«Nous devons protéger nos producteurs»

Entretien avec Kobenan Kouassi Adjoumani, ministre d’Etat, ministre de l’Agriculture et du Développement Rural de Côte d’Ivoire
Kobenan Kouassi Adjoumani, ministre d’Etat, ministre de l’Agriculture et du Développement Rural de Côte d’Ivoire
Kobenan Kouassi Adjoumani, ministre d’Etat, ministre de l’Agriculture et du Développement Rural de Côte d’Ivoire.  - 

Quelles mesures avez-vous prises pour lutter contre la déforestation occasionnée par la culture du cacao et du café ?

Kobenan Kouassi Adjoumani. - Nous avons pris plusieurs mesures, en concertation avec le ministère des Eaux et Forêts. En 2022 le Conseil du Café et du Cacao a présenté un programme de plantation d’arbres : en l’espace de 6 ans 60 millions de plants devraient être distribués et plantés afin de lutter contre la déforestation. Le cacao ne se cultive pas dans la savane, mais dans la forêt. Plus de 85% de la production est issu de la forêt ordinaire, dans les zones rurales. Seul 10 à 15% est produit dans des forêts classées.

Grâce au recensement mis en place en 2019-2020 par le gouvernement ivoirien, et exécuté par le Conseil Café et Cacao, nous avons identifié environ un million de producteurs de café et de cacao. Cette opération nous a permis de géolocaliser les plantations de nos producteurs. A l’issue de ce processus, des cartes de recensement, qui sont également des cartes bancaires, sont en cours de distribution à environ 1 million de producteurs. Si vous cultivez votre cacao dans une forêt classée et que vous n’avez pas été recensé, votre cacao ne trouvera pas d’acheteur. La notion de traçabilité est désormais établie.

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Quels seraient les impacts, pour la Côte d’Ivoire, de l’adoption par l’Union européenne d’un règlement sur la déforestation importée ?

-Les Européens doivent comprendre que notre économie repose sur notre agriculture. La Côte d’Ivoire est également un pays forestier. De telles réglementations viennent s’attaquer à des paysans qui cultivent 2 hectares, parfois moins.

En tant que pays souverain, nous devons protéger nos producteurs. Nous cherchons également à prendre des initiatives qui visent à lutter contre les effets du réchauffement climatique. Nous avons devancé l’Union européenne et avons déjà pris des mesures nous adapter à une telle réglementation, mais nous demandons en contrepartie à l’Union européenne d’œuvrer pour que le prix du cacao soit revu à la hausse. Nos cultivateurs assument l’essentiel du travail. Le kilogramme de fève de cacao se négocie à 900 Francs CFA, soit environ 1,38 euro ; transformé, le kilo se vend entre 25.000 et 30.000 Francs CFA (entre 38 et 46 euros). Ce n’est pas normal, l’UE a intérêt à veiller à un partage plus équitable de la valeur ajoutée. En outre, s’ils étaient bien rémunérés sur leurs petites parcelles, les cultivateurs n’auraient plus besoin d’entamer la forêt.

En conclusion nous devons travailler à reconstituer nos forêts mais nous devons également permettre à nos agriculteurs de vivre décemment, et de tirer des bénéfices des efforts accomplis.

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