
La fusion Société Générale - Crédit du Nord entre en phase critique

La Société Générale franchit un pas décisif en vue de sa fusion avec le Crédit du Nord. La nouvelle banque de détail du groupe qui naîtra au 1er janvier 2023 de l’union des deux réseaux s’est dotée d’une identité de marque. Baptisée «SG», cette dernière sera incarnée par un logo rouge et noir, les couleurs de la Société Générale. Adieu, donc, l’étoile bleue du Crédit du Nord. Soucieuse de se rapprocher des clients, notamment professionnels, la banque de La Défense adopte, en revanche, un modèle organisationnel régionalisé proche de celui du Crédit du Nord.
Dix marques régionales
SG se déclinera ainsi en dix marques régionales : SG Crédit du Nord, SG Grand Est, SG Laydernier, SG Auvergne-Rhône-Alpes, SG SMC, SG Courtois, SG Sud Ouest, SG Tarneaud, SG Grand-Ouest et SG Société Générale en Ile-de-France et en Corse. Sur les neuf banques régionales du Crédit du Nord, seules disparaissent les banques Kolb (dont le siège est à Nancy) et Nuger (dont le siège est à Clermont-Ferrand). Elles s’effaceront sous l’identité commune SG Grand-Est et SG Auvergne-Rhône-Alpes. Même logique pour le Crédit du Nord Nord-Ouest, qui passera sous la bannière SG Grand-Ouest, et le Crédit du Nord Ile-de-France qui se fondra dans l’ensemble SG Société Générale.
Sébastien Proto, directeur général adjoint du groupe, salue dans un communiqué «une nouvelle stratégie de marque fidèle à l’histoire et aux forces respectives des deux réseaux». Au sein du réseau Crédit du Nord, cette annonce a pourtant eu l’effet d’une douche froide. «On nous avait promis l’avènement d’une nouvelle banque de détail, reposant sur le meilleur des deux mondes. Au final, cela ressemble fort à une absorption du Crédit du Nord», déplore Cédric Perennes, délégué syndical national CFDT. Et de s’inquiéter d’un «risque d’attrition de la clientèle», qui, selon un rapport du cabinet Secafi Alpha mandaté par les organisations syndicales, n’est pas pris en compte par la Société Générale. En outre, cette dernière n’a pas communiqué de plan d’affaires ni d’objectif concernant le développement de son produit net bancaire (PNB).
Une offre alignée sur celle de la Société Générale
A compter du premier janvier 2023, la banque en rouge et noir disposera d’un réseau de distribution unique pour sa banque de détail mais aussi d’une offre unique : celle de la Société Générale. A l’exception des contrats d’assurance vie, les produits Crédit du Nord vont disparaître. Il faudra attendre que la fusion des systèmes d’information soit finalisée pour pouvoir développer une nouvelle offre commune. Le cabinet Secafi pointe ainsi l’absence de vision commerciale et une politique marketing qui reste encore à définir.
Celle-ci sera élaborée par les directions dédiées aux différents marchés – particuliers, professionnels, patrimoine – qui commencent à se mettre en place. «L’annonce de la marque est une première étape qui permet aux équipes d’enclencher les différents chantiers opérationnels», souligne Philippe Fournil, délégué syndical national CGT.
Le premier consiste en un véritable big bangsur le plan des ressources humaines. «J’ai déjà vécu quinze plans sociaux à la Société Générale mais je n’ai jamais vu ça. Cette fois, on touche à tout : le réseau, les outils informatiques, le statut et l’organisation du dialogue social», confie Philippe Fournil. Un premier accord signé avec les instances représentatives du personnel a organisé l’harmonisation des statuts, les salariés du Crédit du Nord étant amenés à adopter des contrats de travail Société Générale.
Premières consultations des salariés
Un deuxième accord signé en février à l’unanimité a, quant à lui, organisé la gestion de l’emploi et l’accompagnement social des salariés. Le groupe prévoit 3.700 suppressions nettes de postes du fait de la fusion. Les salariés concernés, qui seront issus «sans discrimination» des réseaux Crédit du Nord et Société Générale, disposeront de plusieurs options : un départ volontaire pour poursuivre un projet externe – dont les conditions sont encadrées par un accord d’entreprise datant de 2011, un reclassement en interne, une transition d’activité pour les salariés proches de la date de départ à la retraite, ou bien un dispositif de rupture conventionnelle collective avec une indemnité à la clé.
Pour l’heure, salariés et instances représentatives du personnel sont dans le brouillard concernant la répartition géographique et fonctionnelle de ces suppressions de postes. Un processus de consultation des salariés vient de s’ouvrir au niveau local en vue de recueillir leurs souhaits. Cette phase prendra fin en octobre prochain, avec l’envoi des premiers courriers aux salariés concernés dans les sièges régionaux. Dans les agences, en revanche, les suppressions de postes s’effectueront en plusieurs vagues successives à partir de juin 2023, les salariés concernés étant notifiés six mois auparavant. Des inconnues persistent également quant à la fermeture annoncée de 600 agences. «Au-delà des conséquences sur l’emploi et les conditions de travail, nous craignons que cela ne conduise à redimensionner les portefeuilles au détriment des clients», alerte Cédric Pirennes.
Autre volet social majeur, la direction vient d’ouvrir avec les instances représentatives du personnel un nouveau cycle de négociations en vue de calquer l’organisation du dialogue social sur celle du réseau. «Nous allons passer de 90 CSE aujourd’hui à 11 demain. Nous craignons que cela ne se fasse au détriment de l’accompagnement des salariés, qui est crucial dans une telle période», souligne Philippe Fournil.
Enfin, la fusion du réseau du Crédit du Nord avec celui de la Société Générale s’accompagnera d’une migration informatique en deux temps. En février 2023, ce sont les entités Tarneaud, Rhone Alpes, Laydernier et Nuger qui basculeront sur le SI commun, avant le reste des entités Crédit du Nord et des filiales non bancaires en avril 2023.
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Washington - Près de 500 personnes, dont une majorité de Sud-Coréens, ont été arrêtées par la police de l’immigration dans une usine de fabrication de batteries des groupes sud-coréens Hyundai et LG dans l’Etat de Géorgie (sud-est), soupçonnées de travailler illégalement aux Etats-Unis. Le raid, mené jeudi, résulte d’une «enquête pénale liée à des accusations de pratiques d’embauche illégales et à de graves infractions fédérales», a expliqué vendredi Steven Schrank, un agent du service d’enquêtes du ministère américain de l’Intérieur, au cours d’une conférence de presse. Il s’agit de «la plus importante opération des forces de l’ordre sur un même site de toute l’histoire du service des +Homeland Security Investigations+ (+Enquêtes sur la sécurité intérieure+)», a-t-il affirmé, s’exprimant d’Atlanta, dans l’Etat de Géorgie. Les 475 personnes arrêtées dans cette usine, située dans la ville d’Ellabell, se «trouvaient aux Etats-Unis de manière illégale» et «travaillaient illégalement», a affirmé M. Schrank, soulignant que la «majorité» d’entre elles étaient de nationalité sud-coréenne. Sollicité par l’AFP aux Etats-Unis, le constructeur automobile a répondu être «au courant du récent incident» dans cette usine, «surveiller étroitement la situation et s’employer à comprendre les circonstances spécifiques» de cette affaire. «A ce stade, nous comprenons qu’aucune des personnes détenues n'était directement employée par le groupe Hyundai», a-t-il poursuivi, assurant donner «priorité à la sécurité et au bien-être de quiconque travaille sur ce site et au respect de toutes les législations et réglementations». De son côté, LG Energy Solution a affirmé suivre «de près la situation et recueillir toutes les informations pertinentes». «Notre priorité absolue est toujours d’assurer la sécurité et le bien-être de nos employés et de nos partenaires. Nous coopérerons pleinement avec les autorités compétentes», a ajouté cette entreprise. La Corée du Sud, la quatrième économie d’Asie, est un important constructeur automobile et producteur de matériel électronique avec de nombreuses usines aux Etats-Unis. Mission diplomatique Une source proche du dossier avait annoncé quelques heures plus tôt, de Séoul, qu’"environ 300 Sud-Coréens» avaient été arrêtés pendant une opération du Service de l’immigration et des douanes américain (ICE) sur un site commun à Hyundai et LG en Géorgie. De son côté, l’agence de presse sud-coréenne Yonhap avait écrit que l’ICE avait interpellé jusqu'à 450 personnes au total. Le ministère sud-coréen des Affaires étrangères avait également fait d'état d’une descente de police sur le «site d’une usine de batteries d’une entreprise (sud-coréenne) en Géorgie». «Plusieurs ressortissants coréens ont été placés en détention», avait simplement ajouté Lee Jae-woong, le porte-parole du ministère. «Les activités économiques de nos investisseurs et les droits et intérêts légitimes de nos ressortissants ne doivent pas être injustement lésés dans le cadre de l’application de la loi américaine», avait-il poursuivi. Séoul a envoyé du personnel diplomatique sur place, avec notamment pour mission de créer un groupe de travail afin de faire face à la situation. Les autorités sud-coréennes ont également fait part à l’ambassade des Etats-Unis à Séoul «de (leur) inquiétude et de (leurs) regrets» concernant cette affaire. En juillet, la Corée du Sud s'était engagée à investir 350 milliards de dollars sur le territoire américain à la suite des menaces sur les droits de douane de Donald Trump. Celui-ci a été élu pour un second mandat en novembre 2024, en particulier sur la promesse de mettre en oeuvre le plus important programme d’expulsion d’immigrés de l’histoire de son pays. Depuis, son gouvernement cible avec la plus grande fermeté les quelque onze millions de migrants sans papiers présents aux Etats-Unis. Au prix, selon des ONG, des membres de la société civile et jusqu’aux Nations unies, de fréquentes violations des droits humains. D’Atlanta, le Bureau de l’alcool, du tabac, des armes à feu et des explosifs (ATF) a expliqué sur X avoir participé à l’arrestation d’environ 450 «étrangers en situation irrégulière» au cours d’une opération dans une usine de batteries, une coentreprise entre Hyundai et LG. Selon son site internet, Hyundai a investi 20,5 milliards de dollars depuis son entrée sur le marché américain en 1986 et compte y investir 21 milliards supplémentaires entre 2025 et 2028. L’usine d’Ellabell a été officiellement inaugurée en mars, avec l’objectif de produire jusqu'à 500.000 véhicules électriques et hybrides par an des marques Hyundai, Kia et Genesis. Elle devrait employer 8.500 personnes d’ici à 2031. © Agence France-Presse