Encore 44% des sociétés mondiales n’ont pas d’objectifs climat crédibles

Le Carbon Disclosure Project lance sa campagne annuelle. Il attend le soutien de toutes les institutions financières, contre seulement 21% aujourd’hui.
Bruno de Roulhac
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Le Carbon Disclosure Project entend inciter les entreprises à se fixer des objectifs d’émission de gaz à effet de serre.  -  Gerd Altmann/Pixabay

Pas de répit pour lutter contre le réchauffement climatique. Le Carbon Disclosure Project (CDP) lance sa campagne annuelle pour inciter les entreprises à se fixer des objectifs d’émission de gaz à effet de serre sur leurs scopes 1,2,3 avec une trajectoire à 1,5° et de les faire valider par l’initiative Science Based Targets (SBT). « Une étape nécessaire à horizon de 5 à 15 ans, avant d’atteindre le net zéro en 2050 », explique Laurent Babikian, directeur mondial des marchés de capitaux pour le CDP. Les entreprises dont les objectifs ont été approuvés par le SBT réduisent en moyenne de 8,8% par an leurs émissions, bien au-delà des 4,2% nécessaires pour atteindre les 1,5°.

Cette année, le CDP vise plus de 1.000 entreprises dans le monde – contre 1.610 pour la première édition en 2020 – essentiellement en Asie (48%) et aux Etats-Unis (23%). Seules 10% des sociétés ciblées sont européennes, signe de la maturité du Vieux Continent. Toutefois, sont notamment visés les français Albioma, Constellium, Dassault Aviation, Jacquet Metals, Rallye, Vicat et Wendel, et le chimiste allemand BASF. Figurent aussi le premier distributeur chinois JD.com, ou encore les américains Caterpillar, FedEx et General Electric, et la compagnie aérienne australienne Quantas.

Ces 1.061 entreprises sont à l’origine de 7 gigatonnes d'émissions au niveau des scopes 1 et 2 - soit l'équivalent de l’Inde et des États-Unis - et ont une valeur de marché combinée de plus de 25.000 milliards de dollars, soit 44% du MSCI All Country World. « 61% des émissions proviennent de sociétés asiatiques, relève Laurent Babikian, directeur monde des marchés de capitaux du CDP. Malgré ce retard, sur les 380 entreprises qui ont rejoint le SBT en un an, 22% sont asiatiques. Il faut laisser un peu plus de temps à ces entreprises issues des marchés émergents et inciter les entreprises européennes qui ont plus de moyens à aller plus vite ».

Agir sur les rémunérations

Agir sur les rémunérations constitue un moteur puissant de progression. « Les rémunérations variables des cadres dirigeants devraient systématiquement être liées à l’objectif SBT, poursuit Laurent Babikian. Aujourd’hui, elles sont au mieux basées sur les scopes 1 et 2, qui ne pèsent que 10% des émissions totales ».

Cette campagne prend de plus en plus d’ampleur chaque année. Elle est soutenue par 318 institutions financières et entreprises mondiales, contre 220 en 2021, pesant 37.000 milliards de dollars d’actifs. Notamment Allianz GI, Axa, Crédit Agricole, La Banque Postale, Pimco, UBS et la BEI du côté des institutions financières. Ou encore L’Oréal, Schneider Electric, AstraZeneca ou Yamaha du côté des 45 multinationales, pesant plus de 710 milliards de dollars d’achats annuels, utilisant cette campagne pour inciter leurs fournisseurs à progresser, afin de leur permettre d’atteindre leurs propres objectifs. Sur les 450 institutions financières du Glasgow Financial Alliance for Net Zero supporters (GFNZ), « seules 21% soutiennent la campagne du CDP, regrette Laurent Babikian. Notre objectif est de les avoir toutes à nos côtés ». D’autant que les investisseurs « sont très attentifs aux sociétés approuvées par le SBT, poursuit Laurent Babikian. D’ailleurs, les sustainability-linked bonds, prêts variables liés à des indicateurs de performance environnementaux, devraient devenir la norme. Ils permettent de faire baisser le coût du capital si les objectifs ESG sont atteints et de faire mieux que leurs pairs, mais aussi de réconcilier la direction financière et la direction du développement durable ».

Parmi les soutiens du CDP, la France est particulièrement bien représentée avec 54 institutions financières et 2 entreprises membres de cette campagne. « En France, les institutions financières et les entreprises sont conscientes de l’urgence de la transition climatique, conclut Laurent Babikian. Toutefois, il ne faut pas tirer un satisfecit de cette avance, car les progrès restent insuffisants. Les émissions de gaz à effet de serre ne baissent toujours pas dans le monde ».

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