
Le futur gouverneur de la Banque du Japon accepte un poste difficile

Comme souvent, la Banque du Japon (BoJ) a surpris les marchés. Le choix du gouvernement pour le futur gouverneur de l’institution devait avoir lieu ce vendredi 10 février. Trois candidats étaient donnés favoris : Masayoshi Amamiya, Hiroshi Nakaso et Hirohide Yamaguchi. Signe de la complexité des décisions qui attendent le prochain gouverneur, deux des trois favoris ont décliné le poste, précipitant le choix de Kazuo Ueda comme futur gouverneur. Le nouvel homme fort de la politique monétaire nippone est un chercheur qui a siégé au conseil de la Banque du Japon de 1995-2005. Il a depuis conseillé ses membres, mais il reste mal connu des marchés.
Risque systémique
Il lui faudra trancher entre une inflation à son plus haut niveau depuis 30 ans, un ralentissement de l’économie mondiale et japonaise, et les risques financiers que fait peser la fin de la politique monétaire ultra-accommodante. La banque centrale nippone appelle pour l’instant à la patience, car seule la mise en place d’une boucle prix-salaires durable, sans doute vers 2024, signalera la fin de la période déflationniste. La position devient pourtant intenable : les marchés attaquent la politique de contrôle de la courbe (PCC), aggravant les distorsions sur les titres d’Etat japonais. En face, la BoJ est forcée d’acheter des montants records d’obligations, réapprovisionnant à elle seule les marchés mondiaux en liquidités.
Toute évolution de la politique monétaire passerait d’abord par une évolution de la PCC, devenue systémique. Lors de la réunion de décembre, le relèvement du plafond de 25 points de base (pb) a ébranlé les marchés obligataires mondiaux, les Treasuries à 10 ans gagnant 11 pb, et a retourné les marchés de change. Les investisseurs japonais détiennent en effet des positions importantes à l’étranger, et toute amélioration du rendement des actifs domestiques peut les inciter à rapatrier leurs positions.
Accommodant
A court terme, c’est donc la perception de la PCC par le nouveau gouverneur qui sera déterminante. Au cours de son passage à la BoJ, Kazuo Ueda a été l’artisan du cadre théorique des outils de politique monétaire non-conventionnels, et il s’est opposé, dans un entretien accordé l’an dernier au Nikkei, à une remontée prématurée des taux. «Ses vues sont proches de celles de Kuroda», relèvent les stratégistes de Deutsche Bank. «Si Masayoshi Amamiya était le premier choix du gouvernement, cela laisse supposer que le second choix, Kazuo Ueda, n’a pas des vues très différentes sur la politique monétaire», abonde MUFG. La réaction des marchés, qui d’abord ont lu dans son choix un possible durcissement de la politique monétaire japonaise, s’est donc corrigée en fin de journée vendredi. Le yen s’est légèrement renforcé face au dollar, de 0,3% à 131,2, tandis que les swaps sur le 10 ans gagnaient 4 pb, à 0,88%. «La paire dollar-yen devrait baisser quel que soit le gouverneur de la BoJ : le yen est encore trop sous-évalué», constate Stephen Li Jen, dirigeant d’Eurizon SLJ Capital, qui estime que la PCC pourrait être abandonnée dès le premier mandat du gouverneur Ueda.
Par ailleurs, deux autres des neuf membres composant le Conseil des gouverneurs devront être remplacés par Shin-ichi Uchida, un directeur exécutif de la BoJ, et Ryozo Himino, un ancien responsable de l’Agence des services financiers, le régulateur boursier local. Le premier a contribué au développement de la PCC, tandis que le second est reconnu pour son expertise prudentielle. «Le conseil restera accommodant», résume ING. Les nominations seront officiellement soumises à la Diète dès le 14 février.
Plus d'articles Japon
-
Le gouverneur de la Banque du Japon laisse à son successeur le soin de réviser la politique monétaire
Contrairement aux attentes de marché, la BoJ a laissé sa politique de contrôle des rendements inchangée. -
L’inflation commence à s’ancrer au Japon
Les syndicats vont demander des hausses de salaires record lors des négociations de cette année -
Le prochain gouverneur de la Banque du Japon reste prudent dans ses déclarations
Auditionné pendant près de trois heures devant le Parlement japonais qui doit approuver sa nomination, Kazuo Ueda, le candidat au poste de gouverneur de la Banque du Japon (BoJ) a mis en garde contre toute solution magique pour produire une inflation stable et normaliser la politique tout en se tenant au scénario actuellement avancé par l’institution.
Contenu de nos partenaires
- La Société Générale présente sa nouvelle direction autour de Slawomir Krupa
- Credit Suisse entraîne le secteur bancaire européen dans sa chute
- UBS rachète Credit Suisse pour éviter la contagion
- Fraude fiscale : BNP Paribas, la Société Générale et Natixis perquisitionnées
- Les actions chutent avec les banques américaines
- L’électrochoc SVB met la finance sous tension
- Credit Suisse, trois ans de descente aux enfers
- Les gérants prennent la mesure de la persistance de l’inflation
- Silicon Valley Bank : la chute éclair de la banque des start-up
-
Consommation
La grande distribution tisse sa toile en Afrique
Les hypermarchés, supermarchés et magasins «cash & carry» gagnent du terrain sur le continent face à la distribution traditionnelle. Dopées par l'essor de la classe moyenne, les dépenses de consommation sont en constante progression -
Tribune libre
«La forêt a tout pour plaire aux investisseurs». La tribune de Christelle Sauvage et Raphaël de Valence
«La détention d’une forêt permet de transmettre à ses descendants un actif tangible et durable dans des conditions fiscalement avantageuses» -
Lancée
Réforme des retraites: l’intersyndicale appelle à une nouvelle journée de mobilisation le 28 mars
« Le puissant rejet social de ce projet est légitime et son expression doit se poursuivre », a indiqué Marylise Léon, secrétaire générale adjointe de la CFDT, lors d'une conférence de presse