «la plus importante opération des forces de l’ordre sur un même site de toute l’histoire du service des +Homeland Security Investigations+ (+Enquêtes sur la sécurité intérieure+)», a-t-il affirmé, s’exprimant d’Atlanta, dans l’Etat de Géorgie. Les 475 personnes arrêtées dans cette usine, située dans la ville d’Ellabell, se «trouvaient aux Etats-Unis de manière illégale» et «travaillaient illégalement», a affirmé M. Schrank, soulignant que la «majorité» d’entre elles étaient de nationalité sud-coréenne. Sollicité par l’AFP aux Etats-Unis, le constructeur automobile a répondu être «au courant du récent incident» dans cette usine, «surveiller étroitement la situation et s’employer à comprendre les circonstances spécifiques» de cette affaire. «A ce stade, nous comprenons qu’aucune des personnes détenues n'était directement employée par le groupe Hyundai», a-t-il poursuivi, assurant donner «priorité à la sécurité et au bien-être de quiconque travaille sur ce site et au respect de toutes les législations et réglementations». De son côté, LG Energy Solution a affirmé suivre «de près la situation et recueillir toutes les informations pertinentes». «Notre priorité absolue est toujours d’assurer la sécurité et le bien-être de nos employés et de nos partenaires. Nous coopérerons pleinement avec les autorités compétentes», a ajouté cette entreprise. La Corée du Sud, la quatrième économie d’Asie, est un important constructeur automobile et producteur de matériel électronique avec de nombreuses usines aux Etats-Unis. Mission diplomatique Une source proche du dossier avait annoncé quelques heures plus tôt, de Séoul, qu’"environ 300 Sud-Coréens» avaient été arrêtés pendant une opération du Service de l’immigration et des douanes américain (ICE) sur un site commun à Hyundai et LG en Géorgie. De son côté, l’agence de presse sud-coréenne Yonhap avait écrit que l’ICE avait interpellé jusqu'à 450 personnes au total. Le ministère sud-coréen des Affaires étrangères avait également fait d'état d’une descente de police sur le «site d’une usine de batteries d’une entreprise (sud-coréenne) en Géorgie». «Plusieurs ressortissants coréens ont été placés en détention», avait simplement ajouté Lee Jae-woong, le porte-parole du ministère. «Les activités économiques de nos investisseurs et les droits et intérêts légitimes de nos ressortissants ne doivent pas être injustement lésés dans le cadre de l’application de la loi américaine», avait-il poursuivi. Séoul a envoyé du personnel diplomatique sur place, avec notamment pour mission de créer un groupe de travail afin de faire face à la situation. Les autorités sud-coréennes ont également fait part à l’ambassade des Etats-Unis à Séoul «de (leur) inquiétude et de (leurs) regrets» concernant cette affaire. En juillet, la Corée du Sud s'était engagée à investir 350 milliards de dollars sur le territoire américain à la suite des menaces sur les droits de douane de Donald Trump. Celui-ci a été élu pour un second mandat en novembre 2024, en particulier sur la promesse de mettre en oeuvre le plus important programme d’expulsion d’immigrés de l’histoire de son pays. Depuis, son gouvernement cible avec la plus grande fermeté les quelque onze millions de migrants sans papiers présents aux Etats-Unis. Au prix, selon des ONG, des membres de la société civile et jusqu’aux Nations unies, de fréquentes violations des droits humains. D’Atlanta, le Bureau de l’alcool, du tabac, des armes à feu et des explosifs (ATF) a expliqué sur X avoir participé à l’arrestation d’environ 450 «étrangers en situation irrégulière» au cours d’une opération dans une usine de batteries, une coentreprise entre Hyundai et LG. Selon son site internet, Hyundai a investi 20,5 milliards de dollars depuis son entrée sur le marché américain en 1986 et compte y investir 21 milliards supplémentaires entre 2025 et 2028. L’usine d’Ellabell a été officiellement inaugurée en mars, avec l’objectif de produire jusqu'à 500.000 véhicules électriques et hybrides par an des marques Hyundai, Kia et Genesis. Elle devrait employer 8.500 personnes d’ici à 2031. © Agence France-Presse