
Le risque géopolitique, séquelle du Covid

Chaque grande crise est l’occasion de rebattre les cartes du monde, et le Covid ne déroge pas à la règle. Dix-huit mois de pandémie ont accéléré le déplacement du centre de gravité géopolitique vers l’Asie et le sentiment d’un déclassement des sociétés occidentales. La Chine a vite claironné sa victoire sur le virus, mais cette proclamation a fini de dessiller les opinions publiques et les gouvernements sur la réalité des rapports de force planétaires. D’un côté, la peur de la pénurie, le besoin vital de retrouver l’indépendance dans des secteurs essentiels comme la santé et la technologie remettent au goût du jour le concept de politique industrielle. De l’autre, le soft power chinois s’effrite, révélant l’approche plus coercitive de Pékin, celle de la diplomatie agressive des « loups guerriers » et des sanctions à l’égard de députés européens trop portés sur la défense des droits de l’homme.
L’Union européenne avait commencé avant la crise sanitaire à cesser de considérer son marché intérieur comme un terrain de jeu ouvert à tous les vents de la concurrence, même déloyale. Du contrôle des investissements directs étrangers à la gestion des marchés publics dans des domaines sensibles comme les réseaux 5G, sa boîte à outils s’est bien étoffée. Début mai, la Commission européenne a ajouté deux nouvelles batteries de réformes à son arsenal. La première doit permettre de barrer la route aux entreprises indûment subventionnées dans leur pays d’origine, la seconde vise à réduire une dépendance excessive pour l’approvisionnement en semi-conducteurs ou en composants pharmaceutiques. Quelques mois après le traité d’investissement sino-européen signé à la va-vite et que le Parlement n’est pas près d’agréer, Pékin est implicitement ciblé. Mais l’Europe reste dans la réaction, toujours avec un train de retard sur un modèle économique chinois davantage tourné aujourd’hui vers son marché intérieur.
Il faut aussi voir la menace chinoise derrière le rapprochement que l’UE et l’Inde ont annoncé ces dernières semaines. Diversifier les sources d’approvisionnement, projeter l’Union européenne vers les océans Indien et Pacifique, justifie la reprise de négociations commerciales qui s’étaient soldées il y a huit ans par un échec.
En Asie-Pacifique même, où d’autres pays et régimes comme Singapour et la Corée du Sud sortent gagnants de la crise, les visées hégémoniques de Pékin nourrissent en retour une logique de containment comme aux temps de la guerre froide. D’où l’activisme des Etats-Unis dans la région, d’où les tensions croissantes autour de Taïwan, de la mer de Chine, ou avec l’Australie. Pour les investisseurs encore légitimement préoccupés par la situation sanitaire et le rythme de la reprise économique, l’impact de la pandémie est désormais à chercher ailleurs : dans les bouleversements géopolitiques que la crise du Covid précipite.
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La Havane - Une nouvelle panne générale d'électricité touche Cuba mercredi, la cinquième en moins d’un an sur l'île, qui fragilise l’activité économique du pays et met à rude épreuve la vie quotidienne des habitants. «Il y a eu une déconnexion totale du système électrique qui pourrait être liée à une panne inattendue» de la centrale électrique Antonio Guiteras, située au centre de l'île, a indiqué le ministère de l'Énergie et des Mines sur son compte X. Les autorités ont précisé par la suite que la panne, qui s’est produite aux alentours de 09H15 locales (13H15 GMT), était due à un signal erroné de surchauffe dans la chaudière de la centrale électrique, la plus importante du pays, ce qui a provoqué son arrêt et l’effondrement de l’ensemble du réseau. Le Premier ministre, Manuel Marrero Cruz, a assuré sur X que le pays avait «une stratégie bien définie» pour rétablir l'électricité «dans les plus brefs délais». Depuis octobre 2024, l'île communiste de 9,7 millions d’habitants a déjà subi quatre pannes généralisées, dont certaines ont duré plusieurs jours. Dans les rues de la capitale, de rares feux de signalisation fonctionnent, récemment équipés de panneaux solaires, tandis que de nombreuses personnes ont regagné leur domicile pour tenter de se préparer à l'éventualité d’une panne prolongée. «A nouveau, une journée de perdue ! Agonie et tristesse et pour certains désespoir», déplore auprès de l’AFP Alina Gutiérrez, 62 ans, qui a appris la nouvelle de la panne alors qu’elle faisait des achats sur un marché de fruits et légumes dans un quartier central de La Havane. Elle se hâte maintenant de rentrer chez elle, pour «prendre toute l’eau possible» de réserve et «attendre pour voir combien de temps cela va durer», alors que de nombreux immeubles dans la capitale sont alimentés en eau grâce à des pompes électriques. Dimanche, cinq des quinze provinces de l'île avaient déjà été plongées plusieurs heures dans l’obscurité en raison d’une panne sur une ligne du réseau électrique. «Dépense importante» Outre les grands hôtels et certains hôpitaux, dotés de groupes électrogènes, de plus en plus de familles et de propriétaires de petits commerces privés ont acquis de petits générateurs électriques pour pallier les pannes et délestages toujours plus fréquents. Mercredi, dans les quartiers les plus aisés de La Havane, le ronronnement de générateurs est continu, mais les coupures fragilisent notamment les petits commerces privés, qui ont fleuri depuis leur autorisation en 2021. «Cela nous affecte beaucoup», explique à l’AFP Odette Leon, 34 ans, propriétaire d’une pâtisserie dans l’ouest de la capitale. «Nous avons un générateur, mais cela entraîne une dépense plus importante parce qu’il faut du carburant, qui en ce moment n’est pas très facile à trouver», explique-t-elle, en demandant à ses employés d’annuler les commandes jusqu'à nouvel ordre. Cuba est en proie depuis cinq ans à une profonde crise économique, avec un manque cruel de devises, et le système électrique vétuste souffre d’avaries fréquentes et de pénuries de combustible. Les huit centrales électriques du pays ont presque toutes été inaugurées dans les années 1980 et 1990. Elles tombent régulièrement en panne ou doivent être arrêtées pour de longues semaines de maintenance. Deux centrales flottantes louées à une entreprise turque et des générateurs, qui complètent le réseau énergétique, sont alimentés par des combustibles que Cuba importe difficilement. L’installation récente de trente parcs photovoltaïques, soutenue par la Chine, sur les 52 prévus pour cette année, n’a pas permis pour l’heure de faire diminuer les coupures. Pendant l'été, alors que la consommation atteint des pics en raison des températures élevées, les délestages se sont multipliés. Selon les autorités, ces coupures programmées ont duré en moyenne près de quinze heures par jour en août et seize heures en juillet, dans tout le pays. Cuba traverse sa pire crise économique depuis trois décennies. Outre les coupures d'électricité, les habitants souffrent de pénuries en tous genres et d’une forte inflation. Aux faiblesses structurelles de son économie planifiée et centralisée s’ajoutent l'échec d’une réforme monétaire récente et un renforcement de l’embargo américain, en vigueur depuis 1962. Jordane BERTRAND © Agence France-Presse -
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