
Alibaba ouvre la voie à une IPO d’Ant Financial

Alibaba remet à plat ses liens avec Ant Financial. A l’occasion de la présentation de ses résultats trimestriels, le numéro un chinois du commerce électronique a annoncé l’acquisition d’une participation de 33% de son bras financier, qui opère notamment la solution de paiement mobile Alipay mais n’a aucun lien capitalistique avec le groupe. Réalisée via l’émission d’actions nouvelles, cette opération préfigure l’introduction (IPO) en Bourse d’Ant Financial voire de sa filiale Alipay, qui souhaitent accélérer leur développement à l’international.
Anciennement connu sous le nom de Zhejiang Ant Small & Micro Financial Services, Ant Financial avait été renommé en octobre 2014 quelques mois après s’être scindé du groupe Alibaba. Fondé par Jack Ma, ce dernier avait lui-même bouclé une IPO record à New York en septembre 2014. C’est à cette époque qu’Alibaba et Ant Financial, dont la majorité des droits de vote sont contrôlés par Jack Ma, avaient scellé leurs relations financières. Alibaba recevait 37,5% du profit avant impôts d’Ant Financial, ainsi que 2,5% de l’encours de prêts octroyés à la maison mère d’Alipay pour son développement. En cas d’IPO d’Ant Financial, Alibaba recevait également 37,5% de sa valorisation.
Cet arrangement prendra fin avec la prise de participation d’Alibaba, qui financera l’opération par le paiement par Ant Financial d’un montant équivalent, lié au transfert à sa future filiale de certains actifs et droits de propriété intellectuelle. «Si nous devons réaliser le paiement intégral de l’émission à un moment où Ant Financial n’a pas réalisé tous les versements correspondants au transfert [d’actifs], par exemple pour faciliter une IPO d’Ant Financial ou d’Alipay, alors nous paierons l’intégralité du montant et les entités d’Ant Financial dédiées au transfert émettront des billets à ordre portant intérêts à concurrence des paiements non encore réalisés», détaille un document réglementaire enregistré auprès de la SEC.
Ce montage complexe traduit l’opacité qui règne autour d’Ant Financial et d’Alipay, la pépite de Jack May. Egalement présent dans divers services financiers aux particuliers et aux petites entreprises, comme les fonds monétaires et le scoring crédit, Ant Financial avait bouclé en 2016 une levée de fonds de 4,5 milliards de dollars sur la base d’une valorisation de 60 milliards. Le courtier CLSA avançait la même année une valorisation de 75 milliards de dollars.
La montée au capital d’Ant Financial intervient cependant dans un contexte de concurrence renforcée sur le marché chinois pour Alipay, avec à la clé une baisse des royalties versées par le groupe à Alibaba, après une hausse de 86% à 2,1 milliards de yuans (267 millions d’euros) sur l’exercice 2017 (clos fin mars). «Notre part de profit venant d’Ant Financial a baissé en raison du plan de croissance agressif du groupe durant le trimestre, qui a induit une hausse des dépenses d’acquisition de nouveaux utilisateurs d’Alipay Wallet», détaille Alibaba.
Si aucune décision concernant une IPO d’Ant Financial n’a officiellement été prise, a indiqué jeudi la directrice financière d’Alibaba Maggie Wu, ce scénario devient désormais plausible à court terme selon les analystes de Pacific Epoch. En clarifiant ses liens capitalistiques avec Ant Financial en amont d’une IPO, Alibaba cristalliserait la valeur dans ses comptes, tout en lui ouvrant des sources de financement externe nécessaires à sa croissance et davantage de transparence. Ant Financial a récemment accusé un revers important aux Etats-Unis avec l’échec de l’acquisition du spécialiste américain du transfert de fonds MoneyGram.
Plus d'articles du même thème
-
Klarna et la crypto réveillent les introductions à Wall Street
Le succès de la cotation du spécialiste du paiement fractionné, associé à l’engouement provoqué par les projets d’introduction en Bourse de plusieurs acteurs des cryptoactifs, illustre l’intérêt des investisseurs pour les valeurs financières de nouvelle génération. -
La fraude par manipulation reste sous contrôle
L’Observatoire de la sécurité des moyens de paiement montre que les mesures prises par les banques et la collaboration avec les opérateurs télécom portent leurs fruits. -
L’accélération du commerce en ligne sera soutenue par les grands fournisseurs de paiement
C’est notamment grâce à Stripe, Visa et Paypal que le commerce électronique devrait connaître une croissance dynamique durant les cinq prochaines années, estime Juniper Research.
Sujets d'actualité
ETF à la Une

UBS AM liste quatre ETF construits autour des «Mega Cap»
- Le rachat de Mediobanca menace la fusion des gestions de Generali et BPCE
- Les institutionnels sélectionnent Starquest-Montefiore pour gérer le fonds non coté Objectif Biodiversité
- L’Union européenne cherche la clé d’une épargne retraite commune
- New York Life réunit son actif général et sa gestion d’actifs
- Thélem arbitre ses actifs en profondeur
Contenu de nos partenaires
-
Crash test
Après la Pologne, la Roumanie subit l'incursion d'un drone russe dans son espace aérien
Ce n'est pas la première fois qu'un drone russe pénètre dans l'espace aérien roumain -
Brut de décoffrage
« Il n’y a pas eu d’excuses » : la véritable explication de texte entre Dominique de Villepin et Sébastien Lecornu
Invité à la Fête populaire organisée par le député PS Philippe Brun à Léry (Eure), samedi 13 septembre, l’ex-chiraquien a mis en garde le Premier ministre contre le risque de « toutouïfication » vis-à-vis d’Emmanuel Macron -
«Biens mal acquis»: une enquête française vise Najib Mikati, ancien Premier ministre libanais
Paris - Une nouvelle figure de la classe dirigeante libanaise dans le viseur de la justice française: une enquête est ouverte à Paris visant Najib Mikati, Premier ministre jusqu'à début 2025, soupçonné de s'être constitué frauduleusement un important patrimoine de «biens mal acquis». Interrogé par l’AFP, le Parquet national financier (PNF) a confirmé l’ouverture de cette enquête. Au Liban, le service de communication de Najib Mikati a indiqué «ne pas avoir été notifié». A l’origine de cette procédure, une plainte déposée en avril 2024 par le Collectif des victimes des pratiques frauduleuses et criminelles au Liban (CVPFCL) et l’association anti-corruption Sherpa. Cette dernière porte plainte en France depuis une vingtaine d’années contre des responsables étrangers, soupçonnés d’avoir amassé une fortune par la corruption ou le détournement de fonds publics, avant de la recycler, au moins en partie, dans l’Hexagone. Les deux associations ont ouvert en 2021 un front libanais à ces affaires de «biens mal acquis», qui concernaient à l’origine des chefs d’Etat africains, en portant plainte contre l’ancien dirigeant de la banque du Liban, Riad Salamé. En 2024, elles ciblent Najib Mikati, 69 ans, et ses proches, dont son frère Taha Mikati. Ils sont suspectés d’avoir acquis différents biens en France et à l’étranger par des structures multiples, dont des montages offshore. Une fortune qu’ils auraient amassée frauduleusement, au mépris notamment du fisc, tandis que le pays du Cèdre s’enfonçait dans le chaos politique et financier. Lors du dépôt de la plainte, Najib Mikati avait assuré avoir «toujours agi dans le strict respect de la loi», tout comme les membres de sa famille. «L’origine de notre patrimoine familial est entièrement transparente, légitime et conforme à la législation», avait insisté celui qui a été Premier ministre du Liban à plusieurs reprises, et jusqu'à début 2025. Yachts et jets privés Najib Mikati, qui a fait fortune dans les télécoms, et son frère Taha, sont présentés par les plaignants comme faisant partie des plus grandes fortunes du Liban, la famille possédant yachts, jets privés ou immeubles sur la Côte d’Azur, à Monaco et dans les plus beaux quartiers de Paris. Ils ont aussi investi dans des marques de prêt-à-porter, comme Façonnable. La première plainte visait les infractions de blanchiment et recel ou complicité, association de malfaiteurs, le tout commis en bande organisée, circonstance aggravante. Elle a été complétée par de nouveaux éléments en avril 2025, conduisant le PNF à se saisir du dossier. En cause notamment, les liens de la famille Mikati avec la Bank Audi France, spécialisée dans la clientèle du Moyen-Orient, dont l’ancien Premier ministre est actionnaire, ou un important contrat de fourniture de services télécoms au Liban et en Syrie conclu en 1994. Il aurait selon les plaignants conduit à priver l’Etat de vastes recettes. «Pouvoir de nuisance» Cette enquête «va peut-être réduire le pouvoir de nuisance de ceux qui cherchent à tout prix à saper le processus en cours pour que cesse la prédation des intérêts privés sur l’Etat et l’intérêt public des Libanais», ont déclaré à l’AFP les avocats, Mes William Bourdon et Vincent Brengharth. Plusieurs enfants des frères Mikati sont aussi visés comme de potentiels receleurs de l’argent supposément blanchi. Les plaignants pointent également des opérations suspectes à leurs yeux entre des comptes et sociétés contrôlées par les Mikati et d’autres, aux mains de l’ancien dirigeant de la banque du Liban, Riad Salamé. Une information judiciaire est désormais en cours à Paris visant ce dernier, qui fait l’objet d’un mandat d’arrêt international, tandis que son frère Raja Salamé a été mis en examen. Ils contestent fermement les faits. François BECKER © Agence France-Presse