
Le numérique ne doit pas être le parent pauvre de la transition écologique

Christine Heckmann, directrice générale de Verdikt
Pourquoi intégrer l’informatique et le digital au cœur d’un programme de réduction de l’empreinte carbone quand cela ne représente qu’une faible part des émissions totales d’une multinationale et que la logistique peut en représenter 70 % ? On ne peut que saluer ce pragmatisme parétien. Cependant, ce raisonnement se heurtera à terme à un concept pourtant crucial quand il s’agit du climat : celui de trajectoire. Les efforts, salutaires, que bon nombre d’entreprises ont entrepris pour établir leurs premiers bilans carbone puis réduire les émissions liées à leurs activités, notamment industrielles et logistiques, couplés à l’absence fréquente des enjeux numériques au sein de leur feuille de route RSE, rendent très crédibles les prédictions de l’Ademe : « Le numérique est responsable de 4 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre (deux fois plus que le transport aérien civil), et la forte augmentation des usages laisse présager un doublement de cette empreinte carbone d’ici à 2025. » La place de la transformation digitale dans l’agenda des comités exécutifs ne vient que confirmer l’oracle.
Dès lors, il est permis d’imaginer l’appréhension des directions des systèmes d’information (DSI) à l’idée de voir la responsabilité numérique s’ajouter à la liste de leurs objectifs. Déjà soumises depuis plusieurs décennies à un double impératif d’efficacité financière et de qualité de service, les voilà au centre d’un nouveau triangle des incompatibilités dont le troisième sommet est le numérique responsable. Les attentes des collaborateurs sont d’ailleurs multiples, et parfois contradictoires, les uns demandant à leur DSI d’agir pour l’environnement, d’autres exigeant des équipements fréquemment remplacés et une expérience utilisateur irréprochable.
Mesurer pour agir
Alors que faire ? Deux écueils sont à éviter : le fatalisme qui laisserait croire que le problème est trop complexe et confinerait à l’immobilisme, l’idéalisme qui attendrait de l’innovation ou de la vertu des utilisateurs une solution miracle. Comme toujours, il faut d’abord mesurer ce qu’on souhaite améliorer. Compte tenu de la complexité du sujet (données disparates, absence de standards…) et du périmètre à évaluer (inventaires, politiques…), les entreprises cherchent de l’accompagnement et de l’outillage. Des solutions émergent pour analyser les données des systèmes d’information, en faire ressortir indicateurs et tableaux de bord de performance RSE, et en tirer des recommandations dont l’effet pourra être mesuré dans le temps. Il faudra par ailleurs veiller à privilégier une approche transverse afin de disposer d’ordres de grandeur permettant d’activer les leviers à impact.
Un rôle renforcé du DSI
Utiliser ces outils de mesure et de pilotage sera un levier puissant, à condition d’inscrire leur adoption dans une démarche partagée avec l’ensemble de l’organisation. Il faudra ainsi convaincre les dirigeants, les équipes techniques et les utilisateurs qu’il s’agit de la seule voie possible pour concilier performance et responsabilité, tout en s’assurant de la contribution des personnes clés au projet et d’une gestion adéquate de la donnée. Ce faisant, la DSI renforcera sa dimension stratégique au sein de l’organisation : les directions du développement durable, financière ou des ressources humaines ne seront, par exemple, pas insensibles aux bénéfices d’une démarche de numérique responsable en termes d’impact, d’économies et d’attractivité.
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