
La planète crypto se prépare à la déflagration FTX

La cryptosphère se prépare à l’onde choc. Après avoir proposé mardi de racheter son principal concurrent FTX, Binance a fait machine arrière ce mercredi «à la suite de l’audit préalable de l’entreprise, ainsi que des dernières informations concernant les fonds mal gérés des clients et les enquêtes présumées des agences américaines», a tweeté l’entreprise. Une opération qui paraissait de toute manière très compliquée à boucler, aussi bien réglementairement que financièrement.
Si personne ne vole à son secours, FTX qui représente 10,8% de parts du marché crypto et était valorisée à hauteur de 32 milliards de dollars en janvier dernier va tout droit vers la faillite. Depuis l’abandon de Binance, l’acteur le plus puissant de l'écosystème avec 64,1% de parts de marché selon les données de The Block Research, aucun acteur ne s’est publiquement positionné pour l’acquérir.
La plateforme de trading fondée par Samuel Bankman-Fried (SBF) fait face depuis dimanche à une grave crise de liquidité et un rush de retraits de la part de ses utilisateurs. Une situation notamment provoquée par la perte de confiance généralisée du marché crypto dans le FTT, la cryptomonnaie native de FTX sur laquelle repose largement le modèle économique de la galaxie de SBF. En 24 heures, son cours s’est effondré de plus de 80%.
Le 2 novembre, CoinDesk révélait que le bilan d’Alameda Research, entreprise centrale dans le fonctionnement de l’empire de SBF, était basé à plus de 40% sur le FTT. Les choses se sont accélérées le 6 novembre lorsque Binance annonçait par la voix de son PDG Changpeng Zhao (CZ) son intention de liquider tous les FTT en sa possession et de facto ne plus croire dans la solidité du modèle.
Le lendemain, celui qui se fait surnommer CZ annonçait que son entreprise avait «signé une lettre d’intention non-contraignante, avec l’intention d’acquérir entièrement FTX» et se posait en potentiel sauveur de la plateforme faisant espérer à l’écosystème crypto des conséquences un peu moins violentes. Le rachat de FTX aurait permis à Binance d’avoir accès à ses clients institutionnels directement, sans passer par un processus plus long en cas de faillite. Elle aurait aussi mis plus rapidement la main sur les fonds des utilisateurs particuliers.
Effet systémique à venir
Il est pour le moment difficile d’identifier avec précision quels autres contreparties pourraient se retrouver impliqués dans une éventuelle chute. Certains acteurs de premier plan comme Coinbase, Circle ou Tether ont déjà communiqué pour préciser qu’ils n’étaient pas exposés.
En revanche, Galaxy Digital, une société de services financiers axée sur les cryptoactifs s’est déclaré exposée à FTX à hauteur de 76,8 millions de dollars. Après la chute de Terra-Luna, SBF s’est posé en sauveur de nombreux acteurs crypto en difficulté via Alameda Research et FTX Ventures sachant que le nombre exact d’investissement de ces deux entités n’est aujourd’hui pas connu. «Je ne vois pas comment FTX et Alameda peuvent s’en sortir. Cet épisode va marquer un nouveau coup très dur pour le marché crypto dans son ensemble. Le prochain mois s’annonce très difficile», prédit Reda Berrehili, fondateur de la Ki Foundation.
Devant les difficultés d’Alameda Research et FTX, le bitcoin a perdu plus de 15%, retrouvant un plus bas de deux ans. L’ether, la cryptomonnaie native du réseau Ethereum perdait plus de 20%. Dans le même temps, les investisseurs cherchaient à se débarrasser du FTT dont les volumes d’échanges n’ont jamais été aussi élevés, en se ruant notamment sur le stablecoin Tether. Les volumes de transactions sur ce dernier ont augmenté de près de 40% ces dernières 24 heures.
Un besoin de transparence
Pour le moment, la plateforme a bloqué les retraits, empêchant les utilisateurs de retirer leurs fonds. Il y a encore quelques jours, FTX semblait encore to big to fail. «Cette chute peut marquer un tournant important concernant la protection des fonds des utilisateurs sur les plateformes», explique à L’Agefi Xavier Lavayssière, chercheur indépendant spécialiste de la régulation des actifs numériques.
CZ a déclaré qu’à l’avenir, toutes les plateformes d’échanges de cryptomonnaies devraient fournir des preuves de réserves. Il a assuré que Binance allait «bientôt commencer à le faire» tout en exhibant le fonds de garantie de son entreprise valorisé à près d’un milliards de dollars. Une «valeur» qui repose pour environ 700 millions de dollars sur son stablecoin BUSD et sa cryptomonnaie native, le BNB, ainsi que sur l’équivalent de 300 millions de dollars de bitcoins.
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