
L’impact des cyberattaques est plus fort pour les entreprises non cotées

Les cyberattaques visant des entreprises françaises (CMA CGM, Eurofins, Sopra Steria…) se sont accentuées au cours des derniers mois avec la crise sanitaire liée au Covid-19. Selon une étude publiée mercredi par Bessé, société de courtage en assurances, «les attaques par rançongiciel ont progressé de 25% au premier trimestre 2020 et les attaques externes sur les comptes ‘cloud’ ont bondi de 630% de janvier à avril 2020». Si les effets d’une cyberattaquesont plus facilement visibles sur les entreprises cotées en Bourse, ils peuvent être in fine plus importants pour les entreprises non cotées qui ont un accès plus difficile à desfinancements à long terme en fonds propres ou par le biais du crédit. Ces dernières n’ont de surcroît pas les mêmes obligations de transparence que leurs homologues cotées et une pression actionnariale plus limitée favorise le choix d’un profil d’exposition plus risqué.
Recul en Bourse
«Ayant un impact à la fois stratégique, technique et financier, les attaques cyber ont des conséquences qui affectent véritablement la viabilité des entreprises», relève Pierre Bessé, président de la société de courtage. Dans une précédente étude portant sur un échantillon de 30 entreprises françaises cotées victimes d’une cyberattaque, un recul moyen de 9% du cours de Bourse a été constaté à l’issue d’un mois dans 63% des cas. Ce groupe s’est ensuite séparé en deux catégories. Une proportion de 40% des entreprises du panel ont enregistré une baisse moyenne de 19,5% de leur valorisation boursière 12 mois après l’incident, alors que les 23% restants affichaient à cette échéance un rebond moyen de 5,7% de leur cours de Bourse par rapport au niveau initial.
Pour les sociétés non cotées, l’impact financier d’une cyberattaque a cette fois pu être évalué par l’examen du risque de défaillance ou des retards de paiement, ce qui a permis de pallier l’absence d’informations de marché. A partir de données émanant d’Altares/Dun & Bradstreet, l’analyse menée par Bessé sur 30 incidents ayant touché à parts égales des PME et ETI françaises et étrangères entre 2017 et 2019 fait ressortir une augmentation de moitié du taux de défaillance trois mois après l’attaque et cette hausse demeure comprise entre 40 et 50% durant les trois mois suivants. Si l’on restreint l’échantillon aux seules sociétés françaises, la détérioration de la situation est à la fois plus forte et plus rapide. «L’augmentation de la probabilité de défaillance comparée au mois avant l’annonce de l’incident est de 70% dès le premier mois et atteint 88% au bout du sixième mois», souligne l’étude.
Un effet de latence plus important a été observé sur le critère des délais de paiement. La dégradation commence trois mois après l’annonce du cyber-incident et le nombre de jours de retard de paiement augmente de 55% au bout de six mois. La probabilité accrue d’un recours à une procédure collective contribue logiquement à amoindrir la valeur patrimoniale des entreprises françaises non cotées. Cette perte de valeur est estimée à 8,5% au bout de trois mois et de 9,5% six mois après la cyberattaque pour une entreprise dont la croissance moyenne est de 3% par an.
Détérioration potentielle de la réputation
A ce risque financier s’ajoute une détérioration potentielle de la réputation de l’entreprise qui constitue pourtant l’un de ses actifs immatériels les plus précieux. Le recours grandissant au télétravail, la montée en puissance de l’intelligence artificielle et des transferts de données mobiles à très haut débit (5G, objets connectés) contribueront à accentuer cette menace et à rendre les exercices de simulation de crise aussi importants que les tests d’intrusion. L’ONU a estimé le mois dernier que le coût de la cybercriminalité représenterait près de 4.400 milliards d’euros pour l’économie mondiale d’ici à 2025.
Il semble donc nécessaire d’augmenter la capacité de résistance des entreprises à ce type d’attaques afin de garantir leur pérennité. Cette «cyber-résilience» constitue d’ailleurs un facteur de différenciation opérationnelle et concurrentielle. D’autre part, une meilleure organisation du transfert du risque résiduel aux compagnies d’assurances permettra d’indemniser les entreprises couvertes et de préfinancer les dépenses liées à la gestion de ce type de crise. Ceci obligera les assureurs à procéder à une cartographie des risques cyber qui, en devenant systémiques, devront à terme être couverts à la fois par le marché privé et par les Etats, à l’image de ce qui a été mis en place pour les catastrophes aériennes après les attentats de septembre 2001 aux Etats-Unis.
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Immigration clandestine : raid policier dans une usine Hyundai-LG aux Etats-Unis, près de 500 arrestations
Washington - Près de 500 personnes, dont une majorité de Sud-Coréens, ont été arrêtées par la police de l’immigration dans une usine de fabrication de batteries des groupes sud-coréens Hyundai et LG dans l’Etat de Géorgie (sud-est), soupçonnées de travailler illégalement aux Etats-Unis. Le raid, mené jeudi, résulte d’une «enquête pénale liée à des accusations de pratiques d’embauche illégales et à de graves infractions fédérales», a expliqué vendredi Steven Schrank, un agent du service d’enquêtes du ministère américain de l’Intérieur, au cours d’une conférence de presse. Il s’agit de «la plus importante opération des forces de l’ordre sur un même site de toute l’histoire du service des +Homeland Security Investigations+ (+Enquêtes sur la sécurité intérieure+)», a-t-il affirmé, s’exprimant d’Atlanta, dans l’Etat de Géorgie. Les 475 personnes arrêtées dans cette usine, située dans la ville d’Ellabell, se «trouvaient aux Etats-Unis de manière illégale» et «travaillaient illégalement», a affirmé M. Schrank, soulignant que la «majorité» d’entre elles étaient de nationalité sud-coréenne. Sollicité par l’AFP aux Etats-Unis, le constructeur automobile a répondu être «au courant du récent incident» dans cette usine, «surveiller étroitement la situation et s’employer à comprendre les circonstances spécifiques» de cette affaire. «A ce stade, nous comprenons qu’aucune des personnes détenues n'était directement employée par le groupe Hyundai», a-t-il poursuivi, assurant donner «priorité à la sécurité et au bien-être de quiconque travaille sur ce site et au respect de toutes les législations et réglementations». De son côté, LG Energy Solution a affirmé suivre «de près la situation et recueillir toutes les informations pertinentes». «Notre priorité absolue est toujours d’assurer la sécurité et le bien-être de nos employés et de nos partenaires. Nous coopérerons pleinement avec les autorités compétentes», a ajouté cette entreprise. La Corée du Sud, la quatrième économie d’Asie, est un important constructeur automobile et producteur de matériel électronique avec de nombreuses usines aux Etats-Unis. Mission diplomatique Une source proche du dossier avait annoncé quelques heures plus tôt, de Séoul, qu’"environ 300 Sud-Coréens» avaient été arrêtés pendant une opération du Service de l’immigration et des douanes américain (ICE) sur un site commun à Hyundai et LG en Géorgie. De son côté, l’agence de presse sud-coréenne Yonhap avait écrit que l’ICE avait interpellé jusqu'à 450 personnes au total. Le ministère sud-coréen des Affaires étrangères avait également fait d'état d’une descente de police sur le «site d’une usine de batteries d’une entreprise (sud-coréenne) en Géorgie». «Plusieurs ressortissants coréens ont été placés en détention», avait simplement ajouté Lee Jae-woong, le porte-parole du ministère. «Les activités économiques de nos investisseurs et les droits et intérêts légitimes de nos ressortissants ne doivent pas être injustement lésés dans le cadre de l’application de la loi américaine», avait-il poursuivi. Séoul a envoyé du personnel diplomatique sur place, avec notamment pour mission de créer un groupe de travail afin de faire face à la situation. Les autorités sud-coréennes ont également fait part à l’ambassade des Etats-Unis à Séoul «de (leur) inquiétude et de (leurs) regrets» concernant cette affaire. En juillet, la Corée du Sud s'était engagée à investir 350 milliards de dollars sur le territoire américain à la suite des menaces sur les droits de douane de Donald Trump. Celui-ci a été élu pour un second mandat en novembre 2024, en particulier sur la promesse de mettre en oeuvre le plus important programme d’expulsion d’immigrés de l’histoire de son pays. Depuis, son gouvernement cible avec la plus grande fermeté les quelque onze millions de migrants sans papiers présents aux Etats-Unis. Au prix, selon des ONG, des membres de la société civile et jusqu’aux Nations unies, de fréquentes violations des droits humains. D’Atlanta, le Bureau de l’alcool, du tabac, des armes à feu et des explosifs (ATF) a expliqué sur X avoir participé à l’arrestation d’environ 450 «étrangers en situation irrégulière» au cours d’une opération dans une usine de batteries, une coentreprise entre Hyundai et LG. Selon son site internet, Hyundai a investi 20,5 milliards de dollars depuis son entrée sur le marché américain en 1986 et compte y investir 21 milliards supplémentaires entre 2025 et 2028. L’usine d’Ellabell a été officiellement inaugurée en mars, avec l’objectif de produire jusqu'à 500.000 véhicules électriques et hybrides par an des marques Hyundai, Kia et Genesis. Elle devrait employer 8.500 personnes d’ici à 2031. © Agence France-Presse