Les actions sud-africaines font fi des difficultés économiques locales

La Bourse de Johannesburg est à un plus haut historique alors que l’économie d’Afrique du Sud est à la peine.
Xavier Diaz
Bourse de Johannesburg (JSE) Afrique du Sud
L’indice phare de la Bourse de Johannesburg (JSE) a plus que doublé depuis mars 2020.  -  Photo JSE

L’Afrique du Sud et le Royaume-Uni ont non seulement en commun la langue mais aussi la particularité d’avoir un marché actions déconnecté de la réalité économique du pays. Alors que la plus grande économie du continent africain se démène face à une crise énergétique qui affaiblit sa croissance depuis des années, la Bourse de Johannesburg continue de battre des records.

L’indice FTSE JSE All Shares a atteint jeudi un nouveau plus haut historique à 80.509 points. Il progresse de 10,2% depuis le début de l’année et de 27% depuis son dernier point bas en septembre 2022. Il a plus que doublé depuis mars 2020. L’indice FTSE JSE Top 40, plus concentré, est également à un plus haut historique. A l’instar de la Bourse de Londres, et plus particulièrement l’indice FTSE 100, le marché actions sud-africain est très international avec une forte pondération en valeurs minières. Or, la perspective d’une réouverture de la Chine, avec l’abandon de la politique zéro-Covid, soutient les matières premières et les valeurs minières.

Par ailleurs, l’assouplissement des contraintes sur le secteur technologique chinois a également joué sur la bonne tenue de la Bourse de Johannesburg dont deux des principales valeurs sont Naspers et sa filiale Prosus qui détiennent 27% du capital de Tencent. La pause anticipée du resserrement monétaire de la Fed est également un facteur favorable, d’autant qu’une baisse du dollar favorise aussi l’or et les mines.

Secteur énergétique en berne

Pourtant l’économie sud-africaine est loin d’être florissante. Elle est obérée depuis près de 15 ans par une grave crise énergétique. La compagnie nationale d’électricité, Eskom, est minée par de multiples dysfonctionnements (problème de production de ses centrales à charbon, notamment) dans un contexte de corruption et d’ingérence politique qui empêche toute réforme. La situation a empiré cette année avec des délestages d’électricité dans certaines régions qui ont duré jusqu’à 12 heures par jour en juillet (en plein hiver dans l’hémisphère sud).

Les problèmes d’exploitation d’Eskom sont notamment dus à son énorme dette de plus de 23 milliards de dollars. Le gouvernement s’est engagé à reprendre entre un tiers et deux tiers de cette dernière. Il annoncera le montant qu’il compte prendre à sa charge lors de la présentation le 22 février du nouveau budget, avec pour contrainte de ne pas obérer sa propre situation financière.

Pause de la banque centrale

La situation est tellement critique qu’elle a contraint la banque centrale à réduire drastiquement le rythme de ses hausses de taux, jeudi avec l’annonce une hausse de seulement 25 points de base (après trois hausses consécutives de 75 pb) de son principal taux directeur à 7,25% (l’inflation est à un plus haut de 13 ans à 7,2% en décembre) alors que les économistes anticipaient 50 pb. Cela suggère une pause dans la hausse des taux.

Le gouverneur de la banque, Lesetja Kganyago, a justifié cette moindre hausse par des perspectives sombres pour l’économie sud-africaine en raison de la crise chez Eskom qui retrancherait 2 points de croissance cette année. La banque anticipe désormais une croissance de seulement 0,3% en 2023 (+1,1% lors de sa prévision en novembre) et 0,7% en 2024 (contre +1,4%). Le gouvernement s’est aussi engagé à mettre en place des mesures d’urgence pour palier les délestages. Mais dans un contexte politique toujours difficile, en raison de la corruption notamment, l’ANC, le parti au pouvoir depuis des années craint de perdre les élections l’an prochain.

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