
Cédric Pironneau : «Les assureurs doivent prendre le temps de l’explication»

Cédric Pironneau et Jérémy Sebag, les deux fondateurs de SPVie Assurances, co-signent Idées reçues sur l’assurance aux éditions Le Cavalier Bleu. «L’assurance, on n’y comprend rien et c’est voulu !», «les assureurs sont riches et pingres» ou «les assurances santé en France coûtent cher et remboursent mal», tant d’idées reçues que les deux dirigeants du quatrième courtier grossiste en assurance en France abordent dans un livre à la portée de tous. Cédric Pironneau revient sur l’évolution de la vision du secteur de l’assurance avec L’Agefi.
L’Agefi : En quoi le secteur de l’assurance est-il «responsable en grande partie des idées reçues que l’on a sur l’assurance» ?
Cédric Pironneau : Cet état de fait est certainement dû à un jargonnage : nous aimons manier pleins de concepts qui sont, objectivement, indigestes. Nous n’avons pas aidé à la vulgarisation du secteur, ce que ce livre essaie, au contraire, de faire. Dans ce sens, les assurtechs ont fait beaucoup de bien en rendant compréhensibles des choses compliquées. Il ne faut toutefois pas essayer d’être simpliste. Le monde des risques est un monde compliqué, mais il peut être rendu intelligible.
Le regard porté sur l’assurance a-t-il changé avec la pandémie ?
Il y a eu beaucoup d’innovations et de nouveaux entrants. Il a quand même pris un sacré coup de jeune. On s’est focalisé sur les problèmes avec les restaurateurs et les assureurs ne se sont pas assez bien expliqués. Les assureurs doivent prendre ce temps de l’explication. Sur le 100% santé par exemple, c’est 2,5 milliards d’euros de dépenses couvertes en plus par les assureurs. Cette prise en charge dégrade les comptes et augmente mécaniquement les cotisations.
Comme vous l’indiquez dans le livre, beaucoup pensent que l’assurance ne couvre pas les nouveaux besoins d’aujourd’hui. Comment expliquez-vous cela ?
Nous avons toujours l’exemple d’un proche ou d’une connaissance qui n’a pas été bien couvert. Il faut plutôt regarder du côté de la distinction à faire entre le fait d’être bien couvert et la perception d’être bien couvert. Par exemple, à la suite des incendies qui ont ravagé la France cet été, on s’est rendu compte que des forêts ou des bâtiments n’étaient pas bien assurés. Mais est-ce pour autant l’assureur le premier responsable de cela ? Je n’en suis pas sûr. Quand on a des inondations en France, le système des catastrophes naturelles, garantie par l’État, se met en place, alors qu’aux Etats-Unis ce système n’existe pas. Les gens ne s’assurent pas là-bas car ce n’est pas obligatoire, les montants des primes sont prohibitifs mais aussi en raison d’une culture différente du risque.
Les Français sont-ils plus averses au risque ?
En France, il y a une culture de l’État-Providence. Les Français considèrent, in fine, que l’État est là. Durant la pandémie, nous avons fait partie des pays où les pouvoirs publics ont distribué le plus d’aides. Il y a une notion culturelle qui ne veut cependant pas dire qu’on ne veut pas prendre de risque. On ne conçoit juste pas d’être démuni et dans une approche individuelle.
Comment convaincre les assurés que «l’assureur est riche par définition et obligation» ?
Il ne faut pas être simpliste. La réalité est que les assureurs doivent avoir des fonds importants pour faire face aux risques. Les régulateurs les y obligent à travers les fameux ratios de solvabilité. Ceci est même une bonne chose : il faut de l’argent pour assurer en cas de catastrophe naturelle par exemple, c’est la définition même de l’assurance.
«On arrive souvent dans l’assurance par hasard, mais on reste pour une bonne raison ». C’est un retour d’expérience ?
C’est un constat : la vie a souvent conduit les gens qui travaillent dans l’assurance sans des études ou un parcours précis. Il y a une telle richesse de sujets, de métiers, que c’est un secteur où l’on peut se reconstruire tous les jours. Dans 10 ans, le marché de l’assurance cyber sera supérieur à celui de l’assurance dommages aux biens, cela donne aussi la dimension des changements dans le secteur.
Plus d'articles du même thème
-
Thélem arbitre ses actifs en profondeur
L’assureur, positionné majoritairement sur le marché du dommage, a entrepris de diminuer le risque de son portefeuille d’un milliard d’euros. -
CCR profite des premiers effets de la hausse de la surprime Cat Nat
Entré en vigueur au 1er janvier 2025, le relèvement de la surprime Cat Nat a eu un effet bénéfique sur les résultats semestriels de la Caisse centrale de réassurance. Une amorce de rééquilibrage attendue, lequel méritera d'être pérennisé par la suite. -
Le ciel s'assombrit pour le marché de la réassurance
Haut lieu de négociation des traités de réassurance pour l’année à venir, les Rendez-Vous de Septembre de Monaco se tiennent à partir de dimanche dans un contexte plus tendu et concurrentiel pour les réassureurs, marquant la fin d’un cycle doré. Les agences de notation ont déjà revu les perspectives du secteur à la baisse.
ETF à la Une

BNP Paribas AM se dote d’une gamme complète d’ETF actifs
- A la Société Générale, les syndicats sont prêts à durcir le ton sur le télétravail
- Boeing essaie de contourner la grève en cours dans ses activités de défense
- Revolut s’offre les services de l’ancien patron de la Société Générale
- Mistral AI serait valorisé 12 milliards d’euros par une nouvelle levée de fonds
- Les dettes bancaires subordonnées commencent à rendre certains investisseurs nerveux
Contenu de nos partenaires
-
Immigration: les entrées irrégulières et les demandes d'asile baissent, et pourtant la pression reste très forte pour serrer la vis
Bruxelles - Moins d’entrées irrégulières, moins de demandes d’asile... Et pourtant, l’Europe subit toujours une pression très forte pour durcir sa politique migratoire, une dynamique qui se reflète dans les propositions en débat parmi les Vingt-Sept. Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Au cours de la première moitié de l’année, le nombre d’entrées irrégulières sur le territoire européen a chuté de 20% selon l’agence européenne de frontières Frontex. Elles ont dégringolé sur la route des Balkans et se concentrent désormais en Méditerranée. Les demandes d’asiles enregistrées dans les pays de l’Union européenne et ses voisins ont elles aussi reculé de 23% par rapport à la même période l’an dernier, selon des données publiées lundi. Face à la poussée de la droite et de l’extrême droite, l’Europe a pourtant rarement été sous une telle pression pour serrer la vis sur l’immigration. «Il y a au niveau politique ce sentiment qu’il faut répondre aux attentes des citoyens», note Camille Le Coz, directrice du centre de réflexion Migration Policy Institute Europe, évoquant la «montée de partis anti-migrants» partout sur le continent. Pour ces groupes politiques, la baisse du nombre d’arrivées est loin d'être suffisante. «Cela ne peut pas être le seul critère à prendre en compte», souligne, dans un entretien à l’AFP, l’eurodéputé du Rassemblement national et ancien patron de Frontex Fabrice Leggeri, plaidant pour qu’elle se conjugue avec une hausse significative des renvois. Moins de 20% des décisions d’expulsion de migrants sont actuellement suivies d’effets au sein de l’UE, une statistique régulièrement brandie par les partisans d’une ligne migratoire plus ferme. «Alléger la pression» Pressée à agir sur cette question, tout particulièrement par l’Allemagne, l’Autriche et les pays scandinaves, la Commission avance à marche forcée. Quelques mois seulement après l’adoption d’une loi titanesque sur la migration, qui doit entrer en vigueur en 2026, l’exécutif européen a mis trois propositions supplémentaires sur la table. Elles permettront «d’alléger la pression sur nos systèmes d’asile», a assuré lundi le commissaire chargé des questions migratoires, Magnus Brunner. Si elles venaient à être adoptées, les nouvelles propositions de la Commission permettraient aux Etats membres: - D’ouvrir des centres en dehors des frontières de l’UE pour y envoyer les migrants dont la demande d’asile aurait été rejetée, les fameux «hubs de retours». - De sanctionner plus durement les migrants qui refusent de quitter le territoire européen, via notamment des périodes de détention plus longues. - De renvoyer des migrants vers des pays dont ils ne sont pas originaires mais que l’Europe considère comme «sûrs». «Popcorn» Autant de mesures qualifiées de «cruelles» par la gauche et les associations de protection de migrants. Mais sur lesquelles les groupes de droite au Parlement et les Etats membres veulent avancer vite. Sous l’impulsion du Danemark, qui assure la présidence tournante de l’Union européenne, les Vingt-Sept ont déjà entamé l’examen de plusieurs de ces mesures, ont affirmé plusieurs sources à l’AFP. Ils espèrent adopter une position commune d’ici la fin de l’année, malgré des réticences exprimées notamment par l’Espagne, l’Irlande et le Portugal sur les questions de respect des droits humains. L’objectif est d’entamer des négociations en début d’année prochaine avec le Parlement, théâtre de tractations très difficiles, notamment sur la question des «hubs de retour», selon plusieurs eurodéputés qui y prennent part. Des discussions extrêmement périlleuses sont par ailleurs en cours entre les Etats membres et la Commission sur une nouvelle répartition des demandeurs d’asile sur le continent. L’idée est d’identifier quels sont les pays de l’UE les plus confrontés à une «pression migratoire». Et de déterminer, sur cette base, combien de migrants les autres Etats membres sont prêts à «relocaliser» sur leur sol, ou quelle aide financière ils sont prêts à leur verser. L’exécutif européen doit présenter sa copie aux Vingt-Sept le 15 octobre. «Préparez le popcorn», glisse un fonctionnaire européen, prédisant des négociations extrêmement «sensibles». Camille CAMDESSUS © Agence France-Presse -
Hausse record du niveau de formation dans l'OCDE, mais des inégalités et un déficit de compétences persistent
Paris - Le niveau de formation a fortement augmenté dans l’OCDE depuis le début des années 2000 avec un taux sans précédent de jeunes diplômés de l’enseignement supérieur, indique le rapport annuel «Regards sur l’Education» publié mardi. «48% des jeunes adultes des pays» membres sont désormais diplômés de l’enseignement supérieur «contre 27% en 2000", souligne ce rapport de l’Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE), qui rassemble les pays les plus industrialisés. L’Irlande et la Norvège affichent notamment des «progrès remarquables» avec une hausse de diplômés du supérieur d’environ 6 points de pourcentage entre 2005 et 2024, suivies par la Colombie, le Costa Rica, l’Espagne, la Grèce, l’Italie, le Mexique, le Portugal et la Turquie, a noté Mathias Cormann, le secrétaire général de l’OCDE, lors d’une présentation du rapport. L’OCDE souligne cependant que nombre d'étudiants ne finissent pas leurs études, en particulier les hommes, en raison d’une inadéquation entre attentes et réalité de la formation, ou d’un manque de soutien aux étudiants. Autre problème: diplôme ne veut pas toujours dire compétences. Ces dernières, notamment en maîtrise de l'écrit et des mathématiques, ont stagné ou diminué sur la dernière décennie dans la plupart des pays membres. «En France, il y a des adultes qui ont passé des années à l'école et parfois à l’université et qui n’ont même pas les compétences en littératie (compétences à l'écrit, ndlr) d’un enfant de 10 ans», a relevé Andreas Schleicher, directeur du département d’Education et des compétences de l’OCDE, lors de la présentation. Les études supérieures rapportent En outre, malgré la hausse des diplômés de l’enseignement supérieur, les entreprises ont du mal à trouver les qualifications dont elles ont besoin: «40% des employeurs sont en état de pénurie de compétences», relève l’OCDE, qui recommande la généralisation des formations courtes certifiantes tout au long de la vie active, afin d’aider «les travailleurs à s’adapter à l'évolution des besoins des entreprises, particulièrement avec la montée de l’intelligence artificielle. L’OCDE insiste sur un point souvent débattu: les études supérieures sont rentables, même lorsqu’elles coûtent cher comme en Angleterre ou aux Etats-Unis. «Une bonne éducation rapporte. Si vous avez une licence, vous gagnez 39% de plus qu’un diplômé de l’enseignement secondaire», et encore plus avec un master, fait valoir Andreas Schleicher. La plus-value d’un diplôme du supérieur dans une trajectoire professionnelle fait que la mobilité des étudiants internationaux ne cesse de croître, en dépit du coût des formations. Bémol notable: l’inégalité de l’accès à l’enseignement supérieur persiste et les enfants de diplômés du supérieur ont encore beaucoup plus de chances de décrocher eux aussi une formation de l’enseignement supérieur et de la terminer que ceux dont les parents n’ont pas fait d'études supérieures. Certains pays comme le Danemark et la Corée ont réussi à gommer en partie ces inégalités avec «tout de même 40% de possibilités d’avoir un diplôme de l’enseignement supérieur si vos parents n’ont pas terminé leurs études secondaires». A l’inverse en Hongrie ou en Lituanie par exemple ce taux n’est que de 7%. M. Schleicher relève que le système britannique de prêts étudiants est plutôt mieux à même de gommer les inégalités que certains autres pays où l’Etat finance davantage les études supérieures: le remboursement sera exigé après la fin des études seulement si le jeune gagne au moins un certain niveau de rémunération. Véronique DUPONT © Agence France-Presse -
Faire le bon diagnostic
Comptes publics : pourquoi la France a surtout un problème de dépenses
Une note du ministère des Comptes publics explique en détail l'augmentation spontanée du déficit lorsqu'aucune mesure n'est prise pour le contenir. En cause : des dépenses en roue libre