Le Conseil d’Etat réforme une décision de la Commission des sanctions de l’AMF visant Skylar France

Dans un arrêt du 24 mai 2023, le Conseil d’Etat indique que la Commission des sanctions de l’AMF a écarté à tort certains griefs à l’encontre du gestionnaire d’actifs Skylar France et de son président dans une décision datant de décembre 2020.
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Le Conseil d’Etat a, dans un arrêt datant du 24 mai 2023, réformé une décision de la Commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers (AMF) concernant la société de gestion française Skylar France (ex-SPGP), qui avait été reprise en janvier 2014 par Cédric Chaboud et demeure en liquidation judiciaire depuis mai 2019.

Skylar France et son dirigeant et unique actionnaire Cédric Chaboud, avaient été sanctionnés le 15 octobre 2019 suite à un contrôle de l’AMF survenu en février 2018. Il était alors reproché à Skylar France d’avoir manqué entre le 14 février 2015 et le 14 février 2018, à ses obligations relatives au contrôle du processus de gestion individuelle, à celles relatives à la gestion des conflits d’intérêts ainsi qu'à celles relatives à l’entrée en relation avec ses clients. Cela avait conduit la Commission des sanctions de l’AMF à prononcer un avertissement à l’encontre du gestionnaire et de son dirigeant le 18 décembre 2020.

D’autres griefs, «tirés de l’existence d’un conflit d’intérêts et d’une gestion qui n’aurait pas été assurée dans l’intérêt des investisseurs», avaient été écartés par la Commission. Et c’est précisément pour que ces griefs soient pris en compte que le président de l’AMF a sollicité l’annulation et la réformation de la décision de la Commission des sanctions vis-à-vis de Skylar France et de son président au Conseil d’Etat.

Taux de rotations élevés en portefeuille

Le Conseil d’Etat a par conséquent donné raison au président de l’AMF. Sur le grief fait à Skylar France d’avoir privilégié son intérêt au détriment de ses fonds et de ses clients, le Conseil d’Etat argue d’un « faisceau d’indices concordants » selon lequel certaines décisions d’investissement, qui ont entraîné la perception de commissions de mouvements au bénéfice de Skylar, n’étaient pas justifiée par un objectif économique. De fait, le Conseil d’Etat y voit un manquement à l’obligation de gestion dans l’intérêt des porteurs. Le Conseil d’Etat fait référence dans son arrêt à la justification économique des opérations d’achats et de ventes des deux fonds jugée «discutable» à l'époque par la Commission qui avait mis en exergue de fortes moins-values hors commissions de mouvements.

Les taux de rotation très élevés de deux anciens fonds de Skylar France, Endymion et Hypérion, qui ont représenté, pour la seule année 2016, respectivement 10,53 et 8,66 fois leurs actifs nets moyens, ont également été relevés par le Conseil, alors que ces fonds ont enregistré des performances négatives respectives de -16,8% et -17,8% cette même année. Aussi, plus de 20% des encours en gestion sous mandat de Skylar France étaient-ils investis sur ces deux fonds.

«Il résulte de ces différents éléments que, contrairement à ce qu’a retenu la commission des sanctions, il était suffisamment établi que la société Sylar France avait privilégié son intérêt au détriment de celui des porteurs. Par suite, la commission des sanctions ne pouvait (…) écarter le grief tiré de ce que Skylar France avait privilégié son intérêt au détriment de celui de ses clients», juge l’instance. Le Conseil d’Etat a également estimé que le grief tiré du défaut de mention de l’application d’un taux de rotation élevé des portefeuilles dans les prospectus des fonds n’aurait pas dû être écarté par la Commission des sanctions de l’AMF. «Il résulte de l’instruction qu’alors que la stratégie d’investissement des fonds impliquait un changement rapide et profond des allocations de portefeuille en cas de forte volatilité des marchés, les prospectus des fonds ne décrivaient pas les conséquences prévisibles de ces mouvements s’agissant des frais facturés aux investisseurs», souligne le Conseil d’Etat dans son arrêt. Pour rappel, les commissions de mouvement dans les fonds d’investissement seront interdites à compter du 1er janvier 2026 en France.

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