
En Italie, le projet de loi sur les créances douteuses sème le trouble


Giorgia Meloni poursuit son combat contre la finance. Après l’annonce d’une taxe sur les superprofits des banques en août, le gouvernement italien travaille actuellement sur un projet de loi visant à réformer le marché des créances douteuses.
Portée par le ministre de l’Entreprise et du «Made in Italy», Adolfo Urso, la proposition de loi vise les emprunteurs individuels et les PME dont les dettes ont été transférées à des tiers par le biais de titrisations ou de cessions de prêts avant le 31 décembre 2022. Les emprunteurs dont les dettes ne dépassent pas 25 millions d’euros et qui ont été classées comme douteuses entre 2018 et 2021 auront ainsi la possibilité de racheter leurs prêts.
Le prix de rachat de ces prêts individuels sera fixé en référence au prix de vente global du portefeuille initial auquel le prêt appartient, majoré d’une prime de 20% si aucune procédure de recouvrement n’a été engagée ou de 40% pour les emprunteurs qui ont conclu des accords extrajudiciaires avec les organismes de recouvrement ou qui sont engagés dans des procédures judiciaires. Officiellement, le gouvernement espère soulager foyers et entreprises du fardeau des NPL [créances douteuses et litigieuses, non-performing loans] dans un contexte de hausse des taux d’intérêts en leur permettant de redémarrer du bon pied.
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Les bilans des banques italiennes ont été allégés
«Ce projet de loi a d’ores déjà créé de l’incertitude et de l’inquiétude parmi les acteurs du marché et les investisseurs», rétorque Paula Lichtensztein, analyste au sein de Scope Ratings lors d’un webinaire, «l’appétit pour les transactions de NPL en Italie devrait diminuer en raison de la prise en compte de l’incertitude juridique dans les prix tandis que les prix que les investisseurs sont prêts à offrir vont chuter». Or, depuis 2015, les investisseurs ont massivement racheté des NPL aux banques italiennes, leur permettant d’assainir leur bilan et de booster leurs activités de prêts. Selon une étude signée PWC, les NPL sont passées de 341 milliards en 2015 à 58 milliards fin mars dans les bilans des banques italiennes.
Pour l’heure, l’agence de notation ne s’attend pas à un impact significatif sur la performance des titrisations de NPL en Italie : «seul un faible nombre d’emprunteurs devrait exercer l’option dans la mesure où la mise en œuvre sera compliquée», explique Rossella Ghidoni, analyste chez Scope. Selon le projet de loi, les débiteurs bénéficieront de 30 jours après la notification de l'émetteur pour exercer l’option de rachat et un maximum de 90 jours pour payer, un temps relativement court pour comprendre le jargon juridique et la viabilité économique du rachat, selon l’analyste.
De même, l’impact sur la qualité de crédit des banques ne devrait pas être immédiat : «au-delà de la restructuration réalisée par les banques depuis 2015, la publication des derniers résultats semestriels ne montre aucune pression sur la qualité des actifs, avec des taux de défauts atteignant des records à la baisse», estime Alessandro Boratti, analyste chez Scope Ratings. Des répercussions négatives pourraient néanmoins se matérialiser sur le plus long terme en cas d’adoption de la loi : «la pression va augmenter, contraignant les banques à accéder au marché pour vendre leurs NPL. Or, les établissements de crédit ont besoin d’un marché des NPL qui fonctionne correctement pour y parvenir.»
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