
L’occasion manquée du Brexit

Axel Weber est un fin connaisseur des institutions européennes et du secteur bancaire. On est donc priés de tendre l’oreille lorsque le président d’UBS et ancien patron de la Bundesbank affirme que le Brexit n’entamera pas la suprématie financière de Londres. La faute aux divisions persistantes de l’Europe, où l’émergence d’un marché des capitaux intégré, capable de rivaliser avec celui de la City, reste un vœu pieux.
Si nul ne se réjouissait du Brexit, selon la formule consacrée, le choix des Britanniques constituait aux yeux des Européens l’occasion unique de remettre la main sur une partie de l’industrie financière attachée à la zone monétaire de l’euro. Quatre ans et demi plus tard, la récolte est maigre. La City a perdu un peu de substance au profit d’un saupoudrage de talents sur les différentes places continentales, mais son bassin d’emplois et de compétences reste sans rival. Les transferts visent avant tout à éviter un cataclysme au 1er janvier en cas de Brexit sans accord. Pour la France, aucun groupe ne symbolise mieux que HSBC cette illusion perdue : le millier d’emplois relocalisés que Paris espérait au lendemain du référendum britannique a cédé la place à des plans de suppressions de postes à répétition.
La coexistence de 27 marchés financiers et superviseurs nationaux, coiffés par une vingt-huitième autorité à l’échelon européen, freine toute ambition pour le Vieux Continent. Chaque Etat pousse son propre agenda selon la structure de son système financier et les jeux politiciens du moment. L’Union des marchés de capitaux, projet initié juste avant le vote historique du Royaume-Uni, s’enlise au gré des rapports et des commissions d’experts. L’Union bancaire, tout aussi nécessaire alors qu’une flambée de créances douteuses guette le système, n’est toujours pas achevée, huit ans après son ébauche. La zone euro s’est enfin accordée début décembre sur la réforme du Mécanisme européen de stabilité, qui servira de soutien en dernier ressort en cas de faillite bancaire. Mais ce pénible compromis, qui devra vaincre les préventions des parlements nationaux, comme en Italie, a rappelé combien la gouvernance et l’efficacité de ces instruments sont encore sujets à caution.
Il y a donc urgence, pour l’Europe, à mettre fin à la fragmentation de ses marchés quitte à repartir d’une feuille blanche, comme le suggère Axel Weber. Face à elle, Londres sera tenté de ménager à ses services financiers, aujourd’hui exclus des négociations commerciales, un régime d’exception. Même les plus farouches « Remainers » considèrent que la première Place financière européenne ne peut se contenter d’être un « rule-taker », c’est-à-dire de se conformer aux réglementations héritées de l’Union, et qu’elle aura progressivement intérêt à s’en affranchir. Accord ou pas accord.
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