
La perte de la garantie emprunteur va secouer les banques

L’affaire est presque dans le sac. Les députés ont adopté hier le projet de loi permettant aux emprunteurs de résilier annuellement l’assurance de leur crédit immobilier, à chaque date anniversaire de la souscription du prêt. Cette nouvelle disposition entrera en vigueur à compter du 1er mars 2017 pour les nouveaux contrats et du 1er janvier 2018 pour les anciens contrats. C’est «très rapide», concède Martial Bourquin, sénateur PS du Doubs à l’origine de l’amendement au Code de la consommation.
Les banques détiennent 88% de ce marché juteux où le résultat technique représentait 36,8% du chiffre d’affaires total réalisé en 2015, selon une étude de l’ACPR publiée en septembre. «Les assurances classiques permettent de réaliser des marges de 10% mais [dans le cas de l’assurance emprunteur] les marges grimpent jusqu'à 50% !» s’insurge le sénateur. En 2015, selon la Fédération française de l’assurance (FFA), les cotisations des emprunteurs français ont représenté 8,8 milliards d’euros, en hausse de 3,9% par rapport à 2014.
L’année dernière, les assureurs trépignaient d’impatience pour cette mesure explosive. Elle avait été ajoutée fin septembre au projet de loi Sapin 2 par Pierre-Alain Muet, député PS de la 2e circonscription du Rhône et vice-président de la Commission des Finances, mais avait été censurée début décembre par le Conseil constitutionnel, en tant que cavalier législatif. Martial Bourquin s’est alors emparé du combat, prenant plusieurs précautions pour éviter un second rejet.
La disposition a d’abord été réintroduite le 21 décembre au Sénat, uniquement pour les nouveaux contrats. L’applicabilité au stock d’anciens contrats à partir de 2018 a été votée le 17 janvier par la commission mixte paritaire, à l’unanimité. «Nous avions volontairement séparé les amendements sur les flux et le stock, car en termes constitutionnels la rétroactivité est souvent discutée», explique Martial Bourquin. Le texte devrait être voté par le Sénat le 9 février. «J’ai insisté pour que le texte soit à chaque fois voté à l’unanimité, c’est une sécurité pour éviter les recours», souligne-t-il.
La loi Hamon de 2014 permettait de renégocier son assurance-emprunteur dans les douze mois suivant la souscription, mais pas ensuite. «J’étais rapporteur de la loi Hamon, et donc j’étais de plein droit sur le projet concernant la loi de consommation, j’étais beaucoup plus confortable» que Pierre-Alain Muet, explique le sénateur. Les deux hommes ont discuté au téléphone pour la première fois lorsque le texte a été voté au Sénat.
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