
Clubhouse, le nouveau réseau social, 100 % vocal

C’est un club virtuel d’un nouveau genre, auquel on accède par une application mobile, exclusivement sur invitation, et sur iPhone, faute de version Android pour l’instant. Une manière de cultiver un entre-soi assumé. Clubhouse, c’est le dernier réseau social à la mode. Pas de texte, de photos ou de vidéos, ici tout repose sur l’audio, des échanges vocaux en direct.
A l’origine, une simple application vocale, lancée en Californie en mars 2020 par Paul Davison et Rohan Seth, deux trentenaires déjà serial entrepreneurs. Le premier a notamment créé l’application sociale Highlight, qui mettait en relation les utilisateurs ayant les mêmes centres d’intérêt. Clubhouse, encore en version beta (version test) a déjà généré près de 10 millions de téléchargements dans le monde. Les investisseurs adorent : deux mois après son lancement, le fonds de capital-risque Andreessen Horowitz y investissait 12 millions de dollars (10,1 millions d’euros), puis 100 millions en décembre, pour atteindre une valorisation estimée à un milliard de dollars.
En France, certes, à peine 140.000 personnes auraient téléchargé l’application, selon le relevé d’App Annie du 26 mars. Mais l’effet de mode est là. D’autant que Clubhouse a été lancée au meilleur moment, alors que la pandémie mettait des millions de salariés en confinement et en télétravail forcé, un peu partout dans le monde. Ce service arrivait à point nommé pour recréer du lien social – virtuel certes – et de la proximité. Et seulement par la voix, à l’heure où « les télétravailleurs commencent à être saturés d’écrans, entre réunions virtuelles sur Zoom et webinars », souligne Sébastien Couasnon, journaliste en nouvelles technologies, qui y est « accro » depuis fin janvier.
Une fois inscrit, on peut rejoindre des rooms (salles de discussions virtuelles) où sont débattus, à des heures précises, des sujets prédéfinis. Des gens qui ne se connaissent souvent pas y « tiennent salon », ayant des conversations posées autant qu’éphémères. Le ton y est courtois, le tutoiement de rigueur. Mais le caractère démocratique y est relatif : les « modérateurs » donneront la parole en priorité aux utilisateurs ayant le plus de followers.
Les sujets les plus répandus ? Sans surprise, ceux liés à la tech, aux start-up et au bitcoin, dans cet espace numérique où, pour l’instant, les férus de technologies et avant-gardistes (early adopters) figurent parmi les premiers inscrits.
Clubhouse, par sa simplicité d’usage, est aussi un formidable outil pour faire de la veille. Le marketing numérique, les levées de fonds, la gestion d’une start-up, les cryptomonnaies figurent déjà parmi les sujets les plus traités. A condition, comme sur Twitter et les autres réseaux sociaux, de suivre les bonnes personnes, de choisir les bons centres d’intérêt et bons mots-clés. Indispensable pour que les rooms sur les sujets qui intéressent l’auditeur s’affichent. « C’est un très bon outil pour ceux qui travaillent dans la finance ou pour les entrepreneurs : il y a de plus en plus de sessions de pitchs d’entreprises, avec des avocats d’affaires, des investisseurs ou des spécialistes des fusions-acquisitions », souligne Sébastien Couasnon.
On pourra parfois y échanger en direct avec des dirigeants de premier plan. Dans l’Hexagone, Xavier Niel a déjà participé à une room sur les cryptomonnaies. L’entrepreneur Marc Simoncini y donnait récemment ses astuces, tout comme le patron France de la fintech N26.
Clubhouse est aussi un outil de « réseautage ». On peut lire les profils de chaque personne et les suivre, comme sur tout réseau social. Seule limite, pour l’instant, il n’y a pas de possibilités de feedback, de likes ou de contacter quelqu’un par messagerie privée.
Lancer son événement virtuel
Surtout, avec Clubhouse, chacun peut lancer facilement son événement virtuel, sans les difficultés techniques liées au lancement d’un podcast ou d’un webinar. Une room peut être ouverte en format public, « social » (avec les seules personnes que l’on suit), ou fermé, où l’on choisit les participants. « Chacun peut y lancer sa ‘room’ : cela permet de partager son expertise avec une audience. Plusieurs formats de conférences sont possibles : type ‘masterclass’, ’keynote’, interview, ou table ronde avec plusieurs intervenants », souligne Emmanuel Vivier, cofondateur du Hub Institute, qui conseille les entreprises sur leur stratégie digitale. Dans ces usages qui émergent, des habitués essaient de créer des rendez-vous. Autre possibilité : organiser une « troisième mi-temps » pour une entreprise après une conférence ou un webinar, pour prolonger le débat de manière plus informelle.
Ce qui est essentiel ? Bien préparer sa room, comme une conférence physique : « Il faut bien structurer le débat en amont, bien choisir les modérateurs et les ‘speakers’. Les meilleures sessions sont celles qui traitent de sujets spécifiques, avec des intervenants ou invités qui ont une expertise ou posent les bonnes questions », estime Eric Leibovici, associé au fonds du capital-risque Daphni. « Comme dans les salons littéraires du XVIIIe siècle, il peut être intéressant d’avoir un mix d’experts, entrepreneurs, artistes, intellectuels… dans ses invités », suggère Emmanuel Vivier.
Les concepteurs de Clubhouse l’ont bien compris. Alors que l’appli, gratuite pour l’instant, n’a pas encore de modèle payant, des services supplémentaires pour y organiser des événements corporate sont déjà à l’étude. Par exemple, des salons à accès payant ou sponsorisés par des marques. Déjà la start-up Clubmarket développe des places de marché sponsorisées. « Un analyste pourrait partager son point de vue régulièrement, à horaires fixes, pourquoi pas dans une ‘room’ privée et payante », imagine Emmanuel Vivier.
Le jeune réseau social n’échappe cependant pas aux reproches sur sa gestion des données. Premier hic : l’application repose sur Agora, une solution de gestion de l’audio en direct basée à Shanghai. Agora se défend toutefois de livrer des données à Pékin. Autre problème, Clubhouse ne respecte pas le règlement européen de protection des données personnelles (RGPD), au point de faire réagir la Cnil française. Une pratique est particulièrement critiquée : l’application aspire les carnets d’adresses des utilisateurs à son lancment.
Mais la plus grande menace pour Clubhouse est celle à laquelle sont confrontés tous les réseaux sociaux innovants : la concurrence des Big Tech. Twitter a commencé à déployer ses propres salons audio, baptisés Spaces. Facebook planche sur une idée similaire, tout comme Slack, Spotify et LinkedIn.
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Donald Trump espère bien statuer avec Xi Jinping sur le sort de TikTok vendredi
Washington - Donald Trump, qui a récemment accusé Xi Jinping de «conspirer» contre les Etats-Unis, espère finaliser le sort de TikTok et faire avancer les négociations commerciales pendant un entretien vendredi avec son homologue chinois. «Je parle au président Xi vendredi, à propos de TikTok et aussi du commerce. Et nous sommes très proches d’accords sur tout ça. Et ma relation avec la Chine est très bonne», a dit le président américain jeudi dans une interview avec la chaîne Fox News. Il s’agit du second entretien téléphonique entre les deux hommes depuis l’investiture de Donald Trump le 20 janvier, et du troisième depuis le début de l’année, en comptant un appel en date du 17 janvier. Lors de leur conversation du 5 juin, le président américain avait dit avoir été invité en Chine par son homologue, et avait annoncé avoir convié le président chinois à venir aux Etats-Unis. Ces projets ne se sont pas concrétisés, mais plusieurs analystes s’attendent à ce que Xi Jinping réitère son invitation à Donald Trump, notoirement très sensible aux honneurs diplomatiques. «Plus malin» «Chacun des deux dirigeants cherchera à montrer qu’il a été plus malin que l’autre» dans les négociations commerciales, prédit Ali Wyne, analyste spécialisé dans les relations sino-américaines du centre de réflexions International Crisis Group, dans une note. Le sort aux Etats-Unis de la populaire plate-forme de vidéos TikTok, propriété du chinois Bytedance, sera peut-être «finalisé» lors de l'échange vendredi, a aussi déclaré Donald Trump pendant une conférence de presse avec le Premier ministre britannique, Keir Starmer. Le président américain avait déjà annoncé mardi, sans beaucoup de précisions, qu’un accord avait été trouvé avec Pékin pour la reprise des activités américaines de TikTok par des investisseurs américains. Le Wall Street Journal a évoqué un consortium comprenant le géant technologique Oracle et les fonds d’investissement californiens Silver Lake et Andreessen Horowitz. En attendant, Donald Trump a une nouvelle fois repoussé l’entrée en vigueur de l’interdiction de la plateforme aux Etats-Unis, prévue initialement en janvier par une loi du Congrès. «Conspirer» Cette interdiction, au nom de la sécurité nationale, avait été décidée pendant le mandat de son prédécesseur démocrate Joe Biden. Donald Trump estime que TikTok l’a aidé à doper sa popularité auprès des jeunes Américains pendant la dernière campagne présidentielle. Cet appel arrive au moment où Pékin et Washington tentent de trouver un accord sur les droits de douanes. Il suit aussi de peu une démonstration de force diplomatique de Xi Jinping, qui a organisé début septembre en Chine un grand sommet avec, entre autres, les dirigeants russe et indien. Piqué au vif par la complicité affichée par le président chinois et Vladimir Poutine ainsi que par le dirigeant nord-coréen, Kim Jong Un, pendant un grand défilé militaire à Pékin, Donald Trump avait alors accusé Xi Jinping de «conspirer» contre les Etats-Unis avec ses invités. Droits de douane Le président américain a aussi appelé à plusieurs reprises les pays européens à sanctionner la Chine pour ses achats de pétrole russe. «S’ils faisaient cela je pense que la guerre (en Ukraine) s’arrêterait peut-être», a-t-il déclaré jeudi sur Fox News. Donald Trump a imposé des droits de douane punitifs à l’Inde à cause de ses achats d’or noir auprès de Moscou, mais n’a pas pris la même mesure contre la Chine. Les tensions commerciales entre Pékin et Washington ont connu des hauts et des bas en 2025. Au cours de l’année, les tarifs douaniers entre les États-Unis et la Chine ont atteint des niveaux trois fois supérieurs à la normale des deux côtés, perturbant les chaînes d’approvisionnement. Depuis, Washington et Pékin ont conclu un accord visant à désamorcer les tensions, abaissant temporairement les droits de douane à 30% pour les produits chinois importés aux Etats-Unis et à 10% pour les biens américains importés en Chine. Cette trêve commerciale doit durer jusqu’au 10 novembre. Aurélia END © Agence France-Presse -
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