
L’obligataire corporate profite de la quête de rendement
L’obligataire corporate est redevenu un marché amical pour les investisseurs. « Le rally depuis le début de l’année sur les ‘spreads’ et les taux est directement lié au changement de ton des banques centrales », affirme Thibault Colle, gérant obligations corporate chez UBP. Dès la fin 2018, en réaction au ralentissement économique, Jerome Powell, le président de la Fed, a tenu un discours plus accommodant. La Banque centrale européenne lui a emboîté le pas quelques semaines plus tard.
Le gérant d’UBP ne croit toutefois pas à la fin de cycle : « C’est un juste retour vers une croissance plus normale après l’accélération de 2017. Une croissance de 3,5 % au niveau mondial tout à fait correcte. » Une croissance ni trop forte, ni trop faible, idéale pour les marchés crédit, d’autant que les investisseurs ont l’assurance que les taux d’intérêt ne remonteront pas dans l’immédiat. « Cette politique accommodante, que d’aucuns anticipent pour toujours face à l’incapacité des banques centrales à normaliser leurs politiques monétaires, a provoqué une nouvelle ruée vers le rendement », note Hubert Lemoine, responsable de la gestion chez Schelcher Prince Gestion.
Engouement
La performance de la classe d’actifs au premier trimestre confirme ce constat. En Europe, les obligations investment grade affichent une performance de près de 3,5 % (coupon plus resserrement du spread) quand le high yield bondit de près de 6 %. Les rendements se sont resserrés de 1,4 % à 0,81 % et 5,14 % à 3,77 % respectivement. Aux Etats-Unis, la tendance est similaire ; les rendements revenant à 3,67 % et 6,32 % respectivement, contre 4,2 % et 7,95 % en fin d’année dernière. Ces différences reflètent le différentiel de taux et de croissance des deux côtés de l’Atlantique mais aussi un niveau d’endettement bien plus élevé aux Etats-Unis.
« La bonne performance est non seulement liée à la baisse des taux mais aussi au retour des investisseurs », indique Paul Gurzal, gérant chez La Française. La collecte des fonds est significative en Europe, précise-t-il, à plus de 4 milliards d’euros sur l’investment grade. Le high yield, qui avait commencé à enregistrer des sorties dès la fin 2017, a repris le chemin de la collecte avec 3,3 milliards de rentrées. Un autre soutien est la faiblesse du marché primaire high yield en Europe. « Le montant d’émissions est très faible cette année, ce qui est un facteur technique favorable pour le ‘high yield’ », affirme Paul Gurzal. En revanche, le primaire est très actif sur l’investment grade et dépasse le niveau du premier trimestre 2018. « Nous privilégions le ‘high yield’ à l’ ‘investment grade’ dont le couple offre/demande est moins attrayant et le rendement à moins de 1 % est devenu moins intéressant », poursuit le gérant.
Ces dernières semaines, le rally s’est poursuivi mais à un rythme moins soutenu. Juan Valencia, stratégiste crédit chez SG CIB, estime que le potentiel de resserrement des spreads est limité : « Le problème est que les ‘spreads’ sont certes encore écartés mais les rendements sont de nouveau bas. Or, plus le rendement est bas plus il est difficile pour le ‘spread’ de continuer de se resserrer fortement. » Bien sûr, les rendements ont été plus bas par le passé mais cela s’était fait avec le soutien de la BCE. Juan Valencia note que plus de 160 milliards d’obligations en euros traitent avec un rendement négatif. « Il est difficile de penser que le rally du premier trimestre va continuer au même rythme toute l’année », note pour sa part Thibault Colle, qui joue davantage le portage. Signe de cette prudence, « les investisseurs sont positionnés sur la partie courte dans l’ ‘investment grade’ euro », note Philippe Lespinard, directeur de la gestion obligataire chez Schroders. Autre signe, les marchés cash et dérivés divergent. Quand les indices CDS Crossover sont 30 points de base (pb) plus bas que fin septembre 2018, les obligations high yield affichent une différence de près de 100 pb : « Il y a clairement une volonté de la part des investisseurs de se réexposer à la classe d’actifs mais en restant prudents et en évitant de prendre des risques spécifiques », affirme Hubert Lemoine. Les investisseurs marchent sur des œufs en cette période de fin de cycle…

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