«La féminisation des comex est un tournant vertueux pour la compétitivité des entreprises au profit de tous»

Louise Kyhl Triolo, ‘principal’ chez Heidrick & Struggles

Louise Kyhl Triolod, ‘principal’ chez Heidrick & Struggles

La loi Rixain, adoptée il y a un an, marque un tournant historique pour les politiques de diversité & inclusion des entreprises françaises. A l’heure où environ 25 % des membres des comex du SBF120 sont des femmes et uniquement 14 %* d’entre elles occupent des fonctions de direction opérationnelle, le texte induit une évolution profonde des stratégies de recrutement des sociétés, dont les règles du jeu changent drastiquement.

Dans la perspective d’atteindre l’objectif fixé par la loi de 40 % de femmes dans les comex d’ici à 2030, les entreprises de l’indice – dont 91 % étaient encore en dessous du seuil réglementaire début 2022 – vont ainsi devoir trouver les leviers pour identifier, attirer et fidéliser les talents féminins. Et ce, en leur proposant un environnement professionnel attractif, adapté à l’épanouissement et à l’engagement de toutes et tous.

Au-delà des enjeux de conformité réglementaire, ce nouveau contexte recèle donc de très nombreuses opportunités. L’accélération du recrutement et du développement des talents féminins doit aussi être perçue non seulement comme l’occasion d’intégrer de nouveaux profils et de nouvelles compétences au sein des effectifs, mais aussi de renouveler plus largement les équipes, au sein des instances de direction comme ailleurs dans l’organisation. Plus encore, elle doit permettre la création d’escaliers internes permettant aux femmes et aux personnes issues des minorités d’avoir des trajectoires ascendantes plus systématiques au sein des sociétés. Capitaliser sur ce momentum nécessite donc une refonte des parcours et des processus au sein de l’entreprise pour initier des changements majeurs dans la gestion et la rétention des talents.

En effet, la compétition pour recruter les meilleurs profils féminins (comme masculins) s’annonce rude dans les mois et années à venir, en raison de différentes dynamiques démographiques et sociétales.

Raréfaction des candidats

Au-delà du départ massif des « baby-boomers » à la retraite, qui rend nécessaire une transition générationnelle d’ampleur, la « grande démission » qui touche toutes les entreprises rebat aussi les cartes. Beaucoup d’employeurs voient ainsi un grand nombre de leurs talents, même parmi les plus prometteurs, quitter leur poste pour s’installer en freelance, en entrepreneurs, changer de métier ou se consacrer à leur famille. En conséquence, la gestion de la raréfaction des profils disponibles est devenue une question majeure pour les sociétés, qui doivent plus que jamais affirmer leur attractivité pour rester compétitives.

A cet égard, les prochains mois seront vraisemblablement décisifs avec, à terme, la désignation d’entreprises « gagnantes », qui auront su prendre la mesure de cette problématique et s’adapter pour rester attractives, et d’autres, plus en retard, qui pourraient devenir des « terrains de chasse » pour leurs concurrents. Et ce, tout particulièrement en ce qui concerne les profils féminins expérimentés, dont la rareté ne fait qu’accentuer la concurrence à l’heure où la pression des parties prenantes (actionnaires, investisseurs, salariés, médias…) sur la question de la parité continue de se renforcer.

Un enjeu culturel avant tout

Cette situation invite bien évidemment les entreprises à faire preuve de plus de volontarisme en matière de recrutement, ce qui passe par un effort d’ouverture, un langage repensé et un élargissement aussi important que possible du spectre des candidats ciblés – au-delà des secteurs ou parcours académiques traditionnels. Pour autant, de tels ajustements ne suffisent pas : l’attraction et la fidélisation des talents relèvent en grande partie d’enjeux culturels au sein de l’organisation.

En effet, c’est uniquement à la condition de proposer un environnement réellement inclusif que les sociétés pourront retenir l’attention des candidats et continuer de bénéficier d’équipes engagées et performantes au service de leur croissance. La création de cet environnement doit faire l’objet d’un vrai investissement de la part de l’entreprise. Il a vocation à permettre un « sens de la communauté » et une raison d’être inspirante, tout en proposant une organisation pleinement à l’écoute des besoins et initiatives de chacune et chacun. Par ce biais pourra enfin se créer un cercle vertueux mettant fin aux préjugés et blocages culturels sous toutes leurs formes, comme nombre de candidates et candidats l’appellent de leurs vœux.


NOTE
*Etude Mixité au Sommet 2022, Heidrick & Struggles.

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