
CFA d’entreprise, un lent apprentissage

Saint-Gobain, Schneider, L’Oréal… A ce jour, une cinquantaine de centres de formation d’apprentis (CFA) d’entreprise ont été créés. Des créations permises par la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel du 5 septembre 2018. Ces CFA internes restent encore rares dans le secteur de la banque et de l’assurance.
Le Crédit Mutuel Alliance Fédérale a ouvert le bal et s’est appuyé sur Cap Compétences, l’organisme de formation du groupe depuis 1997, pour créer en 2019 son CFA d’entreprise. « Nous y avons tout de suite vu une nouvelle opportunité. Grâce à notre organisme de formation, nous avions déjà l’infrastructure, les compétences, les équipes qui nous permettaient de créer un CFA d’entreprise », pointe Antoine Valverde, directeur de Cap Compétences. Le CFA interne forme 150 à 200 apprentis, sur les 1.400 que recrutent les caisses du Crédit Mutuel Alliance Fédérale chaque année. Quatre diplômes sont proposés, la licence professionnelle assurance banque finance, le master banque finance, la licence professionnelle gestionnaire d’assurance et le bachelor chargé de clientèle particulier, à Lyon, Strasbourg, Nantes et Paris. Avec un avantage pour le groupe, la personnalisation des parcours. « Dans nos caisses et agences, les commerciaux sont très autonomes et lorsque nous recrutons un profil formé par un CFA externe, il faut repasser par un temps de formation assez long pour qu’il s’approprie nos outils, nos offres, ou notre démarche commerciale. Le CFA d’entreprise nous permet donc de gagner du temps, souligne aussi Antoine Valverde. Autre atout, nous pouvons intégrer dans le parcours de formation toutes les certifications nécessaires à nos métiers. »
Créer des parcours sur mesure, c’est aussi l’ambition de la Caisse d’Epargne Normandie qui a annoncé l’ouverture de son CFA d’entreprise en avril dernier, en partenariat avec l’école supérieure de la banque. Il s’appuie sur le CFA qu’a monté le groupe BPCE en 2020 pour le mettre au service de ses deux réseaux (Caisse d’Epargne et Banque Populaire). « Notre objectif est de recruter les 31 apprentis qui ont fait leur rentrée cette année. Le CFA d’entreprise nous permet d’avoir un contenu de formation adapté aux besoins de nos agences régionales et de répondre à la tension locale sur le recrutement de jeunes diplômés », détaille Maryse Vépierre, membre du directoire en charge du pôle ressources. Le CFA fait aussi partie du « plan jeunes » mis en place par la banque pour faciliter leur retour sur le marché de l’emploi dans le contexte de crise sanitaire.
Des structures hybrides
Certains établissements déjà bien établis dans le paysage de la formation ont fait évoluer leur fonctionnement suite à la loi de 2018, sans toutefois créer une nouvelle structure. « Nous sommes aujourd’hui un CFA hybride, un CFA d’entreprise qui a gardé ses spécificités de CFA historique », explique Christian Carata, directeur de l’alternance et de l’offre diplômante de l’Ifcam, l’université d’entreprise du Crédit Agricole créée en 1976. Le CFA, Difcam, est né en 1983. Il forme 2.200 apprentis par an, dont la moitié réalise son alternance dans une entité du groupe. « Le CFA d’entreprise est un outil au service du recrutement, très intéressant pour être au plus proche des besoins métiers et de leur évolution. C’est aussi un levier intéressant pour intégrer les apprentis dans l’entreprise », analyse Christian Carata. Le CFA de La Poste, Formaposte, créé en 1996, forme environ un quart des alternants à la finance. « Le modèle permet d’imprégner les alternants de la culture d’entreprise, de leur transmettre les valeurs, les outils », souligne Jean-Michel Roesch, président de Formaposte Sud Est. « Le CFA associe l’entreprise à toutes les étapes : le recrutement des alternants, leur suivi, le lien est aisé entre tous les intervenants. Le CFA peut aussi relayer la stratégie de recrutement portée par l’entreprise », reprend Jean-Michel Roesch.
Les sociétés d’assurance, très investies dans les questions d’alternance, comptent encore peu de CFA d’entreprise. Interrogés, Groupama, CNP Assurances, la Maif ou Axa confirment ne pas en avoir créé pour le moment. « Le volume conséquent de recrutements en alternance, plus de mille personnes en 2021 chez Axa en France, ne se concentre pas suffisamment sur des métiers spécifiques pour créer un CFA d’entreprise qui soit vraiment compétitif », précise l’assureur à L’Agefi. Le groupe Adenes, 2.000 personnes, spécialiste de l’expertise après-sinistre, a, lui, sauté sur l’occasion et ouvert son propre CFA, Adenes Academy, qui a fait sa rentrée avec 23 alternants en septembre. « Nous ne partions pas de rien, nous avions déjà créé notre organisme de formation en 2017, qui a formé 527 personnes en 2020 et par lequel passent tous les nouveaux entrants », précise Bastien Subra-Magliola, directeur adjoint du CFA. Ce dernier propose le BTS négociation et digitalisation de la relation client et le BTS assurance. « Il y a de nombreux avantages au CFA interne : nous connaissons les maîtres d’apprentissage, nous pouvons former les étudiants à nos techniques, car certains formateurs interviennent aussi dans notre organisme de formation, ajoute Bastien Subra-Magliola. Cela nous permet de montrer notre métier, qui est très peu connu en France. » Un moyen de développer la marque employeur de l’entreprise.
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"Soit il y a rupture, soit il y aura censure" annonce Jordan Bardella, après l'élection de Sébastien Lecornu
Strasbourg - Le Rassemblement national ne veut pas censurer immédiatement le nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu, mais attend une «rupture» avec la politique menée jusqu’ici, a expliqué son président Jordan Bardella mercredi à Strasbourg. Le parti d’extrême droite ne compte pas censurer «a priori» mais d’abord «écouter le discours de politique générale» de M. Lecornu, a déclaré M. Bardella lors d’un point presse en marge d’une session plénière du Parlement européen. «Soit il y a rupture, soit il y aura censure», a-t-il résumé. Le Rassemblement national réclame notamment un durcissement de la politique migratoire et s’oppose à toute hausse de la fiscalité pour la «France qui travaille», a-t-il souligné. Jordan Bardella a aussi réclamé que parmi les premières mesures de Sébastien Lecornu soit actée l’opposition de la France au traité de libre-échange avec les pays latino-américains du Mercosur. Après la chute de François Bayrou lundi lors d’un vote de confiance des députés, puis son remplacement à Matignon au bout de 24 heures par M. Lecornu, le chef du RN n’a toutefois «aucune illusion» et juge le bail du nouveau chef du gouvernement «très précaire». © Agence France-Presse -
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