Le carbone est un enjeu de concurrence dans le pétrole

Shell se fixe à son tour des objectifs de baisse de son empreinte carbone.
Antoine Landrot

Le secteur des hydrocarbures, en première ligne dans les émissions de CO2, est un peu plus perméable aux demandes environnementalistes. Shell a annoncé hier sa décision de fixer des objectifs à court terme de réduction de l’empreinte carbone de ses produits, qui seront intégrés à la rémunération des dirigeants. La compagnie pétrolière anglo-néerlandaise s’était jusqu’à présent refusé à le faire. Son directeur général Ben van Beurden estimait jusqu’ici qu’il serait «téméraire» que Shell prête ainsi le flanc à des risques de poursuites judiciaires. Plusieurs groupes d’investisseurs, comme ShareAction, avaient reproché la décision du groupe l’année dernière de fixer des «ambitions» à long terme, en l’occurrence la réduction de 50% de ses émissions de carbone en 2050 et d’«environ 20%» en 2035, sans prévoir de mécanisme contraignant.

La décision de Shell fait suite aux discussions menées avec des représentants de Climate Action 100+, un groupe composé de 310 investisseurs et qui revendique plus de 32.000 milliards de dollars d’actifs sous gestion.

Concrètement, la compagnie fixera chaque année à partir de 2020 et jusqu’en 2050 des objectifs à trois et cinq ans concernant l’empreinte carbone. «Shell a l’intention de lier ces objectifs, ainsi que d’autres mesures, à la politique de rémunération de ses dirigeants. La politique de rémunération révisée sera soumise au vote des actionnaires à l’assemblée générale de 2020», indique le groupe. Dix pourcents de la rémunération des dirigeants sont déjà partiellement conditionnés à la réduction des émissions des activités du groupe (Scopes 1 et 2, selon la nomenclature en vigueur). Les nouveaux objectifs vont plus loin, précise Shell : ils intégreront le CO2 émis par les clients utilisant son carburant – soit des émissions de Scope 3.

Shell indique qu’il passera en revue les engagements nationaux des Accords de Paris et les scénarios de trajectoires de «décarbonation» tous les cinq ans pour «ajuster ses ambitions» avec celles de la société. Il a également lancé une étude pour s’assurer qu’il ne finance pas des groupes qui pourraient compromettre ses objectifs, étude qui sera publiée au premier trimestre 2019.

Sur la sellette au même titre que les producteurs d’électricité, les compagnies pétrolières tentent de redorer leur blason environnemental. Quitte à ce que cela devienne un élément de concurrence. Total et BP, concurrents français et britannique de Shell, avaient pris de l’avance sur le groupe anglo-néerlandais en fixant des objectifs à court terme. Mais Shell va cette fois-ci plus loin, puisque les objectifs de ses rivaux étaient limités au scope 1 et 2.

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