
Les premiers effets de la lutte contre l’évasion fiscale

L’année 2016 a été marquée par une amélioration de la transparence économique des entreprises et particulièrement en matière d’optimisastion fiscale des multinationales, conclut un rapport publié par l’ONG Oxfam le 6 décembre 2016, qui juge toutefois que «les avancées en ce qui concerne les politiques fiscales restent faibles.
Il est vrai que 2016 a été marqué par deux scandales aux retentissements mondiaux: le «Panama papers», en avril, rendu possible grâce aux fuites de millions de fichiers provenant du cabinet d’avocats Mossack Fonseca, et les «Bahamas leaks» en septembre grâce cette fois à une fuite de documents provenant du registre du commerce des Bahamas. Dans le premier scandale, 200000 sociétés offshore domicilées dans 21 paradis fiscaux ont ainsi pu être dévoilées, révélant de nombreux cas d'évasion fiscale, de corruption, de fraude et de blanchiment d’argent; et dans le deuxième les activités de 175000 entreprises, trusts et fondations des Bahamas ont été exposées au grand jour.
Concernant le projet de la Commission européenne d'établir une assiette commune consolidée pour l’impôt sur les sociétés (ACCIS), une nouvelle mouture a été présentée en octobre 2016 dans le cadre d’un paquet fiscal plus large. «L’idée est d’améliorer les conditions des entreprises de l’UE en simplifiant le système et en réduisant les coûts de mise en conformité pour les entreprises ayant des activités transfrontalières. La Commission explique également que l’ACCIS pourrait aider à éradiquer le transfert de bénéfices étant donné qu’il remplacerait, entre autres, le système de prix de transfert dans son ensemble». «Malheureusement, ajoute Oxfam, la nouvelle proposition de la Commission européenne présente de nombreux points faibles. Plutôt que de proposer des négociations autour de l’ACCIS, elle propose une approche en deux étapes dont la première se concentrerait uniquement sur l’assiette fiscale commune et la mise en place de la consolidation une fois l’assiette fiscale commune établie».
Au niveau mondial, le consultant Grant Thornton a relativisé les progrès réalisés par l’OCDE contre l'évasion fiscale dans un rapport publié en septembre 2016 : « une enquête mondiale menée auprès de 2600 entreprises dans 36 pays montre que le Plan BEPS finalisé en octobre 2015 n’a que peu d’impact. En effet, 78% des entreprises affirment ne pas avoir changé leur attitude face à la fiscalité (…). Ce manque d’impact se ressent d’autant plus au sein du G7 où 89% des entreprises américaines et 86% des entreprises britanniques affirment que le Plan BEPS n’a que peu de conséquences sur leur planification fiscale. D’après les entreprises interrogées, le Plan BEPS a eu plus de portée sur la planification fiscale des entreprises implantées en Indonésie (35%), au Nigéria (38%) et en Inde (36%) ».
S’agissant de la France, le rapport souligne : «Bien que le compromis trouvé pour un reporting (d’entreprises) pays par pays public au niveau national soit critiqué, il faut reconnaitre que la France est le premier pays européen à avoir adopté un reporting pays par pays public pour toutes les entreprises, et ce, sans attendre l’adoption d’une telle mesure au niveau européen», saluent les auteurs du rapport. Ils se félicitent également de «la promesse de la France de faire tout son possible pour la mise en place d’un reporting pays par pays au niveau européen». Autre motif de satisfaction pour Oxfam, la lumière jetée sur l’utilisation des sociétés écran. «La France a voté en faveur de registres publics de bénéficiaires effectifs, ce qui laisse penser, qu’à six mois de l’élection présidentielle, elle cherche à endosser de nouveau son rôle de faire de lance en matière de transparence», note le rapport.
En revanche, Oxfam critique le système français de conventions fiscales car «le nombre élevé de conventions fiscales « très restrictives » avec des pays en développement sape fortement le système fiscal de ces pays», s’inquiètent les auteurs. En ce qui concerne les pratiques fiscales dommageables, qui permettent aux entreprises multinationales d’échapper à l’impôt, Oxfam juge que «la France n’est ni la meilleure, ni la pire». Mais «le fait que la France oeuvre activement contre la création d’un organisme fiscal intergouvernemental est également problématique». Selon le rapport, un tel organisme permettrait aux pays en développement de participer à l’élaboration des normes fiscales internationales au même titre que les autres pays.
Plus d'articles du même thème
-
La réforme impossible des droits de succession
En France, toucher à l’héritage relève presque du sacrilège. Pourtant, la pression budgétaire et la dimension régressive de la fiscalité appliquée imposent un débat devenu inévitable. -
Le Pacte Dutreil constitue un outil clé de la transmission des sociétés opérationnelles
Créé pour faciliter la transmission des entreprises familiales, le pacte Dutreil offre un puissant allègement fiscal, rappelle Céline Gagnaire, Family Officer chez Herest. Mais derrière ses avantages, ce dispositif stratégique reste encadré par des règles complexes et fait l’objet d’un débat croissant sur son coût et son équité. -
La Banque de France se prononce en faveur de mesures anti-optimisation sur les hauts patrimoines
François Villeroy de Galhau veut serrer la vis sur l’optimisation des hauts patrimoines, au nom de l’équité fiscale.
Sujets d'actualité
ETF à la Une

Invesco casse les frais de gestion sur son ETP Bitcoin
- Le patron de la Société Générale prend la menace Revolut au sérieux
- L’AMF sanctionne Altaroc et ses deux dirigeants à hauteur de 1,3 million d’euros
- BNP Paribas confirme ses objectifs 2025 et dévoile des ambitions pour 2028
- Le Crédit Agricole revendique une place dans l’accès aux soins et les services aux plus âgés
- Rubis confirme avoir engagé des discussions avec des acteurs industriels et financiers
Contenu de nos partenaires
-
Guinée : vote sous tension sur une nouvelle Constitution ouvrant la voie à Doumbouya
Conakry - Les Guinéens votent dimanche sur un projet de nouvelle Constitution visant à la fin de la transition quatre ans après la prise du pouvoir par des militaires, mais qui permettrait au chef de la junte de se présenter à une future présidentielle, ce que fustige l’opposition appelant au boycott. Quelque 6,7 millions de Guinéens, sur environ 14,5 millions d’habitants, sont appelés aux urnes de 08H00 à 18H00 (locales et GMT). Les résultats sont attendus à partir de mardi soir, selon la Direction générale des élections (DGE). Plusieurs dizaines de personnes, dont de nombreux jeunes, faisaient la queue dans une ambiance animée et ont commencé à voter dès 7H (locale et GMT) dans une école du quartier de Kaloum, dans le centre de Conakry, a constaté une journaliste de l’AFP. Sa carte d'électeur à la main, en sweat à capuche, Ahmad Diallo, 23 ans, étudiant, discute et plaisante avec ses amis après avoir voté. «Tout le monde veut la paix et que la transition se termine», affirme cet électeur qui affiche son soutien aux militaires. Espéré depuis des années par la population et la communauté internationale, ce scrutin ouvre une séquence clef dans ce pays parmi les plus pauvres du monde, dirigé d’une main de fer par le général Mamadi Doumbouya depuis qu’il a renversé le président civil élu Alpha Condé en 2021. C’est la première fois que Aisha Camara, 20 ans, jolies fossettes et yeux en amande, vote. Elle estime que la Constitution «est une bonne chose pour la Guinée» et affirme être «venue pour soutenir le président Doumbouya». Dispositif de sécurité Le centre de la capitale et ses abords étaient calmes dimanche, mais les rues étaient quadrillées par un important dispositif de sécurité, dont des véhicules blindés et des barrages de policiers qui contrôlent tous les véhicules et inspectant les coffres. Pas moins de 45.000 agents des forces de défense et de sécurité ont été mobilisés pour sécuriser le vote, ainsi qu’un millier de véhicules légers et blindés et des hélicoptères de combat, a précisé la gendarmerie nationale. Les autorités ont annoncé des élections présidentielle et législatives en vue d’un retour à l’ordre constitutionnel avant la fin de cette année, sans toutefois donner de date. La campagne pour le «oui» au référendum a été ostentatoire à travers le pays et largement incarnée par Mamadi Doumbouya, 40 ans, à grand renfort d’affiches à son effigie, rassemblements et fanfares. Celle du «non» a, elle, été quasi inaudible, et s’est faite via des messages sur les réseaux sociaux essentiellement de personnalités en exil. Une chape de plomb s’est abattue en Guinée sur les voix dissidentes depuis l’arrivée des militaires au pouvoir. Plusieurs partis politiques et médias ont été suspendus, les manifestations - interdites depuis 2022 - sont réprimées, et de nombreux dirigeants de l’opposition ont été arrêtés, condamnés ou poussés à l’exil. Les disparitions forcées et enlèvements se sont multipliés, rapportent les défenseurs des libertés. Le 23 août, la junte a suspendu pour trois mois deux des principaux partis d’opposition. «Mascarade» Dans ce contexte, l’opposition a appelé les Guinéens à rester chez eux, dénonçant «une mascarade électorale», aux résultats «connus d’avance». Elle accuse la junte de vouloir se maintenir au pouvoir à la faveur de ce référendum. Si elle est adoptée, cette Constitution remplacera la «Charte de la transition», établie par la junte après le coup d’Etat et qui interdisait notamment à ses membres de se présenter aux élections. Or, cette interdiction ne figure plus dans le projet de Constitution, ouvrant la voie à une candidature du général Doumbouya. Mais en affirmant la nécessité pour être candidat à une présidentielle d’"être âgé de 40 au moins et de 80 ans au plus» et d’avoir «sa résidence principale» en Guinée, le texte exclut de fait deux des principaux opposants: l’ex-président Alpha Condé, 87 ans, exilé à Istanbul, et l’ex-Premier ministre Cellou Dalein Diallo, 73 ans, en exil entre Dakar et Abidjan. Depuis le coup d’Etat, la Guinée est suspendue par l’Union africaine et elle n’est pas invitée à participer aux réunions de chefs d’Etat de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest, qui a dépêché une mission dans le pays. Lucie PEYTERMANN © Agence France-Presse -
Derrière la taxe Zucman, une volonté claire de « mettre à terre l'économie française », selon Bernard Arnault
Le PDG du numéro un mondial du luxe LVMH a étrillé le projet de prélèvement sur les patrimoines de pkus de 100 millions d'euros, qualifiant l'économiste qui en fait la promotion, de « pseudo universitaire » et de « militant d'extrême gauche » -
Fuyant leur maison de retraite, trois nonnes octogénaires en Autriche regagnent leur couvent
Elsbethen - Leur histoire a ému en Autriche et suscité une couverture médiatique frénétique ces derniers jours. Trois nonnes placées contre leur gré en maison de retraite par leurs autorités religieuses ont réussi à regagner le couvent où elles ont vécu presque toute leur vie. Samedi, une vingtaine de leurs anciens élèves et soutiens sont venus partager une prière et un déjeuner avec les soeurs Rita, 81 ans, Regina, 86 ans, et Bernadette, 88 ans, dans la chapelle du château de Goldenstein, à Elsbethen près de Salzbourg (centre), qui abrite le couvent. Le bâtiment, situé face à la montagne, a des allures féériques. Et les nonnes comptent bien y passer le restant de leurs jours. C’est au début du mois de septembre qu’elles ont décidé de se rebeller et de fuir la maison de retraite où elles affirment avoir été placées sans en avoir été averties au préalable depuis fin 2023. Les trois religieuses étaient les dernières à occuper le château de Goldenstein, qui abrite un couvent et une école privée depuis presque 150 ans. C’est «une cause importante», déclare à l’AFP Eva-Maria Seeber, 76 ans, une ancienne élève. «On ne peut pas déplacer des personnes âgées de cette manière. Je trouve cela cruel!» «C’est divin!» Selon les responsables de l’Eglise, les trois femmes ont été transférées dans une maison de retraite catholique située à une dizaine de minutes en voiture du château en raison de leur état de santé déclinant. Le supérieur des religieuses, le prévôt Markus Grasl de l’abbaye de Reichersberg, les a accusées de violer leur devoir d’obéissance et «de trahir les voeux qu’elles ont pris et réaffirmés à plusieurs reprises». Alors que les projets de l’Eglise pour le couvent ne sont pas clairs, les nonnes offrent une version différente, affirmant qu’elles n’ont jamais «été consultées» et avoir été décrites comme «souffrant de démence sévère» pour justifier leur placement. C’est «sous un ciel bleu et ensoleillé que nos prières ont été exaucées», raconte soeur Bernadette, décrivant comment il y a deux semaines, avec la l’aide de leurs soutiens — un groupe qui compte près 150 personnes —, elles avaient pu quitter la maison de retraite et retrouver leur couvent. «Le serrurier était là pour ouvrir la porte, et nous avons pu monter dans nos cellules sans aucun problème», a déclaré la religieuse, arrivée au couvent en 1948. Elles ont eu «le grand choc» de découvrir que les pièces avaient été vidées, et qu’il n’y avait plus ni eau courante ni électricité. Depuis, tout est rentré dans l’ordre, et elles savourent d’avoir retrouvé leur environnement. «Nous sommes enfin de retour chez nous, c’est divin!», se réjouit soeur Bernadette. Selon leurs soutiens, les visages des religieuses se sont illuminés depuis leur retour. «Elles se sont épanouies dès le premier jour où elles sont revenues. Elles vont bien et sont heureuses d'être de retour chez elles», déclare Martina Krispler, 28 ans, qui a apporté le déjeuner samedi. «Les soeurs ont toujours été chaleureuses, aimantes et attentionnées pendant nos années d'école, et nous ne sommes pas d’accord avec la manière dont l’Eglise les traite», ajoute-t-elle. Les trois femmes espèrent pouvoir se réconcilier avec l’Eglise, et rester dans le couvent «jusqu'à la fin de (leurs) vies». «Ils devraient tenir leurs promesses. C’est notre seule déception, qu’ils aient rompu leur promesse de nous garantir une résidence à vie», déclare soeur Bernadette, appuyée sur son déambulateur. Une collecte de fonds a été lancée et leurs soutiens entretiennent leur présence sur les réseaux sociaux, publiant des vidéos de la vie quotidienne des trois octogénaires. Dans l’une d’entre elles, on peut apercevoir soeur Rita faire son jogging vêtue de sa robe de religieuse, au son du célèbre thème musical du film Rocky. Kiyoko METZLER © Agence France-Presse