
L’AMF attend des clarifications du code Afep-Medef

Fort des progrès accomplis par les entreprises en matière de gouvernement d’entreprise, l’Autorité des marchés financiers (AMF) a préféré cette année approfondir un sujet d’actualité dans son seizième rapport annuel sur le gouvernement d’entreprise : le dialogue actionnarial. «Cette thématique, l’une des priorités de l’AMF, fait écho au débat actuel sur l’activisme, confie Astrid Milsan, secrétaire générale adjointe à l’AMF. Toutefois, nous avons continué à souligner dans notre rapport les faits saillants de non-conformité, et maintenu notre politique du ‘name and shame’ sur les 40 sociétés étudiées, les 20 plus grandes et les 20 plus petites du SBF 120».
L’AMF étudie le dialogue actionnarial, à la fois au sein du conseil, avec les actionnaires, et en assemblée générale. Pour le conseil d’administration, le régulateur se félicite du taux d’indépendance (49% dans les sociétés contrôlées et 68% dans les sociétés non contrôlées) supérieur aux exigences du code Afep-Medef, de respectivement 33% et 50%. Toutefois, «nous avons peu de détails dans l’échantillon étudié sur le processus de sélection des administrateurs, sur la mise en concurrence des cabinets de chasse de tête puis des candidats retenus, alors que, par exemple, le code britannique exige le détail du processus de recrutement mené par le comité des nominations», poursuit Astrid Milsan. Aussi, l’AMF invite le Haut Comité de gouvernement d’entreprise (HCGE), qui doit prochainement publier son rapport annuel, à réaliser une étude sur les processus de sélection, de proposition et de nomination des administrateurs, et demande à l’Afep et au Medef de réfléchir aux informations qu’il serait utile de rendre publiques. En clair de rendre le code plus exigeant.
Pour mieux encadrer la gestion des conflits d’intérêts, l’AMF estime souhaitable que l’Afep, le Medef ou le HCGE clarifient les éléments d’appréciation de l’indépendance d’un actionnaire qui détiendrait plus de 10% du capital ou des droits de vote de la société. «Si le HCGE a pu se saisir de tel ou tel dossier, cela reste non public. Nous demandons clarté et transparence de la règle des 10%», ajoute Astrid Milsan. Le régulateur constate que les explications fournies pour justifier de l’indépendance d’un administrateur siégeant depuis plus de 12 ans restent très subjectives.
«La gestion des conflits d’intérêts au sein des conseils pose toujours problème, certaines sociétés ne respectant pas les dispositions du code stipulant que les administrateurs en situation de conflits d’intérêts ne participent ni au vote, ni aux débats, ni n’assistent aux débats», poursuit Astrid Milsan. Dans son échantillon, l’AMF constate que six sociétés n’ont pas adapté leur règlement intérieur à cette règle introduite par le code en juin 2018. Si cinq sociétés ont déjà modifié leur règlement ou se sont engagées à le faire avant la fin de l’année, Mercialys n’a toujours «pas fourni d’explications satisfaisantes».
LA PLACE DOIT RÉFLÉCHIR AU RÔLE DES CENSEURS
Le développement de la présence de censeurs dans les conseils soulève des interrogations. «Les censeurs n’ont pas de statut juridique et ne sont donc pas toujours soumis aux règles de conflits d’intérêts et sur l’information privilégiée, qui s’imposent aux administrateurs, constate Astrid Milsan. Aussi, nous recommandons aux sociétés de s’assurer que leurs censeurs connaissent la réglementation abus de marché et que des mesures de gestion des conflits d’intérêts soient mises en place. Plus largement, nous invitons la Place à mener une réflexion sur le rôle des censeurs. »
Dans le cadre du dialogue permanent avec les actionnaires, l’AMF recommande que les présentations faites lors des «roadshows gouvernance» soient mises en ligne sur le site internet de la société. Mais, «notre objectif n’est pas d’exiger une transparence totale des échanges qui nuirait au dialogue avec les investisseurs, soucieux de la confidentialité de leurs entretiens avec les sociétés, précise Astrid Milsan. Nous notons déjà les réels efforts fournis par les sociétés pour mener ce dialogue. Parmi notre échantillon, 26 sociétés sur 40 ont désigné un interlocuteur entre les actionnaires et le conseil».
Par ailleurs, lorsqu’une résolution est contestée en assemblée générale – i.e. votée à moins de 80% – l’AMF recommande aux sociétés de s’interroger sur l’opportunité d’une communication sur les positions éventuellement arrêtées par le conseil à la suite de ce vote. «Nous voulons avant tout nous assurer que les process soient bien en place et que les conseils se saisissent réellement des sujets qui ont fait débat en AG, ajoute Astrid Milsan. Les proxys sont très en attente de cette communication. »
Lors du dialogue en assemblée générale, de gros efforts ont été réalisés en matière d’information, mais des progrès restent à faire sur «la lisibilité de l’information fournie sur la politique de rémunération des dirigeants et sur les conventions réglementées».
ENCADRER LES RÉMUNÉRATIONS DE LONG TERME EN ACTIONS
L’AMF invite aussi le patronat et le HCGE à étudier les pratiques internationales sur le sujet de la rémunération des dirigeants en cas de cession de titres par un actionnaire, et à réfléchir aux mesures à prendre dans de telles situations. «Nous comprenons la logique des fonds de private equity qui incitent le dirigeant à obtenir une liquidité pour leur participation, mais ces contrats posent les questions d’égalité d’information entre les actionnaires et de conflits d’intérêts potentiels», précise Astrid Milsan.
Pour l’AMF, trop de sociétés qualifient d’indépendants des administrateurs siégeant plus de douze ans. «Nous ne sommes convaincus par aucune explication», confie Astrid Milsan. L’AMF rappelle qu’au Royaume-Uni et en Italie, la qualification d’indépendance est remise en cause dès neuf années. En outre, le gendarme constate une nouvelle fois que Carrefour ne respecte pas le code avec un administrateur référent non indépendant
Avec la hausse des marchés actions cette année, les rémunérations long terme soulèvent de nouvelles questions. «Les niveaux atteints ne sont souvent plus ceux imaginés lors de l’attribution des actions, explique Astrid Milsan. Aussi, nous invitons les sociétés à réfléchir à un plafond ex-ante, ou à une possibilité de révision, prévue dès l’attribution, en cours de mandat en fonction de l’évolution du cours de Bourse, ce qui se fait au Royaume-Uni. »
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