
Les banques de Wall Street se préparent au tournant de la rigueur

Les résultats des banques américaines incitent à la prudence. Après JPMorgan, Citi et Bank of America qui ont publié des bénéfices nets en berne vendredi dernier, Goldman Sachs et Morgan Stanley ont confirmé ce mardi le ralentissement de l’activité au quatrième trimestre.
Le résultat net de la firme dirigée par David Solomon plonge de 69%, à 1,2 milliard de dollars, victime d’une baisse des transactions dans la banque d’investissement mais aussi de ses errances dans la banque au quotidien. Goldman Sachs avait ainsi présenté à l’automne son troisième plan de restructuration en quatre ans, qui donne un coup d’arrêt à ses ambitions dans la banque grand public pour recentrer sa marque Marcus sur la clientèle fortunée. Le groupe a, par ailleurs, décidé de réunir sa gestion de fortune et sa gestion d’actifs au sein d’une même entité. Il veut constituer un troisième pilier avec les activités de paiement et de plateforme financière pour le compte de grands corporates, comme Apple.
Mais les résultats s’avèrent pour le moment décevants dans les trois jambes du groupe. A l’image de ses concurrentes, la banque d’investissement est victime des incertitudes macroéconomiques et voit ses revenus plonger de 48%, à 1,87 milliard de dollars. Les revenus issus de la division de gestion d’actifs baissent de 27%. Quant à son entité de solutions financières, que son PDG a érigée en voie d’avenir, elle a enregistré une perte avant impôt de 778 millions de dollars. David Solomon a toutefois voulu rassurer les investisseurs sur la pertinence de ce choix stratégique, en affirmant que le partenariat avec Apple, auquel Goldman Sachs fournit une carte de crédit, permettrait de « dégager des dividendes significatifs à moyen terme ».
Morgan Stanley limite la casse
Les résultats de Morgan Stanley confirment le ralentissement dans la banque d’investissement, dont les revenus ont chuté de moitié au cours du dernier trimestre de 2022 à 1,25 milliard de dollars. Avec un bénéfice net en baisse de 41%, la banque fait toutefois mieux qu’attendu. Morgan Stanley, qui tire désormais plus de la moitié de ses revenus de la gestion d’actifs et de la gestion de fortune, profite de sa moindre dépendance à la banque d’investissement. Sa performance dans la gestion de fortune, dont le revenu grimpe de 6% grâce à la remontée des taux d’intérêt, lui permet ainsi de limiter la casse.
Le trading constitue l’autre bonne surprise pour Morgan Stanley, ses revenus ayant progressé de 26% au cours du trimestre à 3,02 milliards de dollars. Une performance qui contraste avec celle de Goldman Sachs dont les revenus du trading, qui avaient soutenu l’activité au premier semestre, ne suffisent plus à compenser le recul des autres activités. Son trading de taux, devises et matières premières continue à bénéficier de la volatilité (+44%, à 2,69 milliards de dollars), tandis que le trading actions décroche (-5%, à 2,07 milliards de dollars).
Crainte d’une récession
Si Morgan Stanley tire son épingle du jeu, les deux banques de Wall Street sont victimes des mêmes inquiétudes macroéconomiques quant à la perspective d’une récession aux Etats-Unis. Morgan Stanley a ainsi passé des provisions pour pertes de crédit de 87 millions de dollars au quatrième trimestre, contre 5 millions un an plus tôt. Signe de la dégradation de son scénario, Goldman Sachs a, quant à elle, provisionné 972 millions de dollars, contre 344 millions de dollars un an plus tôt.
Dans un tel contexte, la hausse des coûts enregistrée au quatrième trimestre est considérée comme pénalisante. Goldman Sachs, qui semble ne pas avoir anticipé la hausse des rémunérations sur les neuf premiers mois de 2022, a ainsi vu ses coûts salariaux augmenter de 16% au quatrième trimestre. « Les revenus ont été insuffisants, les dépenses et le coût du risque sont tous deux élevés, ce n’est pas une bonne combinaison », note Susan Roth Katzke, analyste chez Credit Suisse. La firme de Wall Street doit désormais s’atteler à expliquer à ses banquiers d’affaires et ses traders que les bonus ne seront pas aussi élevés que l’an passé. Ils pourraient chuter de 40% en 2023 dans la banque d’investissement.Les coupes dans les effectifs sont également au menu, Goldman Sachs prévoyant de licencier quelque 3.000 employés, bien plus que son turn over habituel.
Morgan Stanley n’échappera pas non plus à la chasse aux coûts. Ses dépenses opérationnelles au dernier trimestre ont progressé de 11% sur un an, et de 5% par rapport au trimestre précédent, à 8,09 milliards de dollars. La banque a, elle aussi, commencé à prendre le virage de la rigueur budgétaire. En décembre dernier, elle a lancé une nouvelle série de 1.600 suppressions de postes, soit près de 2% de son effectif total.
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