« Le reste à charge, pour les ménages, demeure énorme »

La parole à Martine Vignau, vice-présidente du Conseil économique social et environnemental*
Annick Masounave

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Martine Vignau, vice-présidente du Conseil économique social et environnemental*

Quels constats de départ vont guider vos travaux sur la dépendance ?

Tout d’abord, il existe une multitude d’acteurs du financement de la perte d’autonomie – mutuelles, Caisse nationale d’assurance vieillesse (Cnav), complémentaires santé, conseils départementaux (voir l’illustration page 17, NDLR)... Malgré ces financements multiples, le reste à charge, pour les ménages, demeure énorme. La Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) devrait être la garante de l’équité. Cependant, elle ne dispose pas des ressources suffisantes pour remplir cette mission d’accompagnement. Elle n’est pas une caisse de sécurité sociale comme les autres : elle n’a pas de relais territoriaux et ne peut qu’observer ce que font les conférences de financeurs dans les départements. Je ne pense donc pas qu’il soit nécessaire d’inventer autre chose, les manques doivent pouvoir être comblés avec les structures déjà en place, par des mécanismes qui améliorent et facilitent la prise en charge.

Quelles pistes entrevoyez-vous pour faire face à l’augmentation inévitable des dépenses ?

A l’heure actuelle, l’augmentation des cotisations est une option que beaucoup refusent de considérer. Cependant, compte tenu de l’évolution démographique – 2 millions de personnes sont actuellement en perte d’autonomie, elles seront le double en 2030, c’est-à-dire demain –, cette question devra être étudiée. A titre personnel, je suis également favorable à une réforme des droits de mutation. Pour les personnes à faibles revenus, l’allocation hébergement assortie d’un recours succession est appliquée différemment par les départements. Certains se tournent même vers les petits-enfants, qui sont en général en recherche d’emploi ou en train de construire leur avenir. Il conviendrait de revoir ces dispositions, voire de les supprimer.

Nous sommes face à une explosion démographique, celle des baby-boomers. La réforme des retraites ne permettra pas de répondre à ces besoins de financement. Ce ne sont pas des soins médicaux mais des soins d’accompagnement, ce qui est très différent.

Quelle pourrait être la contribution des compagnies d’assurances ou des mutuelles à une réforme du système ?

Les assureurs n’ont pas développé beaucoup de produits destinés à prendre en charge la perte d’autonomie, sans doute pour des questions de coûts. J’attends leurs explications dans le cadre du groupe de travail. Ensuite, les produits existants ont été souscrits par des personnes qui disposent déjà d’un capital. Un rapport publié en 2017 montrait que les populations à faibles revenus – inférieurs à 1.500 euros – sont prises en charge, pour une part importante, par tous les mécanismes de solidarité. La tranche supérieure, avec des revenus allant de 1.500 et 2.500 euros, est la plus en difficulté et se retrouve avec un reste à charge très important : elle n’a sans doute pas eu la possibilité de souscrire des produits d’épargne supplémentaires, et les mécanismes de solidarité sont beaucoup moins généreux.

*Rapporteure de l’avis « Quel financement de la perte d’autonomie ? » dont les travaux débuteront au mois de septembre 2023.

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