
L’assurance emprunteur s’ouvre en grand aux convoitises

Assureurs traditionnels et bancassureurs sont sur le pied de guerre. Les seconds ont été déboutés vendredi par le Conseil constitutionnel en tentant de préserver le marché lucratif de l’assurance emprunteur, qu’ils détiennent à 88%, et où leurs marges vont de 40% à 50%. L’institution a en effet validé la possibilité pour tous les détenteurs de crédits immobiliers (y compris les anciens contrats, ceux qui posaient question) de résilier annuellement leur assurance de prêt.
Le marché est énorme : six millions de foyers sont détenteurs d’un crédit immobilier, d’après l’observatoire des crédits aux ménages. En 2016, le montant des cotisations au titre des contrats d’assurance emprunteur a représenté 8,8 milliards d’euros, selon la Fédération française de l’assurance (FFA). Cette garantie peut représenter jusqu'à 40% du coût global d’un emprunt immobilier, a mesuré la Centrale de financement, un courtier en prêt immobilier.
Les compagnies d’assurance non filiales de banques, appelées sur ce marché les «assureurs alternatifs», ont déjà des offres dans leurs tiroirs, créées fin 2016, lorsque la disposition avait été introduite dans la loi Sapin 2. La Macif et la Maif vantaient alors jusqu’à 10.000 euros et 50% d’économies, à protection équivalente.
L’avantage à renégocier est plus important chez certaines catégories d’emprunteurs. En effet, les filiales d’assurance des banques vendent des contrats collectifs, qui mutualisent les risques, et donc les prix. Les assureurs alternatifs, eux, proposent des contrats individuels : un jeune présentant moins de risques paiera moins cher que pour un contrat collectif. «Les banques françaises restent attachées au principe de mutualisation qui offre un accès au crédit le plus large possible», s’est défendue vendredi la Fédération bancaire française (FBF), qui avait déposé la question prioritaire de constitutionnalité en juillet dernier.
Plus d’un tiers du stock des contrats existants
Outre les jeunes, 50% des contrats bancaires ont des garanties non adaptées aux cadres et fonctionnaires, sans présenter des tarifs plus attractifs, remarque Securimut, l’entité spécialisée en assurance emprunteur de la Macif et de la Maif. Par ailleurs, certains contrats ne sont plus adaptés à la situation de leurs emprunteurs : 50% des contrats bancaires ne couvrent pas ou mal l’incapacité des assurés qui n’ont plus d’activité professionnelle, chômeurs, en congés parentaux, ou retraités, ajoute Securimut.
Dans certaines banques, plus d’un tiers du stock de contrats de prêts pourrait être concerné par la résiliation annuelle, estime le réseau de courtiers en crédit Vousfinancer.
Le pactole ne tombera toutefois pas du ciel. En novembre 2017, le site de comparaison d’assurances Magnolia.fr a réalisé un sondage auprès de 10.000 propriétaires, et 67% des interrogés n’avaient pas connaissance de leur droit à la résiliation annuelle.
Attention par ailleurs aux conséquences perverses. Réalisant des marges importantes sur l’assurance emprunteur, les banques pouvaient présenter des taux de crédit immobilier attractifs. «Les emprunteurs concernés sont essentiellement ceux qui ont souscrit un crédit récemment, donc à des taux très bas tels que nous les connaissons depuis quatre ans», souligne Jérôme Robin, président et fondateur de Vousfinancer. Sur ces prêts, «les marges des banques pourraient devenir négatives a posteriori une fois l’assurance résiliée…» Les banques pourraient alors compenser le manque à gagner avec «une remontée graduelle des taux de crédit».
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Kaliakra - Ensemencement décalé, filets plus profonds. En mer Noire, le Bulgare Nayden Stanev adapte son élevage de moules en espérant tirer son épingle du jeu car ici, le réchauffement est moins intense qu’en Méditerranée et l’eau donc plus clémente pour le petit mollusque à coque noire. «Cette année, on s’en tire bien», dit à l’AFP le mytiliculteur de 56 ans à bord de son vieux bateau diesel, évoquant les 20% de coquillages qui n’ont pas survécu à la canicule marine, qui décime les élevages d’Europe. Car ce coquillage est menacé, au grand désespoir des principaux pays producteurs que sont l’Espagne et l’Italie, où la production baisse inexorablement ces dernières années. Bien sûr, avec son millier de tonnes produits par an contre plus de 54.500 rien que pour la France en 2023, la Bulgarie est encore loin de jouer dans la cour des grands. Mais elle est déjà le premier producteur en Europe de l’Est. Pleine saison Avec les eaux de la Grèce voisine qui tendent à se «tropicaliser», de nouvelles opportunités s’offrent à Nayden Stanev qui compte bien en profiter et fait tout pour adapter sa ferme marine. Car la Méditerranée est l’une des mers qui change le plus vite. Avec une température moyenne en surface de 26,79°C, elle a connu cette année son mois de juillet le plus chaud jamais enregistré, selon Mercator Océan International, opérateur du service Copernicus Marine de l’Union européenne. Si ces hausses de température ne sont pas nouvelles, le changement climatique les rend de plus en plus fréquentes, de plus en plus longues, de plus en plus extrêmes. Avec ses 25,46°C degrés sur la même période, la mer Noire laisse plus de temps aux professionnels pour s’adapter et la baie du cap Kaliakra (nord-est), protégée des courants, demeure privilégiée. En compagnie de ses six employés, Nayden Stanev est sur le pont dès l’aube pour récolter et livrer sa production alors que la saison bat son plein en cette fin du mois d’août. Gestes ancestraux Le téléphone de cet ancien commando de marine sonne sans interruption tandis qu’il prend les commandes sur un petit carnet. Ce jour-là, ce ne sont pas moins de dix tonnes de moules qu’il devra livrer. Des centaines de restaurants et les marchands locaux sont très demandeurs, mais aussi la Roumanie voisine. Après une courte traversée, l'équipage atteint les 200 hectares de champs de moules. A la surface flottent des bouées sombres auxquelles sont suspendus de longs filets sur lesquels elles croissent. Sans échanger un mot, les hommes travaillent avec des gestes ancestraux: l’un fait émerger les précieuses coquilles, l’autre les nettoie, un troisième les trie. Les sacs de 800 kilos s’empilent, des cormorans guettent les restes avant que le bateau ne revienne à quai en début d’après-midi, attendu par plusieurs camions frigorifiques. Quelques habitants patientent aussi, munis de seaux pour le dîner en famille. Malgré la bonne récolte, les experts invitent à la prudence. Ici non plus «la mer n’a pas le temps de refroidir, quand le réchauffement est prolongé», déplore Radoslava Bekova, de l’institut d’océanologie à l’académie bulgare des sciences. «Fragilisée, la moule est vulnérable aux maladies» et l’année dernière, les pertes avaient été très lourdes, rappelle-t-elle. Chute de la production La production de moules dans l’UE est en baisse depuis 2018 tandis que la production mondiale a continué de croître, selon les données de l’Observatoire européen des marchés des produits de la pêche et de l’aquaculture (EUMOFA). En 2023, le volume récolté dans l’UE était inférieur d’environ 21% à celui de 2018. «Le passage durable des eaux à 26°C et plus — seuil de mortalité massive des moules — pendant les pics de demande perturbe la chaîne d’approvisionnement», constate John A. Theodorou, professeur associé au département des pêches et de l’aquaculture de l’Université de Patras, en Grèce. «Le changement climatique frappe déjà à la porte des producteurs européens». Dans ce tableau noir, les conchyliculteurs bulgares ont des raisons d’espérer. L'écart de températures «ouvre des débouchés à la moule de la mer Noire, moins exposée aux pressions environnementales», estime M. Theodorou. Quelque 356.500 tonnes de moules ont été récoltées dans l’UE en 2023, pour une valeur d’environ 463 millions d’euros, d’après les données d’EUMOFA. L’Espagne arrivait en tête avec 155.700 tonnes, suivie de l’Italie (57.279) et de la Grèce (18.000). La Bulgarie représentait, elle, près de 1.100 tonnes. Rossen BOSSEV © Agence France-Presse -
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