Les «frugaux» refroidissent les tenants d’une refonte du Pacte de stabilité

L’enjeu vise à définir la stratégie en matière de politique budgétaire à adopter en sortie de crise. Les pays du Nord de l’Europe veulent plus de rigueur financière au Sud.
Clément Solal, à Bruxelles
Valdis Dombrovskis, vice-président exécutif de la CE : «Nous devons travailler à quelque chose qui permettra la réduction de la dette et des déficits mais restera réaliste pour tous les Etats».
Valdis Dombrovskis, vice-président exécutif de la CE : «Nous devons travailler à quelque chose qui permettra la réduction de la dette et des déficits mais restera réaliste pour tous les Etats».  -  UE

La réforme s’annonce difficile. Réunis vendredi et samedi derniers en Slovénie, les ministres des Finances de l’Union européenne ont engagé le débat sur le futur du Pacte de stabilité et de croissance (PSC), dont la mise en œuvre devrait rester suspendue jusqu’à fin 2022. Alors que la Commission européenne (CE) relancera en automne le processus de révision des règles budgétaires européennes initié en février 2020, mais mis entre parenthèses avec la pandémie, les propositions de réformes radicales se sont succédé ces derniers mois. Provenant du milieu universitaire, du Comité budgétaire européen et, au début de l’été, du Parlement européen, nombre de celles-ci préconisent l’introduction d’une plus grande flexibilité à l’égard des investissements publics.

Une éventualité balayée d’un revers ce week-end par les ministres des Finances des Etats dits «frugaux» (Pays-Bas, Autriche, Danemark et Suède) dans une lettre publiée en marge de la réunion avec leurs homologues finlandais, tchèque, slovaque et lettons. Si le document ne ferme pas la porte à une réforme, à la portée toutefois limitée, le sujet ne figure clairement pas parmi les priorités des huit gouvernements. «La désactivation de la clause dérogatoire générale du Pacte de stabilité et son éventuelle réforme ne doivent pas être liées. Les discussions sur l’amélioration du cadre de gouvernance économique nécessiteront beaucoup de temps», notent en effet les ministres.

Imposer une consolidation budgétaire

Pour le groupe d’Etats, l’urgence est bien d’imposer une consolidation budgétaire aux pays du Sud de l’Europe et à la France, dans un contexte de retour de la croissance, attendue à 4,8% cette année et 4,5% l’année prochaine en zone euro. «Les mesures budgétaires inédites ont (…) affecté la soutenabilité de la dette dans certains Etats-membres. En particulier (…) là où les niveaux d’endettement étaient déjà élevés auparavant», pointe la lettre. Le ratio d’endettement en Grèce a dépassé les 200% du PIB, celui de l’Italie frôle les 160%, quand ceux de la France et de l’Espagne approchent 120%.

Plus que les négociations sur les contours d’une éventuelle réforme qui pourraient bien s'éterniser, l’enjeu des prochains mois devrait plutôt être de déterminer les modalités selon lesquelles le PSC sera réactivé début 2023, et donc de définir la stratégie en matière de politique budgétaire à adopter en sortie de crise.

Une réintroduction du pacte sans aménagement, et en particulier de la règle visant à atteindre une dette publique sous les 60% du PIB, impliquerait une diminution drastique des investissements publics dans les pays les plus endettés. «Nous devons nous pencher sur cette règle et travailler à quelque chose qui permettra la réduction de la dette et des déficits mais qui restera réaliste pour tous les Etats», a reconnu samedi le vice-président exécutif de la CE Valdis Dombrovskis.

Résistances sur la réforme de la fiscalité internationale

«Les lignes ont bougé, certains seront plus frugaux que d’autres dans la discussion, mais certainement avec des positions moins idéologiques, car chacun a retenu les leçons de la crise précédente», assurait un diplomate européen en amont de la réunion. Le débat ne fait que commencer et il s’annonce néanmoins passionné.

Les ministres se sont également entretenus au sujet du projet de réforme du système fiscal international signé début juillet. Les trois Etats qui n’ont pas apporté leur soutien au projet n’ont pas pour l’heure changé de position. «Nous espérons convaincre ces trois Etats d’ici octobre», a glissé Valdis Dombrovskis, l’objectif étant de lever ces résistances avant le sommet du G20, qui se tiendra à Rome, les 30 et 31 octobre, lors duquel l’accord doit être finalisé.

Les 27 ont enfin poursuivi les pourparlers concernant des propositions de régulation des crypto-actifs formulées par Bruxelles en septembre 2020et notamment au sujet du règlement sur les marchés de crypto-actifs (MICA). «Il existe une forte convergence de vue au Conseil pour avoir une régulation assez stricte, alors que, dans sa proposition, la Commission avait plus misé sur la souplesse pour faciliter l’innovation», a résumé une source diplomatique.

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