
Le patronat invite les agences de notation extra-financière à plus de transparence

Pour un meilleur dialogue entre émetteurs et agences de notation extra-financière. Le Medef et l’Afep, en partenariat avec le Cliff (association des professionnels de la communication financière) et le C3D (collège des directeurs du développement durable) viennent de publier un manifeste prônant des recommandations aux agences de notation et à la Commission européenne. «Depuis plus d’un an, nous travaillons avec les entreprises, les agences de notation extra-financière et les investisseurs, explique Elisabeth Gambert, directrice RSE et Affaires internationales à l’Afep. Nos recommandations reprennent les meilleures pratiques du secteur, aussi nous estimons qu’elles sont applicables par toutes les agences».
Fort d’un dialogue avec le Medef et l’Afep, «nous avons émis au début du mois 12 engagements à l’égard des 4.800 organismes, dont 250 français, – entreprises cotées et émetteurs obligataires – que nous notons, précise Fouad Benseddik, directeur des relations institutionnelles de Vigeo Eiris. Des engagements qui répondent en grande partie aux recommandations» du Medef et de l’Afep. «Nous nous félicitons de cette volonté d’améliorer le dialogue entre émetteurs et agences de notation extra-financière, confie Emmanuel de La Ville, directeur général d’EthiFinance. Nous regrettons toutefois que l’agence des PME et ETI n’ait pas été consultée et nous réfléchissons à un droit de réponse. A la différence d’autres agences, EthiFinance applique déjà les recommandations proposées, avec notamment une politique d’indépendance entre nos métiers d’analyse et de conseil revue annuellement par notre conseil d’administration». Concentrés sur le SBF 120, «pour cette raison nous n’avons pas interrogé EthiFinance», explique Elisabeth Gambert.
La gratuité fait débat
Sur la base d’une enquête réalisée auprès de la moitié du SBF 120, le patronat préconise des mesures pour améliorer la transparence, la qualité des notations et les contraintes des entreprises. Le manifeste fixe ainsi huit recommandations pour les agences. En commençant par demander l’indépendance entre les activités d’analyse et de conseil ; une transparence sur les méthodologies de notation (critères et pondérations) ; et l’obtention gratuite pour l’entreprise évaluée des résultats complets de sa notation. «Il est souhaitable de parvenir à la transparence la plus grande possible, et que les émetteurs aient accès à leur note détaillée finale, même si nous sommes conscients que l’agence ne peut dévoiler toute sa méthodologie. Il faut trouver le juste milieu, ajoute Elisabeth Gambert. Sans nous prononcer sur le business model de ces agences de notation, nous estimons que la note d’analyse doit être transmise à l’entreprise afin qu’elle puisse s’en servir comme outil de pilotage». Une position qui fait débat. «Nous donnons les grandes lignes de notre méthode d’analyse, capital d’EthiFinance, mais ne pouvons pas la dévoiler entièrement pour ne pas donner d’informations à la concurrence, précise Pierre-Yves Le Stradic, directeur de la recherche d’EthiFinance. Nous avons fait le choix de la gratuité. Nous donnons notre analyse à la société ainsi que des éléments de benchmark, véritables outils de pilotage pour les entreprises». En revanche, «nous sommes opposés à la gratuité de notre analyse pour l’émetteur, confie Fouad Benseddik. Nous la donnons seulement à notre interlocuteur au sein de la société, mais il doit s’engager à ne pas la communiquer et à ne pas en faire un outil de gestion interne. Nous distinguons le droit à l’accès à l’information et le droit d’usage de l’information».
Une pré-collecte de l’information demandée
Parmi les autres recommandations figurent : une meilleure qualité du processus de collecte de l’information ; un délai de revue raisonnable du pré-rapport assorti d’un possible échange avec l’analyste ; une stabilité des méthodologies et des équipes en charge de la notation ; une prise en compte des enjeux sectoriels et des réglementations nationales, avec une systématisation du principe «se conformer ou expliquer» ; et enfin une transparence de la méthodologie de gestion des controverses. Dans cette gestion des controverses, «l’Afep voudrait que l’agence ne prenne pas position, avant que le fait litigieux soit résolu, explique Fouad Benseddik. Mais notre rôle est d’avertir nos clients investisseurs sur le risque pesant sur l’émetteur, qui peut d’ailleurs conduire à modifier notre note ». Plus globalement, «la qualité de notre relation avec les entreprises est primordiale, afin de fournir une analyse de qualité à nos clients investisseurs, rappelle Pierre-Yves Le Stradic. Nous avons notamment mis en place depuis deux ans une précollecte de l’information pour les 800 PME et ETI cotées que nous suivons». De quoi répondre aux attentes des émetteurs. «Les entreprises ploient sous le nombre de questionnaires envoyés par ces agences, alors qu’elles publient déjà beaucoup de documentation, et désirent mieux connaître les règles du jeu sur la notation», constate Elisabeth Gambert.
Vers un code de conduite européen
Par ailleurs, les quatre signataires du manifeste recommandent à la Commission européenne de demander aux agences de notation extra-financière de se doter d’un code de bonne conduite soumis au principe «se conformer ou expliquer» ; et d’adopter un cadre juridique adapté imposant un minimum de transparence. «Avec le plan d’action en matière de finance durable, et son volet sur la recherche ESG, la Commission européenne offre une fenêtre pour réfléchir à un code de conduite, à l’instar de ce qui avait été fait pour les proxys dans le cadre de la directive droit des actionnaires», poursuit Elisabeth Gambert. Toutefois, «comment rédiger un code de conduite commun, alors que les agences ont des modèles très différents, notamment MSCI et S&P Trucost ? s’interroge Pierre-Yves Le Stradic. Cette ambition nous semble souhaitable mais prématurée». En outre, «nous sommes favorables à un code de conduite pour tous les acteurs qui produisent de l’analyse, pas uniquement pour les agences de notation extra-financière !», conclut Fouad Benseddik.
Plus d'articles du même thème
-
Altrad transforme l’essai avec son émission obligataire inaugurale
Dans la foulée de l’annonce de sa notation BBB- par S&P, le groupe a levé 1,25 milliard d’euros en deux tranches à 4 et 7 ans. -
L’Edhec dévoile son agence de notation dédiée à l’impact financier des risques climatiques
Scientific Climate Ratings, dirigé par Rémy Estran-Fraioli, repose sur les travaux de recherche de l’Edhec Climate Institute et attribue des notations prospectives. -
Altrad se dote d’une notation crédit
Le groupe de services à l’industrie, qui prépare une émission obligataire, s’est vu allouer la note BBB- par S&P.
Sujets d'actualité
ETF à la Une

BNP Paribas AM se dote d’une gamme complète d’ETF actifs
- Boeing essaie de contourner la grève en cours dans ses activités de défense
- Revolut s’offre les services de l’ancien patron de la Société Générale
- Le rachat de Mediobanca menace la fusion des gestions de Generali et BPCE
- Zucman contre Mistral, la France qui perd et la France qui gagne
- La perspective d'une rotation d'actifs chez Safran satisfait les investisseurs
Contenu de nos partenaires
-
L'ambassadeur britannique aux Etats-Unis limogé, pour ses liens avec Jeffrey Epstein
Londres - L’ambassadeur britannique aux Etats-Unis, Peter Mandelson, a été limogé jeudi en raison de ses liens avec le délinquant sexuel américain Jeffrey Epstein, un revers de plus pour le Premier ministre Keir Starmer avant la visite d’Etat de Donald Trump au Royaume-Uni. La pression montait depuis plusieurs jours sur Keir Starmer, qui avait nommé il y a moins d’un an cet architecte du «New Labour» de Tony Blair, pour tenter de consolider les liens entre son gouvernement et la nouvelle administration Trump. Des mails entre le vétéran du parti travailliste de 71 ans et le financier américain, mort en prison en 2019, révélés cette semaine, «montrent que la profondeur et l'étendue des relations de Peter Mandelson avec Jeffrey Epstein sont sensiblement différentes de celles connues au moment de sa nomination», a indiqué le ministère des Affaires étrangères dans un communiqué. «Compte tenu de cela, et par égard pour les victimes des crimes d’Epstein, il a été révoqué comme ambassadeur avec effet immédiat», a ajouté le Foreign Office. Dans une lettre écrite par Peter Mandelson pour les 50 ans de Jeffrey Epstein en 2003, et publiée en début de semaine par des parlementaires à Washington, le Britannique affirme que le financier américain est son «meilleur ami». Interrogé mercredi après la publication de cette lettre, le Premier ministre Keir Starmer lui avait apporté son soutien, assurant que Peter Mandelson avait «exprimé à plusieurs reprises son profond regret d’avoir été associé» à Jeffrey Epstein. Mais cette position est rapidement devenue intenable. En fin de journée mercredi, des médias britanniques, dont le tabloïd The Sun, ont rapporté que M. Mandelson avait envoyé des mails de soutien à Jeffrey Epstein alors que ce dernier était poursuivi en Floride pour trafic de mineures. Juste avant que M. Epstein ne plaide coupable pour conclure un arrangement dans cette affaire en 2008, Peter Mandelson lui aurait écrit: «Je pense énormément à toi et je me sens impuissant et furieux à propos de ce qui est arrivé», l’incitant à "(se) battre pour une libération anticipée». «Je regrette vraiment très profondément d’avoir entretenu cette relation avec lui bien plus longtemps que je n’aurais dû», avait tenté de se défendre l’ambassadeur dans un entretien diffusé mercredi sur la chaîne YouTube du Sun. Il y a affirmé n’avoir «jamais été témoin d’actes répréhensibles» ou «de preuves d’activités criminelles». «Sérieuses questions» «L’affirmation de Peter Mandelson selon laquelle la première condamnation de Jeffrey Epstein était injustifiée et devait être contestée constitue une nouvelle information», a fait valoir le Foreign Office pour expliquer la décision de le limoger. Dans une lettre au personnel de l’ambassade, citée jeudi soir par la BBC, Peter Mandelson affirme que ce poste a été le «privilège» de sa vie. «Je regrette profondément les circonstances qui entourent l’annonce faite aujourd’hui», ajoute-t-il. Les relations entre Londres et Washington sont «en très bonne posture», se félicite l’ex-ambassadeur, disant en tirer une «fierté personnelle» Pour Keir Starmer, ce départ, à une semaine de la visite d’Etat du président Donald Trump au Royaume-Uni les 17 et 18 septembre, est un nouveau coup dur. Le dirigeant travailliste, au plus bas dans les sondages, a déjà dû se séparer il y a quelques jours de sa vice-Première ministre, Angela Rayner, emportée par une affaire fiscale, ce qui a déclenché un remaniement de taille du gouvernement. Trois fois ministre et commissaire européen, Peter Mandelson était le premier responsable politique nommé ambassadeur à Washington, un poste traditionnellement réservé à des diplomates chevronnés. Cet homme de réseaux et d’influence, surnommé le «Prince des ténèbres», était déjà tombé à deux reprises par le passé en raison d’accusations de comportements répréhensibles ou compromettants. La cheffe de l’opposition conservatrice Kemi Badenoch a fustigé le «manque de courage» de Keir Starmer, qui «a encore échoué à un test de son leadership». Marie HEUCLIN © Agence France-Presse -
Ruée vers l'or
Réarmement : le grand bond de l'industrie allemande
Outre-Rhin, entreprises établies comme jeunes pousses spécialisées investissent à tour de bras pour accompagner le réarmement occidental déclenché par le discours de Trump et la guerre en Ukraine -
Editorial
Taxe sur les ultra-riches : les mensonges de Gabriel Zucman
N'en déplaise à son concepteur, sa taxe n'est pas constitutionnelle, car son assiette n'est pas liée aux facultés contributives, puisqu'elle incorpore des revenus qui n'ont pas effectivement été perçus