
Règlement européen sur l’IA : une opportunité pour mieux investir ?

Adopté le 13 juin 2024, l’IA Act, le règlement sur l’intelligence artificielle (IA), doit entrer progressivement en vigueur pendant les trois prochaines années. L’objectif avoué de ce texte est de trouver un équilibre entre innovation et droits fondamentaux. Toutefois, à la différence de certains textes européens assez théoriques, le règlement IA propose une classification concrète des IA selon leur nature et leur niveau de risque et des obligations clairement alignées sur des standards internationaux de gouvernance tels que ceux promus par les normes ISO. Bien maitrisé, ce texte peut devenir un atout pour les investisseurs du domaine de l’IA.
Tout d’abord, le texte adopte une définition précise de l’IA, qui actionne les concepts d’autonomie, d’inférence et de potentielles évolutions. Dans un marché submergé de solutions innovantes, qui ont parfois une vision un peu extensive de ce qu’est l’IA, cette clarification des concepts pose un cadre bienvenu, qui doit permettre aux investisseurs d’identifier plus aisément les «véritables» IA.
Ensuite, et surtout, ce nouveau texte suit l’approche éprouvée de la législation de sécurité des produits. Les systèmes et modèles d’IA sont classés selon les risques qu’ils entrainent (risque inacceptable, haut risque et risque limité, ainsi que deux régimes spécifiques pour les IA à risque de transparence et les IA à usage général, dites «modèles de fondation»). De façon similaire aux machines, aux voitures, aux ascenseurs, aux jouets, aux dispositifs médicaux, les systèmes et modèles d’IA présentant un haut niveau de risque devront respecter des exigences rigoureuses pour être mis sur le marché ou mis en service, via une gouvernance interne (système de management des risques et de la qualité, documentation d’utilisation et technique, gouvernance des données, traçabilité, cybersécurité, etc.). Cette conformité sera attestée par une certification sous la forme d’un marquage CE.
L’IA à haut risque certifiée
Les systèmes d’IA «à haut risque» deviennent ainsi des produits réglementés et certifiés, ce qui constitue un élément aisément auditable pour les investisseurs et qui place également une part de la responsabilité sur le mécanisme de certification. Le niveau exigeant de gouvernance qui en découle doit renforcer les possibilités de due diligence des fournisseurs d’IA et de toute la supply chain, grâce à des points de contrôle.
Le fait que le règlement s’appuie également sur des notions connues de fournisseur, importateur et de distributeur, toujours dans la logique de la législation relative à la sécurité des produits, assure une certaine clarté des rôles et responsabilités de chaque opérateur dans la supply chain de l’IA. Les clients utilisateurs de l’IA, dénommés les déployeurs, sont cependant eux aussi soumis à des obligations nouvelles de vérification de la conformité et d’information de leurs propres utilisateurs.
Le règlement IA offre ainsi aux investisseurs une grille nouvelle d’analyse et d’audit des sociétés produisant ou utilisant l’IA de façon intensive. Aux termes du règlement mais également au regard des recommandations des autorités et des risques inhérents à l’IA, les points de contrôle les plus importants concernent :
- la détermination du rôle de la structure cible dans la supply chain de l’IA ;
- l’identification de la nature des systèmes ou des modèles d’IA, leur classe de risque et le respect des obligations essentielles attachées aux IA à haut risque, aux IA à risque de transparence et aux modèles de fondation ;
- des contrats correctement négociés, sur les aspects responsabilité, propriété intellectuelle, confidentialité, protection des données personnelles et sécurité, en tant que fournisseur d’IA ou en tant que client déployeur d’IA ;
- la mise à niveau de la gouvernance RGPD, pour toutes les solutions d’IA entrainées et fonctionnant sur des bases de données personnelles.
Grille d’analyse pour les investisseurs ou feuille de route pour les entreprises de l’IA, le règlement IA doit ainsi être utilisé comme un atout, promoteur d’une gouvernance saine, d’une standardisation accélérée et d’une bonne «auditabilité» des solutions.
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Bruxelles - Après une semaine d’atermoiements et faisant fi des menaces de Donald Trump, la Commission européenne a annoncé vendredi infliger une amende de 2,95 milliards d’euros à Google. L’exécutif européen a estimé que le géant américain de la tech avait abusé de sa position dominante dans le secteur de la publicité en ligne. Cette sanction dite Adtech, que Google a aussitôt annoncé vouloir contester, était très attendue. La Commission avait menacé en 2023 d’exiger la scission d’une partie des activités du groupe dans ce domaine de la publicité en ligne, ce qu’elle n’a finalement pas décidé à ce stade. L’annonce de cette sanction contre le géant américain avait été retardée en début de semaine, sur fond de tensions entre l’UE et les Etats-Unis, comme l’avait confirmé mercredi à l’AFP une source au sein de la Commission. Le 26 août, Donald Trump avait vigoureusement attaqué les pays ou organisations régulant le secteur de la tech, les menaçant de droits de douane et de restrictions à l’exportation. S’il n’avait pas cité directement l’Union européenne, celle-ci dispose de fait de l’arsenal juridique le plus puissant au monde pour réguler le numérique, alimentant les débats en Europe sur le risque de représailles en cas de sanctions contre des sociétés américaines. L’UE avait rétorqué avoir «le droit souverain» de réglementer la tech. «Injustifiée» Dans une déclaration à l’AFP, Google a pourfendu la sanction de la Commission. «La décision de la Commission européenne à propos de nos services Adtech est mauvaise et nous en ferons appel. Elle nous impose une amende injustifiée et des changements qui affecteront des milliers d’entreprises européennes, puisqu’elles auront plus de mal à gagner de l’argent», a déclaré Lee-Anne Mulholland, vice présidente de Google chargée des affaires réglementaires. C’est la troisième amende prononcée cette semaine contre Google, filiale d’Alphabet. Le groupe a été condamné mercredi aux Etats-Unis à verser 425,7 millions de dollars de dommages à près de 100 millions d’utilisateurs pour atteinte à leur vie privée, selon la décision d’un jury d’une cour fédérale de San Francisco confirmée par le géant américain. Et jeudi, il a écopé d’une amende record de 325 millions d’euros infligée par l’autorité française de contrôle du respect de la vie privée (Cnil) pour des manquements en matière de publicités et de cookies. En revanche, le groupe a remporté une victoire judiciaire majeure mardi aux Etats-Unis: un juge de Washington lui a imposé des exigences strictes sur le partage des données afin de rétablir l'équité dans la concurrence sur la recherche en ligne, mais sans l’obliger à céder son navigateur phare Chrome, comme exigé par le gouvernement américain. Frédéric POUCHOT © Agence France-Presse