La fidélité des clients d’OVH rassure mais l’heure de la conquête a sonné

OVHcloud reste sur son petit nuage. Trois mois après son arrivée remarquée sur Euronext Paris, le titre du fournisseur de services d’informatique dématérialisée (cloud) signe mercredi une des plus fortes progressions de l’indice SBF 120, qu’il a intégré en décembre. Grâce à un début d’exercice qualifié de « robuste » par Morgan Stanley et au maintien de ses perspectives, OVHcloud voyait son cours de Bourse progresser de 4,5% vers 15h50, à 25,55 euros.

Lors du premier trimestre de son exercice 2021-2022 qui s’achèvera fin août prochain, le spécialiste du cloud a réalisé un chiffre d’affaires de 187,2 millions d’euros, en croissance de 13,9%. Les ventes trimestrielles du groupe fondé par Octave Klaba ont progressé de 13,5% en données comparables, c’est-à-dire à taux de change et périmètre constants en excluant les impacts directs liés à l’incendie survenu en mars 2021 dans un centre de données à Strasbourg.

Le chiffre d’affaires trimestriel de l’entreprise a dépassé de 1,9% les prévisions moyennes des analystes compilées par JPMorgan Cazenove, excédant même de 3,7% la propre estimation de la banque d’affaires américaine. Cette performance s’explique par « la signature de grands comptes » et par le « succès continu de notre expansion à l’international, en Europe mais aussi aux Etats-Unis et en Asie », explique Michel Paulin, le directeur général d’OVHcloud.

« OVHcloud est, dès le premier trimestre, sur sa trajectoire de croissance visée pour l’ensemble de l’exercice en cours », relève alors un analyste basé à Paris. Pour 2021-2022, les dirigeants anticipent toujours une hausse des ventes comprise entre 12,5% et 15% en données publiées, ainsi qu’une marge d’excédent brut d’exploitation (Ebitda) ajusté proche de 40%.

Un indicateur « sensible » à surveiller

Mais la hausse affichée mercredi par l’action OVHcloud s’explique probablement autant, sinon plus, par le redressement d’un indicateur bien particulier: le taux de rétention net du chiffre d’affaires. Il est ressorti à 112% au premier trimestre de l’exercice en cours, alors qu’il s'établissait à 100% sur l’ensemble de l’exercice précédent. Ce taux est supérieur à 100% quand le chiffre d’affaires généré par un même portefeuille de clients augmente d’une année sur l’autre.

La forte progression de ce taux de rétention par rapport aux périodes précédentes démontre « la capacité du groupe à croître avec ses clients » existants, explique OVHcloud. Cette tendance, qui suggère « une progression saine du chiffre d’affaires moyen par client actif et une diminution du taux de désabonnement », a de quoi « apaiser les inquiétudes des investisseurs », considère JPMorgan Cazenove. C’est un signal « clairement positif », appuie Morgan Stanley.

Pour OVHcloud, la franche remontée du taux de rétention net du chiffre d’affaires, véritable indicateur de la fidélité de ses clients, est stratégique. Dans la foulée de l’incendie ayant anéanti au printemps 2021 une partie de ses infrastructures installées à Strasbourg, l’entreprise avait subi une vague de désabonnement en France, son principal marché comptant pour 50% de son activité. Ce point concentrait depuis l’essentiel de l’attention des investisseurs, nourrissant leurs craintes.

Mais cette hémorragie semble à présent contenue: « le taux de désabonnement est désormais revenu à son niveau d’avant l’incendie dans l’Hexagone », a assuré Michel Paulin, lors d’une conférence avec des analystes. « Nous prévoyons une poursuite de l’amélioration de notre taux de rétention », a ajouté Yann Leca, le directeur financier, sans toutefois fournir d’objectif précis, expliquant s’il le fallait encore qu’il s’agissait d’une donnée « sensible ».

Une sécurisation du portefeuille ne suffit plus

Dans ce contexte, les analystes devraient relever d’environ 1% leurs estimations de revenus pour l’exercice en cours, prédit Citi, qui salue la diminution du risque lié à la perte de clients consécutive à l’incendie. Pour JPMorgan Cazenove, les dirigeants ont gardé une marge de manœuvre pour relever leur objectif de croissance pour 2021-2022, « si le taux de rétention net du chiffre d’affaires se maintient ou continue de s’améliorer par rapport aux niveaux actuels ».

Le marché ne saurait toutefois se contenter d’une seule sécurisation du portefeuille de clients actuel. « Les attentes des investisseurs s'élèvent, alors que l’action OVHcloud a gagné 30% depuis son introduction en Bourse », observe Citi.

Quand le groupe aura définitivement tiré un trait sur l’incident strasbourgeois, les investisseurs s’attendront à ce que le taux de croissance des ventes retrouve rapidement ses niveaux historiques en France, soit autour de 10%. Au premier trimestre de l’exercice en cours, les ventes d’OVHcloud ont progressé de 7,4% en données publiées et de 8,7% en données comparables.

Combler cet écart nécessitera la reprise d’une politique commerciale agressive. « Après avoir consacré l’essentiel de nos efforts à préserver notre base de clients en France depuis mars dernier, le temps est venu de relancer la conquête », affirme Michel Paulin.