
General Electric enterre le modèle des conglomérats

Après avoir fortement remanié le périmètre de ses activités depuis la crise financière de 2008, General Electric (GE) s’apprête à franchir une étape ultime en renonçant à la forme conglomérale qui caractérisait le groupe depuis sa création en 1892. Il a choisi pour cela la voie d’une scission, un processus utilisé avant lui par d’autres groupes industriels américains comme Honeywell et United Technologies ou par l’allemand Siemens. Ces dernières semaines, les entreprises informatiques Dell et IBMont également choisi de se scinder pour améliorer le profil de leurs activités auprès des investisseurs.
Conseillé par Evercore et PJT Partners, GE projette une séparation en trois sociétés distinctes cotées en Bourse, présentes respectivement dans les secteurs de la santé, de l’énergie et des équipements aéronautique. Le groupe compte en premier lieu se séparer de son activité GE Healthcare début 2023, ne conservant qu’une participation de 19,9% dans sa filiale santé. Il a ensuite l’intention de regrouper ses activités GE Renewable Energy, GE Power et GE Digital, au sein d’une même entité dont le groupe se séparerait au début de 2024. A l’issue de ces opérations, exonérées d’impôt, l’entreprise demeurera une société recentrée sur les moteurs d’avions.
Larry Culp prendra la tête de la société d’aviation
Le PDG actuel de GE, Larry Culp, deviendra président non exécutif de GE Healthcare après sa séparation. Il restera PDG de GE jusqu'à la deuxième scission, date à laquelle il prendra les rênes de la société spécialisée dans l’aviation. Scott Strazik prendra la direction générale de l’entreprise consacrée à l'énergie et Peter Arduini dirigera GE Healthcare à partir du 1er janvier 2022. «En créant trois sociétés cotées de premier plan, chacune d’entre elles peut bénéficier d’une plus grande attention, d’une allocation de capital adaptée et d’une flexibilité stratégique pour stimuler sa croissance et sa valeur à long terme», a commenté Lawrence Culp, ajoutant que cette initiative ferait de GE une entreprise «simplifiée, plus robuste et plus spécialisée».
Cette réorganisation entraînera des coûts exceptionnels d’environ 2 milliards de dollars (1,7 milliard d’euros) ainsi qu’une charge fiscale inférieure à 500 millions de dollars. Pour honorer ses remboursements de dette pendant la période de transition, GE prévoit de récupérer de la trésorerie au moyen notamment de la cession programmée de ses participations dans la société de leasing aéronautique AerCap et l’entreprise parapétrolière Baker Hughes.
Mise sous surveillance négative par Moody’s
A la suite de ces annonces, S&P Global Ratings a placé la note de crédit BBB+ de GE sous surveillance négative, ouvrant la voie à un abaissement potentiel. Cette note se situe trois crans au-dessus de la catégorie spéculative. L’agence de notation américaine prendra sa décision lorsqu’elle aura plus de détails concernant «l’impact de la scission des activités santé sur le profil de risque financier de GE et sur sa capacité à réduire sa dette». Moody’s a de son côté maintenu sa note Baa1 assortie d’une perspective négative. Le coût de protection de la dette de GE, mesuré par les CDS (credit default swaps), a néanmoins atteint mardi son plus bas niveau en plus de trois ans, ce qui témoigne d’une opinion favorable des investisseurs crédit sur la qualité de son passif financier pour le moyen terme.
Le groupe estime être en bonne voie pour réduire sa dette brute de plus de 75 milliards de dollars entre fin 2018 et fin 2021 et ramener son levier financier (dette nette sur Ebitda) sous le seuil de 2,5 fois à l’horizon 2023. Il entend aussi désormais «dégager des marges de flux de trésorerie disponibles proches de 10%» à cette échéance. L’action progressait de 3,6% à 112,4 dollars à la clôture des Bourses européennes, reflétant une capitalisation boursière de 123,4 milliards de dollars.
Avec cette scission, General Electric signe donc la mort du modèle de conglomérat. Une étape logique pour un groupe qui a longtemps été le symbole de la puissance des entreprises industrielles américaines. Entre 1981 et 2000, GE s'était lancé dans une stratégie de croissance tous azimuts. Son emblématique patron Jack Welch, adepte de la mise sous tension des équipes et des réductions de coûts, passait alors pour un modèle de management. Mais la crise financière de 2008 a mis au jour la dépendance du groupe aux services financiers. GE a frôlé la faillite à cause de sa filiale financière GE Capital, très exposée au subprime, et a dû engager un long processus de désendettement et d’amaigrissement qui trouvera bientôt son épilogue.
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