Crypto-actifs, un enjeu réglementaire en pleine émergence

Hannah Rossiter, managing director de Kroll

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Hannah Rossiter, managing director de Kroll Dans son allocution devant le Parlement européen en septembre 2021, Gary Gensler, président de la Securities and Exchange Commission (SEC), a partagé quelques réflexions personnelles sur la croissance des crypto-actifs, en affirmant que « la transformation que nous vivons en ce moment pourrait être tout aussi importante qu’internet dans les années 1990 ». Les chiffres le confirment : en 1996, environ 16 % de la population américaine utilisait internet et nous pouvons observer aujourd’hui un même pourcentage de personnes qui investissent, négocient ou utilisent des crypto-actifs.

Lors de cette même allocution, Gary Gensler a ajouté que les innovations financières à travers l’histoire ne prospèrent pas longtemps en dehors des cadres de politiques publiques. En effet, ont récemment fait surface des facteurs de vigilance en lien avec la hausse de l’inflation qui pourraient inciter les investisseurs à rechercher des rendements plus élevés et, par conséquent, augmenter leur appétence pour le risque. L’achat de crypto-actifs commence généralement via une plateforme d’échange en ligne, à la suite de quoi les actifs peuvent être conservés, échangés contre un autre actif ou transférés en dehors du système d’échange. Si l’absence initiale de réglementation a facilité une croissance et une innovation rapides, des incidents tels que l’effondrement de 40 milliards de dollars de la cryptomonnaie Luna rappellent le niveau de volatilité élevé de ce type d’investissement, de même que le rôle que les plateformes d’échange doivent jouer dans la protection des consommateurs.

Binance, la plus grande de ces plateformes d’échange de crypto-actifs au monde, s’est révélée être un défi pour les régulateurs, l’absence d’un siège fixe signifiant qu’il n’était pas clairement établi au départ qui serait responsable de sa supervision. L’an dernier, la Financial Conduct Authority (FCA) du Royaume-Uni a ainsi rejeté la demande d’agrément de Binance en tant que « société de crypto-actifs », déclarant que, selon elle, elle n’était « pas capable d’être supervisée efficacement ». La démarche de Binance auprès de l’Autorité des marchés financiers (AMF) en France s’est toutefois avérée plus fructueuse, puisque cette dernière a récemment approuvé son agrément pour fournir des services liés aux crypto-actifs. La décision de la France, première grande nation européenne à approuver Binance, pourrait bien être mutuellement bénéfique. Changpeng Zhao, président-directeur général et fondateur de la société, a en effet indiqué qu’il prévoyait d’établir son siège européen à Paris et de lancer une initiative de 115 millions de dollars pour développer l’écosystème des blockchains et des crypto-actifs en France et en Europe.

Malgré cette aubaine, Binance, ainsi que d’autres plateformes d’échange de crypto-actifs cherchant à opérer dans l’Union européenne, auront de nombreux défis réglementaires à relever avec la récente proposition de directive de la Commission européenne sur les marchés des crypto-actifs (MiCA), destinée à soutenir « l’innovation et la concurrence tout en atténuant les risques ». Il s’agit d’une évolution significative dans le paysage réglementaire des crypto-actifs. Tout en offrant les avantages d’une législation européenne harmonisée et de la clarté réglementaire, son champ d’application dépasse de loin le cadre actuel, et même ceux qui fournissent des conseils sur les crypto-actifs sont concernés. A ce titre, sa complexité et son impact doivent faire l’objet d’une attention soutenue de la part des acteurs, dont l’environnement est susceptible de sensiblement évoluer dans les prochains mois.

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