
Le manque de transparence dans les cryptos attise les doutes sur Celsius

Lancée en 2017 et basée aux Etats-Unis, Celsius Network est une plateforme centralisée de crédit et de financement qui revendique 1,7 million de clients et 12 milliards de dollars d’actifs sous gestion. Elle propose notamment à ses clients de placer leurs cryptomonnaies, en échange d’un rendement entre 5% et 20% hebdomadaire. Ce lundi 13 juin, elle a annoncé qu’elle suspendait tous les retraits, échanges et transferts entre compte.
Déjà le 5 juin, le compte Twitter Yieldchad pointait du doigt les risques d’insolvabilité de Celsius Network vis-à-vis de ses clients sur ses positions en ethers – la cryptomonnaie d’Ethereum – en cas de demande massive de retraits. Ces affirmations sont facilement vérifiables puisqu’elles proviennent de données de Curve, une plateforme d’échanges décentralisée dont les données sont entièrement transparentes et consultables par tous à n’importe quel moment.
Ainsi, seulement 27% des ethers de Celsius Network seraient liquides. Le reste étant composé à 29% de ETH2, des ethers qui permettent d’être dès à présent rémunéré pour être validateur sur la nouvelle blockchain Ethereum, qui fonctionnera en preuve d’enjeu. Mais la contrepartie, c’est qu’ils sont immobilisés au moins pour les six à neuf prochains mois, en attendant la mise à jour complète d’Ethereum.
Secret des affaires
Enfin, le reste des positions de Celsius Network se composerait à hauteur de 44% de stETH, un produit financier conçu pour permettre de faire circuler une représentation de l’ETH2, pour le moment immobilisé donc. Au sein de Curve, il est possible d’échanger du stETH contre de l’ETH mais, selon les données, la balance de Celsius est pour le moment déséquilibrée et ne permettrait pas, au 10 juin, de couvrir des sorties massives (un «bank run») sur ces positions.
Ce constat a ensuite été étayé par le media Dirty Bubble, qui s’est livré à un audit des positions de Celsius au sein des protocoles de finance décentralisée, comme Aave, Compound et Maker, tous également entièrement transparents. Résultat ? Celsius serait endettée à hauteur de 1,18 milliard auprès de ces protocoles.
En soi, cet endettement n’est pas rédhibitoire, mais les craintes se fondent sur le fait que la plateforme utiliserait les cryptomonnaies déposées par ses clients pour jouer sur les marchés et recourrait à l’emprunt de liquidités pour assurer la continuité des retraits de ses clients. C’est d’ailleurs ce qui avait poussé la plateforme d’infrastructure financière Prime Trust à rompre ses liens en juin 2021 avec Celsius Network, qui est régulièrement accusée de manque de transparence sur ses réserves.
Éloge de la finance décentralisée
Dans un rapport publié le 27 mai, le cabinet d’analyse Nansen affirme qu’une adresse liée à Celsius Network aurait retiré l’équivalent de 420 millions de dollars, via une quinzaine de transactions, de l’écosystème Terra, entraînant une panique bancaire, et du même coup la plus grosse chute de l’histoire du monde crypto en termes de capitalisation. Ce retrait trahirait une exposition très importante de Celsius Network à Terra et contribuerait à alimenter les rumeurs sur ses difficultés financières. «Au départ, Celsius Network était un apporteur de liquidité au sein de Aave. Depuis quelques mois, ils sont clairement plus emprunteurs», explique Marc Zeller, responsable des relations développeurs au sein de Aave.
Mais, pour lui, il est impossible d’affirmer que Celsius Network serait en position de faire faillite : «Celsius est un acteur qui est à cheval entre la finance décentralisée et la finance classique, dans laquelle on ne connaît pas ses positions.» Contactée par L’Agefi, Celsius Network réaffirme qu’elle dispose de «solides liquidités» et qu’en tant qu’entreprise privée «elle ne partageait pas sa situation financière». De son côté, Alex Mashinsky, cofondateur de Celsius Network, s’est défendu en affirmant que «quelqu’un souhaitait faire tomber» son entreprise.
Ces accusations d’insolvabilité ont permis aux partisans de la finance décentralisée, comme Marc Zeller, de vanter ses mérites en matière de transparence : «Dans la finance décentralisée, ce genre de rumeur d’insolvabilité n’existe pas puisque toutes les positions financières sont consultables via les ‘smart contracts’. C’est ce qui la différencie de la finance traditionnelle.»
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RDC: à Ntoyo, dans le Nord-Kivu, les survivants des massacres commis par les ADF enterrent leurs morts
Ntoyo - Lundi soir, les habitants de Ntoyo, un village de l’est de la République démocratique du Congo (RDC), s’apprêtaient à assister à des funérailles quand une colonne d’hommes armés a surgi de la forêt. «Parmi eux, il y avait de très jeunes soldats», raconte à l’AFP Jean-Claude Mumbere, 16 ans, rescapé d’un des deux massacres commis par les rebelles ADF (Forces démocratiques alliées) dans la nuit de lundi à mardi, l’un à Ntoyo et l’autre dans un village distant d’une centaine de kilomètres. Le bilan de ces attaques, au moins 89 tués selon des sources locales et sécuritaires, a peu de précédent dans une région pourtant en proie à une instabilité chronique, victime depuis trente ans de multiples groupes armés et conflits. Les ADF, groupe armé né en Ouganda et qui a prêté allégeance à l’Etat islamique, est connu pour une extrême de violence à l'égard des civils. «Ils étaient nombreux et parlaient une langue que je ne comprenais pas. De loin, ils portaient des tenues qui ressemblaient à celles des militaires», se souvient le jeune homme, venu assister mercredi aux funérailles de sa soeur, l’une des victimes de ce nouveau massacre perpétré dans la province du Nord-Kivu. Plus de 170 civils ont été tués par les ADF depuis juillet dans les provinces de l’Ituri et du Nord-Kivu, selon un décompte de l’AFP. Plus au sud, malgré les pourparlers de paix de ces derniers mois, des affrontements se poursuivent entre l’armée congolaise (FARDC) et affiliés, et le groupe armé antigouvernemental M23, soutenu par le Rwanda et son armée, qui s’est emparé des grandes villes de Goma et de Bukavu. A Ntoyo, Didas Kakule, 56 ans, a été réveillé en sursaut par les premiers coups de feu. Il dit avoir fui avec femmes et enfant à travers les bananeraies pour se réfugier dans la forêt voisine, avec d’autres habitants. Tapis dans l’obscurité, les survivants n’ont pu que contempler leurs maisons consumées par les flammes. «Les coups de feu ont retenti longtemps. Ma maison a été incendiée, ainsi que le véhicule qui était garé chez moi. Chez nous, heureusement, personne n’a été tué», dit Didas Kakule. Jean-Claude Mumbere, lui, a été touché par une balle pendant sa fuite. «Ce n’est qu’après m'être caché dans la forêt que j’ai réalisé que je saignais», affirme-t-il. «Inaction» Mercredi, Ntoyo, 2.500 habitants, n'était plus qu’un village fantôme, et la plupart des survivants partis se réfugier dans l’agglomération minière voisine de Manguredjipa. Une dizaine de corps étaient encore étendus sous des draps ou des bâches, battus par une forte pluie. Des volontaires ont creusé des tombes, assistés par des jeunes des environs, et planté 25 croix de bois dans la terre humide. Une partie des dépouilles avait déjà été emportée par les familles, les cercueils ficelés à la hâte sur des motos. Parmi les quelques proches de victimes venus aux funérailles, Anita Kavugho, en larmes devant la tombe de son oncle. Il est mort "à cause de l’inaction des autorités qui ne réagissent pas aux alertes», peste la jeune femmme, une fleur à la main. Des pickups de l’armée congolaise stationnent non loin, devant un véhicule calciné. Le déploiement de l’armée ougandaise (UPDF) aux côtés de l’armée congolaise dans le nord-est de la RDC depuis 2021 n’a pas permis de mettre fin aux multiples exactions des ADF, groupe formé à l’origine d’anciens rebelles ougandais. Quatre militaires congolais étaient présents à Ntoyo au moment de l’attaque. Les renforts stationnés à environ 7 km à Manguredjipa sont arrivés trop tard. «C’est leur faillite, on signale aux militaires que les assaillants sont tout près, et ils n’arrivent pas à intervenir», lâche Didas Kakule, amer. Cette énième tuerie risque d’aggraver la «fissure» entre l’armée et la population, estime Samuel Kakule, président de la société civile de Bapere. Les ADF «se dispersent en petits groupes pour attaquer nos arrières», répond le lieutenant Marc Elongo, porte-parole de l’armée congolaise dans la région, présent à Ntoyo mercredi. Quelques jours auparavant, les forces ougandaises et congolaises s'étaient emparées d’un bastion ADF dans le secteur et avaient libéré plusieurs otages du groupe, selon l’armée. Mais comme souvent, les ADF se sont dispersés dans la forêt, et ont frappé ailleurs. Une stratégie pour attirer les militaires loin de ses bases, selon des sources sécuritaires. © Agence France-Presse -
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