«L’Ansa n’est pas favorable à une surtransposition de la directive sur le ‘say on pay’»

Muriel de Szilbereky, déléguée générale de l’Association nationale des sociétés par actions (Ansa), revient pour L’Agefi sur les avancées de la loi Pacte.
Bruno de Roulhac
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La loi Pacte vise notamment à transposer la directive «droits des actionnaires».  -  © Fotolia

L’Agefi : En quoi la loi Pacte, améliorera-t-elle les relations entre sociétés et proxys ?

Muriel de Szilbereky : La loi Pacte demande à l’AMF [l’Autorité des marchés financiers] de faire un rapport annuel sur l’activité des proxys. Nous n’avions pas demandé ce rapport, l’intervention du régulateur n’étant pas forcément obligatoire. Cette mesure se veut sans doute complémentaire de celles prévues dans les ordonnances qui transposeront la directive droits des actionnaires. Celle-ci demande aux proxys de préciser davantage leur politique de vote, la manière dont ils travaillent et la gestion des conflits d’intérêts, notamment entre leurs activités de conseil et de politique de vote. Ces mesures permettront aux entreprises de travailler plus sereinement avec les agences de conseil en vote, alors que le code européen de bonne conduite des proxys n’a pas encore abouti.

Si la gestion des conflits d’intérêts est primordiale, nous demandons aux proxys d’être plus attentifs aux spécificités nationales et d’améliorer le dialogue avec les sociétés en leur laissant le temps de tenir compte des remarques des proxys, voire de corriger des inexactitudes matérielles. Mais en aucun cas, nous ne voulons influer sur l’opinion des proxys.

Le vote sur la rémunération des dirigeants restera-t-il aussi exigeant ?

Le say on pay reste un sujet sensible. Nous ne sommes pas favorables à une surtransposition de la directive. Or, elle prévoit un vote sur la politique de rémunération tous les quatre ans, alors que la France l’exige tous les ans. Nous espérons que les ordonnances, attendues en juin, abandonneront le système actuel au profit d’un vote tous les quatre ans.

Nous sommes plus circonspects sur l’obligation de la publication des écarts de salaires dans l’entreprise. Nous souhaitions une entrée en vigueur progressive de cette mesure, mais nous nous félicitons que cette mesure se limite au président, au directeur général et aux directeurs généraux délégués. Calculer l’écart moyen et médian sur les cinq dernières années constituera un vrai défi pour les ETI [entreprises de taille intermédiaire].

Un dispositif pour caractériser une convention est nécessaire

Que proposez-vous pour définir le caractère réglementé d’une convention ?

La directive demandait la mise en place d’un dispositif spécifique qui permette de distinguer les conventions réglementées des conventions courantes. Nous avons proposé d’adopter ce système dans la loi Pacte, ce qui a été fait. Toutes les conventions réglementées seront publiées sur le site de la société dès leur conclusion. En revanche, nous étions opposés à la publication des conventions courantes. Ce nouveau système nous semble adapté. Toutefois, il est nécessaire de mettre en place un dispositif qui permette de définir le caractère réglementé ou courant d’une résolution. Pourraient s’en charger un comité du conseil en charge de l’audit interne, ou les commissaires aux comptes.

Les sociétés pourront-elles mieux connaître leurs actionnaires ?

La loi Pacte rend possible l’utilisation du titre au porteur identifiable [TPI] sans avoir besoin de l’inscrire dans les statuts de l’entreprise lorsqu’elle est cotée. La transposition de la directive permettra d’aller plus loin, puisque, pour les porteurs européens, les entreprises pourront connaître les détenteurs finaux. Les sociétés auront désormais le choix de s’adresser soit au dépositaire central [Euroclear], soit au teneur de compte. Une alternative qui donne plus de souplesse, plus de rapidité, et sans doute à moindre coût.

Pour une entrée progressive des salariés au conseil

Les sociétés vont-elles plébisciter l’adoption d’une «raison d’être» ?

Alors qu’Atos vient d’adopter sa «raison d’être», nous sommes dans l’expectative de la concrétisation de cette mesure dans les autres sociétés. Le plus délicat sera de contrôler l’adaptation de la stratégie du groupe à cette raison d’être. Si le risque de nullité des décisions du conseil a été écarté pendant le débat parlementaire, la question de la responsabilité reste présente. En réalité, beaucoup de sociétés ont déjà une raison d’être et ne voient pas l’utilité de l’inscrire dans leurs statuts. La concrétisation d’une telle disposition sera encore plus difficile pour les ETI.

Comment accueillez-vous le renforcement du poids des administrateurs salariés dans les conseils ?

Nous aurions préféré attendre un premier bilan de la dernière réforme et nous estimons sage que les préconisations du rapport Notat-Senard n’aient pas été entièrement suivies. Nous militons pour une entrée progressive des salariés au conseil. La formation de ces administrateurs dès leur prise de fonctions, imposée par la loi Pacte, est une véritable avancée.

Le financement des sociétés sera-t-il facilité ?

Les ETI pourront profiter du nouveau PEA-PME-ETI, dont le plafond est relevé de 75.000 à 225.000 euros, sous réserve que ce dispositif et le PEA classique ne dépassent pas un total de 225.000 euros. Sont désormais éligibles au PEA-PME-ETI les sociétés dont la capitalisation aura pu varier sur quatre exercices entre 1 et 5 milliards d’euros, alors que le plafond était auparavant à 2 milliards euros. En outre, la réforme de l’épargne retraite, en fonction de l’ampleur du dispositif décidé, devrait favoriser le financement en actions.

Par ailleurs, la réforme de l’actionnariat salarié constitue une réelle avancée pour les collaborateurs. Avec notamment la possibilité d’offrir une décote de 40%, au lieu de 30%, sur les actions mises sur un PEE.

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