Crédit Agricole CIB s’approprie les technologies quantiques

Deux expérimentations ont été menées avec Pasqal et Multiverse Computing afin d’identifier les apports et les performances du quantique. Les résultats sont encourageants.

L’utilisation du quantique montre déjà des résultats très intéressants dans divers domaines, dont la finance. Chez Crédit Agricole CIB, Ali El Hamidi, directeur adjoint des solutions de financement, et quelques autres s’intéressent depuis 2019 aux calculs quantiques, persuadés qu’ils pourraient accélérer les travaux réalisés quotidiennement par la banque. Poussé par la direction générale du Crédit Agricole, elle-même très intéressée par le sujet, Ali El Hamidi engage des discussions avec deux sociétés bien connues dans le monde quantique : Pasqal construit un ordinateur quantique et Multiverse Computing développe une approche inspirée du quantique permettant d’utiliser des algorithmes quantiques sur des machines traditionnelles. Deux expérimentations sont lancées, la première sur la tarification d’options complexes sur des produits dérivés, la seconde sur la détection précoce de la dégradation de la notation des grands clients corporate.

Chez Crédit Agricole CIB, « une des techniques expérimentées pour le pricing d’options complexes consiste à utiliser des réseaux de neurones, une des technologies de l’intelligence artificielle. Cette technique apporte plusieurs avantages mais présente l’inconvénient d’être gourmande en capacités de calcul, d’autant plus que le besoin en ressources pour entraîner ces réseaux augmente avec la complexité des produits financiers à valoriser, observe Ali El Hamidi. Dans certains cas, cela devient impossible à faire avec des capacités de calcul classiques, de là l’idée d’utiliser des algorithmes inspirés du quantique. » Multiverse Computing propose justement des algorithmes inspirés de la théorie de la physique quantique permettant de réaliser ces calculs complexes en les simplifiant grâce à des réseaux de tenseurs, une sorte de compresseurs qui permettent de réaliser les calculs, même sur un ordinateur classique, en réduisant le nombre d’informations à traiter à l’essentiel. « C’est une solution intermédiaire en attendant que les ordinateurs quantiques soient largement disponibles », indique Michel Kurek, directeur France de Multiverse Computing.

Gain de temps

« Nous avons testé plusieurs produits dérivés et constaté qu’il était ainsi possible de diviser le temps de calibration par un facteur allant de 2 et à 12, résume Ali El Hamidi. Plus le produit est complexe, plus la calibration classique des réseaux est gourmande, et plus le gain de temps est important. » Un résultat très encourageant. Un article scientifique présentant ces travaux a même été publié. Pour la banque, la prochaine étape sera l’entrée en production, ce qui nécessite d’une part d’automatiser les procédures dans son propre environnement informatique, et d’autre part d’homologuer ces nouveaux outils en interne.

La deuxième expérimentation avait pour objectif de tester l’ordinateur quantique de Pasqal sur la détection précoce, entre six et dix-huit mois en amont, des défaillances de grandes entreprises grâce au traitement d’un large historique de données macroéconomiques et des données financières et boursières de chaque entreprise. Un modèle en production depuis des années alerte les analystes crédit et déclenche des décisions de la banque pour se protéger. La formalisation du problème a été effectuée par Multiverse Computing, qui a également géré le projet. Puis, les équipes de Pasqal l’ont dupliquée dans leur machine quantique, reproduisant les variables et les corrélations entre elles à l’échelle de l’atome, avant de faire fonctionner la machine et de lire les résultats.

« Nous avons pu vérifier que l’informatique quantique était capable de reproduire le résultat réel, c’est un acquis majeur, estime Ali El Hamidi. La ‘scalabilité’ a également été testée avec succès. On constate une amélioration franche des performances avec le nombre de Qubits (plus petite unité de stockage d’information quantique, NDLR). On anticipe un avantage quantique à partir de 300 Qubits. » Autre bénéfice, « notre ordinateur quantique consomme 10 kW là où le moindre HPC (calcul haute performance) nécessite des mégawatts », soulignent Loïc Henriet et Christophe Legrand, directeur technique et directeur du développement commercial de Pasqal.

Après ces deux tests probants, les partenaires devraient poursuivre la collaboration sur d’autres sujets tout aussi concrets.

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