
Régis Gaisnon, profil de grimpeur

Dans la vie, Régis Gaisnon joue volontiers le jeu. A tous les niveaux. On lui fait part de notre demande de portrait, il dit oui. Lorsque nous nous parlons via Teams à une poignée d’heures de son départ en vacances d’été, le gestionnaire senior d’investissement chez Groupama va droit au but. A peine le temps de reprendre son souffle. On apprend ainsi qu’il est né à la campagne en Mayenne, a grandi dans une jolie station thermale de Normandie à Bagnoles de l’Orne, a fait des études de finance à l’université de Caen, commence une première partie de carrière comme banquier chez Dexia Crédit Local à Paris, part deux ans à New York en expatriation, revient à Paris et rentre un peu plus tard chez Groupama cette fois comme investisseur. Et on comprend assez vite que cette aptitude à synthétiser sans oublier l’essentiel fait de Régis Gaisnon un homme qui sait ce qu’il veut.
De cette synthèse, on en déduira que son passage aux Etats-Unis a sonné comme une transition très importante dans sa vie. Arrivé à 30 ans un dimanche soir de 2010 à Manhattan, célibataire, avec deux valises comme il nous le raconte, il en repart deux ans plus tard pour revenir dans son pays d’origine, y fonder ensuite sa famille – il est aujourd’hui père de deux enfants – et assouvir une nouvelle passion, celle du sport de haut niveau. « Cette expatriation, c’était finalement une parenthèse originale et assez exotique de la forêt normande à Big Apple », sourit-il.
Deux années passionnantes, qui lui donnent l’occasion de participer au triathlon de New York… un peu par hasard. « Le triathlon de New York est presque aussi célèbre que son marathon. Et comme pour le marathon, pour pouvoir participer, il faut d’abord être tiré au sort à une loterie », explique-t-il. Lorsqu’il arrive dans la succursale de Dexia, tout le monde sur son desk s’est déjà inscrit. « Je l’ai fait aussi du coup et j’ai été le seul à être tiré au sort ! se souvient-t-il. Je ne me suis pas dégonflé mais je dois avouer que j’étais plutôt un coureur à la base. Je n’avais même pas de vélo et c’est à peine si je savais nager ! Enfin… nager dans l’Hudson River, ce n’est pas la même chose que nager dans une piscine municipale de Paris ! », s’amuse-t-il. Pour ce fin gabarit– 1m75 et 60 kilos, un profil de grimpeur selon lui –, c’est le déclic. Le sport de haut niveau ne le quittera plus. Après avoir enchaîné les marathons – une dizaine en France et à l’étranger –, les triathlons de plus en plus grands et fait l’ultra-trail du Mont-Blanc, il ira jusqu'à l’Iron Man de Nice… 3,8 km dans la mer, 180 km de vélo et 42,2 km de course à pied (pour les néophytes, c’est la distance du marathon).
Expatriation
L’expérience de New York, c’est aussi celle d’un tournant au niveau professionnel. Dexia est au bord du gouffre depuis la chute de Lehman Brothers en 2008. Après un premier sauvetage par les pouvoirs publics, un plan de restructuration est mis en place. Les salariés sont invités à choisir entre rester et partir. Régis Gaisnon choisira de rester et pousse pour l’occasion à une mobilité vers New York qui sera acceptée. Mais loin de s’arranger, les choses empirent pour Dexia. La crise de la dette de 2011 aboutira à un autre plan de restructuration. La banque est coupée en deux : une partie est vouée à l’extinction et une autre transférée à La Banque Postale pour continuer à financer les collectivités locales. Il choisira le deuxième plan de départs proposé aux salariés pour plier bagage et rentrer en France.
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Après quelque temps de réflexion et un passage éclair chez Axa, il choisira Groupama en 2016. « Je me disais que la matière financière c’était vraiment ma passion mais cela n’avait pas de sens pour moi d’aller faire la même chose chez un concurrent, relate-t-il. Je me posais la question soit de partir de nouveau en expatriation, soit de faire des activités différentes. L’assurance me paraissait une bonne manière de faire différemment les choses, avec une vraie stratégie de long terme. » Le départ d’un allocataire d’actifs dans le groupe lui offre cette opportunité de se lancer dans la partie taux des investissements. « Groupama était intéressé par mon profil de banquier et moi par l’image de super employeur », explique-t-il. Cette image, c’est celle d’une entreprise aux fondements mutualistes et qui offre des conditions de travail confortables et bienveillantes à ses salariés. Après l’aventure de feu-Dexia, on peut le comprendre…
Bienveillance
Groupama, qui se remet alors lui aussi de problèmes de solvabilité issus de la crise de 2011, lui propose en 2018 de participer à la relance d’une activité qu’il avait dû vendre sous la contrainte en 2012 : celle de private equity. En tant qu’allocataire d’actifs, plus spécialisé dans le capital-investissement, Régis Gaisnon sélectionne des fonds et des gérants et réalise parfois quelques co-investissements en direct à côté des sociétés de gestion. Une fonction qu’il adore car elle l’amène à rencontrer régulièrement des dirigeants d’entreprise. Est-ce pour cela qu’il a suivi cette année pendant neuf mois l’executive program de Groupama, qui vise à former les managers de demain ? A 42 ans, Régis Gaisnon se verrait bien donner un nouvel élan à sa carrière. Participer à la stratégie de l’entreprise et encadrer des salariés l’attirent clairement.
En attendant, il compte bien préparer un autre défi sportif. Celui de parcourir à vélo une étape du Tour de France réservée aux amateurs l’été prochain. Il faut dire que Groupama sponsorise une équipe de la Grande Boucle – 5e à l’arrivée cette année, avec le cycliste Thibaut Pinot en tête d’affiche. Le mutualiste soutient chaque année une dizaine de salariés dans le cadre de ce défi sportif. Sans compter ses actions en région en faveur du cyclisme amateur. De sacrés bons points à son compteur… d’employeur. ■
SON PROFIL...
Né en 1980 en Mayenne, Régis Gaisnon a débuté chez Dexia Crédit Local en 2003 en financement d’infrastructures, pour le compte notamment des collectivités publiques. Après une expérience de deux ans à New York, il rentre en France et rejoint peu de temps après Groupama, d’abord en charge des investissements en produits de taux, puis des actifs alternatifs et plus particulièrement du private equity.
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