
Le marché des obligations durables attend d’être testé

La vie n’est pas un long fleuve tranquille pour les sustainability linked bonds (SLB). Ces instruments sont souvent critiqués pour les objectifs peu ambitieux fixés par les émetteurs. Des émetteurs qui peuvent d’ailleurs ne pas les atteindre. Mais ce marché n’a jusque-là pas été réellement testé. Ce ne serait qu’une question de temps.
Plusieurs sociétés confrontées à la crise du gaz en Europe, avec Enel en première ligne, pourraient se retrouver en dehors des clous. L’augmentation de la production d’électricité à partir de charbon pour réduire la dépendance au gaz russe risque d’empêcher d’atteindre les objectifs de réduction d’émissions de CO2. Les analystes de Barclays ont estimé dans une note qu’une vingtaine de ces obligations étaient concernées pour les objectifs à fin 2022 et 2023. L’énergéticien grec PPC mais aussi le chimiste Nobian et le fabricant de freins Knorr Bremser ainsi que la Saur. Avec 12 titres potentiellement dans le viseur, l’énergéticien italien serait le plus touché avec 120 millions d’euros de coûts supplémentaires, selon ces analystes.
Enel est le plus important émetteur de SLB avec environ 25 milliards d’euros émis depuis l’ouverture du marché en 2019 (près de 40% de son endettement). Une clause des obligations prévoit de ne pas augmenter le coût de financement (step-up) si le non-respect des engagements est dû notamment à un changement réglementaire. Alessandro Canta, le directeur financier d’Enel, a indiqué dans une interview à IFR qu’il paierait tout de même le coupon supplémentaire, si les engagements ne sont pas tenus. Le marché semble avoir pris en compte ce risque, les obligations Enel ont perdu en une semaine entre 3 et 4 points de pourcentage. Les rumeurs de limogeage par le gouvernement Meloni du président du groupe, Francesco Starace, véritable artisan de la transformation vers les énergies renouvelables (l’objectif de 60% de capacité fixé dans les SLB à fin 2022 aurait été dépassé, selon la direction du groupe à 64%), n’ont pas contribué à réduire la pression.
Cela n’a toutefois pas empêché Enel d’émettre le 13 février deux nouvelles tranches de SLB de 1,5 milliard d’euros sursouscrites trois fois. En début d’année, Barclays estimait que les émissions SLB allaient reculer cette année au profit des green bonds considérés comme plus qualitatifs. Pour l’heure ce n’est pas la tendance. Depuis janvier, les corporates européens ont émis plus de SLB (24,5 milliards d’euros) que de green bonds (15 milliards) sur un total de 60 milliards émis.
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