
La ruée des particuliers nourrit les excès de la Bourse

Les marchés actions sont revenus à la réalité la semaine passée. Les places boursières européennes ont abandonné entre 5,85% (FTSE 100) et 7,4% (Ibex 35), le CAC 40 cédant 6,9% sur la semaine. Wall Street se reprenait vendredi après sa chute de près de 6% jeudi, sa pire séance depuis mars, mais l’indice S&P 500 cède 4,78% sur la semaine. La volatilité a de nouveau bondi, l’indice VIX (volatilité du S&P 500) progressant de 50%, à 40 points. L’incertitude entourant la trajectoire de la reprise et de la pandémie de coronavirus rend fragile l’impressionnant rebond du marché après le mouvement de panique de février-mars. Un autre facteur risque de rendre les marchés encore plus volatils : l’arrivée en masse de nouveaux investisseurs particuliers ces derniers mois. «De plus en plus d’observateurs voient les investisseurs particuliers américains derrière le bond puis l’effondrement des actions de moins bonne qualité en l’espace de quelques jours», souligne l’équipe de recherche quantitative de Société Générale CIB.
Prévalence de comportements FOMO
Robinhood, l’un des courtiers en ligne les plus populaires outre-Atlantique, qui a enregistré 3 millions de nouveaux comptes au premier trimestre (10 millions au total avec une moyenne d’âge de 31 ans) en pleine tourmente sur les marchés, indique que 96% des lignes détenues (8.000 actions et ETF) ont été augmentées. «C’était clairement un rally vers les titres à la casse et les pennies stocks», note SG CIB. Cette ruée vers la Bourse touche principalement les millennials (génération née entre le début des années 80 et la fin des années 90), qui n’ont, pour la plupart, pas connu de krach boursier en tant qu’investisseur. «Les investisseurs les plus ‘bullish’ sont les millennials, les nouveaux venus sur le marché parmi les investisseurs retail», constate Emmanuel Cau, stratégiste actions chez Barclays. Le rally a vu les valeurs les plus vendues à découvert et les moins aimées par le marché rebondir le plus, ce qui suggère que le comportement FOMO (fear of missing out), qui consiste à acheter les actions sans tenir compte de leur valeur fondamentale par crainte de manquer une occasion, prévaut chez ces investisseurs. Ils ont acheté les titres des secteurs les plus affectés par la crise : les compagnies aériennes, les croisiéristes, les banques et l’énergie. Ces derniers ont dans un premier temps rebondi mais ont aussi enregistré de fortes chutes la semaine passée (-15% pour le secteur aérien américain le 11 juin).
Des ménages américains auraient investi les chèques reçus par l’administration (1.200 dollars) en Bourse, selon CNBC. Le taux d’épargne des ménages américains, généralement autour de 7%, n’a jamais été aussi élevé (environ 33%). Cela s’explique par des économies sur les dépenses durant le confinement mais aussi par une hausse du revenu disponible, les transferts (indemnités chômage…) ayant plus que compensé la perte de salaire, indiquent les économistes de Candriam.
Achats d’actions françaises multipliés par 4
En France également, l’AMF a constaté une forte augmentation du nombre de particuliers en Bourse. Entre le 24 février et le 3 avril, plus de 150.000 nouveaux investisseurs sont intervenus sur les valeurs appartenant à l’indice SBF 120, faisant leur entrée sur ce marché pour la première fois depuis janvier 2018, selon les derniers chiffres communiqués par le régulateur qui précise à L’Agefi que cette tendance haussière s’est poursuivie. «Au total, sur ces cinq semaines, les achats d’actions françaises par des particuliers ont été multipliés par 4 par rapport à la période équivalente en 2019, pour un montant net total de 3,5 milliards d’euros, dans un marché lui-même marqué par des volumes multipliés par 3», indique l’AMF qui ne fournit pas d’explication mais précise que leur profil est sensiblement différent de celui des investisseurs habituels tant en termes d’âge que de montants investis.
Pour Emmanuel Cau, ce nouveau segment de clientèle retail devrait rester minoritaire et si l’ensemble des investisseurs particuliers semble être plus positif sur les actions, son positionnement n’est pas globalement acheteur. Les achats des particuliers commencent à perdre de l’élan, constate SG CIB à partir des dernières données de transactions de Robinhood. «70% des actions ont vu leur détention augmenter. Les mauvaises nouvelles sur le virus et l’alerte de la Fed sur l’économie américaine ont provoqué un regain rapide d’aversion pour le risque, aussi violent que l’euphorie l’a été à la hausse». Un dur retour à la réalité.
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Immigration clandestine : raid policier dans une usine Hyundai-LG aux Etats-Unis, près de 500 arrestations
Washington - Près de 500 personnes, dont une majorité de Sud-Coréens, ont été arrêtées par la police de l’immigration dans une usine de fabrication de batteries des groupes sud-coréens Hyundai et LG dans l’Etat de Géorgie (sud-est), soupçonnées de travailler illégalement aux Etats-Unis. Le raid, mené jeudi, résulte d’une «enquête pénale liée à des accusations de pratiques d’embauche illégales et à de graves infractions fédérales», a expliqué vendredi Steven Schrank, un agent du service d’enquêtes du ministère américain de l’Intérieur, au cours d’une conférence de presse. Il s’agit de «la plus importante opération des forces de l’ordre sur un même site de toute l’histoire du service des +Homeland Security Investigations+ (+Enquêtes sur la sécurité intérieure+)», a-t-il affirmé, s’exprimant d’Atlanta, dans l’Etat de Géorgie. Les 475 personnes arrêtées dans cette usine, située dans la ville d’Ellabell, se «trouvaient aux Etats-Unis de manière illégale» et «travaillaient illégalement», a affirmé M. Schrank, soulignant que la «majorité» d’entre elles étaient de nationalité sud-coréenne. Sollicité par l’AFP aux Etats-Unis, le constructeur automobile a répondu être «au courant du récent incident» dans cette usine, «surveiller étroitement la situation et s’employer à comprendre les circonstances spécifiques» de cette affaire. «A ce stade, nous comprenons qu’aucune des personnes détenues n'était directement employée par le groupe Hyundai», a-t-il poursuivi, assurant donner «priorité à la sécurité et au bien-être de quiconque travaille sur ce site et au respect de toutes les législations et réglementations». De son côté, LG Energy Solution a affirmé suivre «de près la situation et recueillir toutes les informations pertinentes». «Notre priorité absolue est toujours d’assurer la sécurité et le bien-être de nos employés et de nos partenaires. Nous coopérerons pleinement avec les autorités compétentes», a ajouté cette entreprise. La Corée du Sud, la quatrième économie d’Asie, est un important constructeur automobile et producteur de matériel électronique avec de nombreuses usines aux Etats-Unis. Mission diplomatique Une source proche du dossier avait annoncé quelques heures plus tôt, de Séoul, qu’"environ 300 Sud-Coréens» avaient été arrêtés pendant une opération du Service de l’immigration et des douanes américain (ICE) sur un site commun à Hyundai et LG en Géorgie. De son côté, l’agence de presse sud-coréenne Yonhap avait écrit que l’ICE avait interpellé jusqu'à 450 personnes au total. Le ministère sud-coréen des Affaires étrangères avait également fait d'état d’une descente de police sur le «site d’une usine de batteries d’une entreprise (sud-coréenne) en Géorgie». «Plusieurs ressortissants coréens ont été placés en détention», avait simplement ajouté Lee Jae-woong, le porte-parole du ministère. «Les activités économiques de nos investisseurs et les droits et intérêts légitimes de nos ressortissants ne doivent pas être injustement lésés dans le cadre de l’application de la loi américaine», avait-il poursuivi. Séoul a envoyé du personnel diplomatique sur place, avec notamment pour mission de créer un groupe de travail afin de faire face à la situation. Les autorités sud-coréennes ont également fait part à l’ambassade des Etats-Unis à Séoul «de (leur) inquiétude et de (leurs) regrets» concernant cette affaire. En juillet, la Corée du Sud s'était engagée à investir 350 milliards de dollars sur le territoire américain à la suite des menaces sur les droits de douane de Donald Trump. Celui-ci a été élu pour un second mandat en novembre 2024, en particulier sur la promesse de mettre en oeuvre le plus important programme d’expulsion d’immigrés de l’histoire de son pays. Depuis, son gouvernement cible avec la plus grande fermeté les quelque onze millions de migrants sans papiers présents aux Etats-Unis. Au prix, selon des ONG, des membres de la société civile et jusqu’aux Nations unies, de fréquentes violations des droits humains. D’Atlanta, le Bureau de l’alcool, du tabac, des armes à feu et des explosifs (ATF) a expliqué sur X avoir participé à l’arrestation d’environ 450 «étrangers en situation irrégulière» au cours d’une opération dans une usine de batteries, une coentreprise entre Hyundai et LG. Selon son site internet, Hyundai a investi 20,5 milliards de dollars depuis son entrée sur le marché américain en 1986 et compte y investir 21 milliards supplémentaires entre 2025 et 2028. L’usine d’Ellabell a été officiellement inaugurée en mars, avec l’objectif de produire jusqu'à 500.000 véhicules électriques et hybrides par an des marques Hyundai, Kia et Genesis. Elle devrait employer 8.500 personnes d’ici à 2031. © Agence France-Presse