
Les Etats-Unis devraient tirer la croissance mondiale en 2014

En 2013, les économies occidentales ont franchi un pas important sur la voie de la normalisation, effaçant une partie des traces de la crise de la dette. Pour 2014, les économistes anticipent une légère accélération de la croissance économique mondiale, sachant que les écueils demeurent encore nombreux. Le FMI table sur une hausse de 3,6% du PIB mondial l’an prochain, contre une prévision de 2,9% pour cette année. Les Etats-Unis devraient tirer la croissance mondiale tandis que la reprise s’annonce toujours contrainte dans la zone euro encore fragile et que les pays émergents affichent des trajectoires économiques hétérogènes.
Les Etats-Unis, moteur de la croissance mondiale.
Le PIB américain a progressé de 2,8% en rythme annualisé au troisième trimestre. «Les résultats des entreprises américaines sont toujours orientés à la hausse. Les ventes au détail continuent de progresser. L’environnement devient plus favorable à l’investissement des entreprises qui a marqué le pas en 2013»,souligne Pierre Barral gérant chez Convictions AM. En novembre, l’ISM manufacturier, un indicateur avancé de l’économie américaine, a continué de progresser pour atteindre 57,3, soit son plus haut niveau depuis décembre 2010. Dans le même temps, l’embellie se poursuit sur le marché du travail, même si les emplois restent précaires,ce quipourrait pousser la Fed à réduire ses rachats d’actifs plus tôt que prévu.
Pour 2014, le consensus anticipe un net redémarrage de l’activité américaine avec une croissance à 2,6%, voire proche de 3%. Pour Olivier Raingeard, chef économiste de la banque Neuflize OBC,«une accélération de la croissance aux Etats-Unis est possible si l’incertitude budgétaire est levée».
Aux Etats-Unis, la menace d’un nouveau «shutdown» semble s’éloigner. L’accord budgétaire du 10 décembre intervenu au Congrès après des semaines de négociations entre républicains et démocrates devrait permettre d’éviter la paralysie fédérale en janvier. Il doit encore être adopté par la Chambre et le Sénat.
Impact limité du «shutdown».
Les premiers indicateurs montrent un impact limité de l’arrêt de plusieurs services fédéraux intervenu en octobre (le «shutdown»)sur la croissance économique américaine. «Les premières estimations étaient de l’ordre de 0,3 à 0,4 point de PIB en moins sur la croissance américaine, en rythme annuel, du quatrième trimestre. Elles seront révisées à la baisse», souligne Jean-Louis Mourier, économiste chez Aurel BGC. Pour 2014, il se montre toutefois prudent sur les perspectives américaines et table sur une hausse du PIB proche de 2%. «Comme toujours, le consensus est optimiste sur la croissance américaine. En décembre 2012, la croissance 2013 était attendue à 2,4%, elle sera finalement proche de 2%», explique-t-il.
L’Europe sort de la récession…
Confrontée à la quasi-stagnation du PIB de la zone euro au troisième trimestre (+0,1%), à une légère remontée du taux de chômage à 12,1% et à un recul marqué de l’inflation alors que l’euro reste fort face à bien des monnaies, la BCE a réagi en annonçant une baisse surprise de 0,50% à 0,25% de son principal taux directeur à l’issue de sa réunion de début novembre. Certes, la zone euro a renoué avec la croissance depuis le deuxième trimestre et la menace d’implosion a été écartée, mais les économies du Vieux continent restent soumises à plusieurs menaces.
La BCE, gardienne de la stabilité des prix, est notamment préoccupée par le spectre de la désinflation, qui correspond à une période d’inflation basse, véritable plaie pour la croissance économique qui s’annonce déjà molle en Europe en 2014. Le FMI table sur une hausse de 1% du PIB dans la zone euro l’an prochain. «La reprise est contrariée par le durcissement des politiques budgétaires et la persistance des déséquilibres macro-financiers», souligne Olivier Raingeard. Hors de la zone euro, la Grande-
Bretagne tire son épingle du jeu avec un PIB en hausse de 0,8%, soit sa progression la plus forte depuis trois ans.
… mais elle n’est pas tirée d’affaire.
«Le grand calme des derniers mois sur le front obligataire en Europe est à risque. Plusieurs sources d’inquiétudes subsistent: une contagion américaine, un frein de la Cour constitutionnelle allemande aux mesures de sauvetage de la zone euro, un reflux conjoncturel, une tempête sociale…»,prévient Etienne de Callataÿ, chef économiste de la banque privée Degroof.«Ce qui est paradoxal, c’est que la confiance des ménages progresse en Europe malgré la hausse du chômage. En fait, cela s’explique un peu par une amélioration des sous-jacents, tel le regain de compétitivité de l’économie espagnole, et par une forme d’accoutumance à la crise pour les Européens», ajoute l’économiste. Soumise à une sévère cure d’austérité, l’Espagne est officiellement sortie au troisième trimestre d’une récession qui a duré deux ans. Le PIB national a progressé de 0,1% entre juillet et septembre grâce à une reprise de la consommation intérieure. Malgré tout, le marché du travail reste sinistré avec un taux de chômage de 16%.
«Désormais, en Europe, on ne parle plus des pays PIIGS (Portugal, Italie, Irlande, Grèce, Espagne) mais des économies FISH (France, Italie, Espagne, Pays-Bas) qui sont fragilisées par leur niveau d’endettement. Concernant la France en particulier, l’Etat n’a toujours pas fait les réformes nécessaires pour réduire ses dépenses publiques et met une pression fiscale trop importante. Si l’inflation en France continuait de chuter, le poids de la dette deviendrait probablement critique»,estime Philip Goldsmith, managing director Europe du gestionnaire d’actifs britannique Ignis Asset Management. La France est d’ailleurs considérée par certains, notamment en Allemagne, comme le nouveau malade de l’Europe. La croissance semble en revanche bien installée en Grande-Bretagne.
Des trajectoires hétérogènes dans les émergents.
Les émergents sont confrontés quant à eux à un ralentissement de la croissance. «Les pays émergents restent contraints par des problématiques structurelles qui les empêchent d’accélérer avec une croissance attendue autour de 5% en 2014», souligne Neuflize OBC.
Plusieurs grandes économies émergentes se sont retrouvées cet été au cœur des turbulences financières. Les sorties de capitaux liées à l’anticipation d’un durcissement de la politique monétaire américaine avaient alors entraîné des dévaluations importantes des taux de change.
Les récents commentaires apaisants de la future présidente de la Fed, Janet Yellen, sur un report de la fin du programme d’assouplissement quantitatif ont calmé les tensions sur les économies émergentes, notamment celles au déficit courant les plus importants (Brésil, Inde, Indonésie, Turquie). Mais si l’activité s’est récemment redressée en Chine, en Corée du Sud, voire en Europe de l’Est, elle reste en revanche orientée à la baisse en Inde et au Brésil.
Le Japon au milieu du gué.
Au Japon, la reprise a été encouragée par la politique économique du premier ministre Shinzo Abe («Abenomics»),mais il y a encore beaucoup d’inconnues liées notamment à l’impact de la future hausse de la TVA. La banque centrale japonaise pourrait être amenée à intervenir davantage en cas de reprise économique trop faible.
Les banques centrales en appui.
Dans ce contexte toujours incertain, les banquiers centraux restent à la manœuvre. La normalisation attendue de la politique de la Fed pose la question de ses répercussions sur l’économie mondiale. «Bien sûr, la Réserve fédérale réduira bientôt ses achats de titres. Elle continuera néanmoins de faire tout ce qui est en son pouvoir pour empêcher une remontée brutale des taux d’intérêt et maintiendra des conditions financières favorables à une poursuite de la croissance de l’activité»,affirme Anton Brender, directeur des études économiques de Dexia Asset Management.
De son côté, la BCE étudie de nouvelles mesures de soutien à l’économie européenne telles que les achats directs d’actifs, de nouvelles opérations de refinancement à long terme (LTRO) ou une baisse de ses taux directeurs, voire un taux de dépôts négatif. Mais elle a déjà utilisé beaucoup de cartouches.
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