
Les nouveaux outils RH de la transformation

Upskilling et reskilling, derrière ces deux anglicismes à la mode se cachent en réalité deux pratiques RH bien connues, comme le rappelle Cristel Guillain, directrice du programme de reskilling de Natixis : « L’‘upskilling’ permet d’acquérir de nouvelles compétences afin de progresser dans son métier ou sa filière. Le ‘reskilling’ implique, lui, une notion de reconversion puisqu’il s’agit de se former pour changer de métier. » Ces outils constituent une partie de la réponse aux transformations que vivent les banques. Et ce d’autant plus que le « monde d’après-Covid-19 » aura pour effet d’accélérer les mutations dans les métiers bancaires. « L’exercice d’anticipation des besoins en compétences que nous avons démarré en 2018 a révélé le besoin de 30 nouveaux rôles autour du digital, de la ‘data’ et de l’intelligence artificielle », dévoile Rabia Lamsouber, responsable de la stratégie et de la transformation RH de BNP Paribas. Pour alimenter ces nouveaux 30 rôles, la DRH a décidé de miser sur une plate-forme de formation 100 % en ligne. La « digital, data & agile academy » – c’est son nom – regroupe une soixantaine de programmes d’upskilling ou de reskilling répartis en trois grands univers : digital, data et agile. « Les parcours d’‘upskilling’ se déroulent en général sur trois mois, chaque collaborateur ayant la liberté de s’organiser pour suivre les différents modules, détaille Rabia Lamsouber. Le ‘reskilling’ s’inscrit, lui, sur un temps plus long, implique la nomination d’un mentor et la réalisation de ‘job trainings’ afin de mettre en pratique ce qui a été appris pendant les cours. » A la fin du parcours, les participants reçoivent une certification équivalente à un niveau bac+5.
En alternance
Pour faire évoluer les collaborateurs exerçant la trentaine de métiers appelés à se transformer en profondeur, Natixis a choisi de privilégier le reskilling. « Le programme StepUp, dont un pilote a été lancé en juin 2019 auprès de 40 collaborateurs, est construit sur le modèle de l’alternance, explique Cristel Guillain. Les salariés intègrent dès le premier jour leur nouvelle fonction et se voient affecter un tuteur. Et pendant toute la durée du parcours, ils alternent périodes de formation théorique et de travail au sein de leur nouvelle équipe. » Les 40 collaborateurs ayant participé à la phase pilote venaient pour la plupart des fonctions de production du back et du middle-office et de l’IT. C’était le cas de Katia Kirouani, 31 ans, gestionnaire back-office financements structurés, qui s’est vu proposer une reconversion vers le poste de gestionnaire middle-office financements structurés. Pendant trois mois, elle a suivi une journée de formation par semaine. « Au total, j’ai bénéficié d’une dizaine de modules sur l’analyse financière, le financement de matières premières, les crédits syndiqués… La majorité était en présentiel, certains en mode ‘coaching’. » Fabrice le Chatelier a, lui, intégré la « digital, data & agile academy » début 2019, alors qu’il était responsable risk pour le collateral chez BNP Paribas Wealth Management. « Tout au long de mon parcours, j’ai toujours travaillé dans le ‘risk management’, confie ce titulaire du DESS 220 Informatique de gestion de l’université Paris-Dauphine. Constatant que le rôle de la ‘datascience’ était en train de devenir de plus en plus important et stratégique, j’ai décidé de mon propre chef de suivre des cours à l’Ecole polytechnique afin d’obtenir une certification en ‘datascience’. Cette formation m’ayant donné envie de me spécialiser, je me suis rapproché de la DRH qui m’a proposé d’intégrer un parcours d’‘upskilling’ sur la plate-forme Coursera. »
Un parcours composé de huit « moocs » (massive open online courses, cours en ligne). « En accord avec mon manager, j’ai pu me construire un programme sur mesure composé de modules sur l’inférence statistique, les réseaux de neurones, les algorithmes de ‘machine learning’… », raconte Fabrice le Chatelier. Les cours étaient animés en vidéo et en anglais par des professeurs des meilleures universités américaines. A la fin du parcours, il s’est vu remettre une certification par Coursera. Et dès la fin de sa formation, il a été nommé responsable du datascience office, une entité ayant pour mission de coordonner les équipes du groupe spécialisées dans l’intelligence artificielle. Katia Kirouani a, elle, vu son changement de poste acté avant même l’issue de sa formation. « Ce programme de ‘reskilling’ conçu personnellement pour moi m’a permis d’évoluer vers un poste à plus forte valeur ajoutée. Je suis passée d’une fonction d’enregistrement et de gestion opérationnelle à un métier où je dois piloter un portefeuille de financements structurés accordés à des clients ‘corporate’ internationaux, contrôler la conformité des opérations, et jouer le rôle d’interface entre toutes les parties afin d’offrir la meilleure qualité de service au client. »
Côté RH, les premiers retours sont tout aussi positifs. « Tous les collaborateurs ayant fait le choix de suivre le pilote ont vu leur reconversion validée à la fin de leur parcours », affirme Cristel Guillain qui pilote le déploiement du reskilling à l’échelle de toute l’entreprise. Du côté de BNP Paribas, l’upskilling et le reskilling montent aussi en puissance, « l’objectif étant d’atteindre 2.500 à 3.000 collaborateurs formés d’ici trois à cinq ans », précise Rabia Lamsouber. L’offre de formation est également en train de s’étoffer puisqu’elle devrait passer d’une soixantaine de parcours à plus de 130.
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Munich - Acheter une voiture chinoise sur les Terres de Volkswagen, BMW et Mercedes? «Et pourquoi pas?», sourit la designeuse allemande Tayo Osobu, 59 ans, déambulant dans la vieille ville de Munich, devenue vitrine géante du salon automobile. Venue de Francfort, elle découvre les plus de 700 exposants, dont 14 constructeurs chinois contre 10 européens, qui tentent de séduire le public avec des modèles high-tech dans toutes les gammes de prix. Sur la Ludwigstrasse, deux mondes se font face. D’un côté, le géant chinois BYD, dont les ventes en Europe ont bondi de 250% au premier semestre, expose ses modèles phares, dont l’un, une citadine électrique, se vend à partir de 20.000 euros. De l’autre, Volkswagen, numéro 1 européen en crise, tente de défendre son territoire malgré la chute des livraisons et un plan social historique. Tayo est impressionnée par les finitions des coutures à l’intérieur d’une voiture BYD. Sur la sécurité, aucun doute: «si elles sont vendues ici, c’est qu’elles respectent les normes européennes», répond-t-elle sans hésiter. Qualité au «même niveau» Les marques chinoises maîtrisent une grande partie de leur chaîne de valeur, des batteries électriques aux logiciels embarqués. De plus, elles bénéficient d’une main d'œuvre moins chère et d’économies d'échelle grâce au marché chinois gigantesque. Et fini la réputation de la mauvaise qualité. «Ce qui a changé en cinq ans, c’est qu'à prix inférieur, les Chinois sont désormais au même niveau sur la technologie et la qualité à bien des égards», résume l’expert du secteur Stefan Bratzel. Pour contenir cette offensive, la Commission européenne a ajouté l’an dernier une surtaxe pouvant atteindre 35% sur certaines marques chinoises, en plus des 10% de droits de douane existants. Objectifs visés: protéger l’emploi sur le Vieux continent, limiter la dépendance technologique et préserver l’image des constructeurs européens. Mais BYD contournera bientôt la mesure: sa première usine européenne en Hongrie doit démarrer sa production dès cet hiver. Il est encore «trop tôt» pour parler d’invasion, estime M. Bratzel. Les marques chinoises doivent encore établir «une relation de confiance» avec le public européen, développer des réseaux de concessionnaires et de service après-vente, explique-t-il. Des acheteurs potentiels le disent aussi: «Si on conduit une voiture chinoise, dans quel garage va-t-on en cas de problème?», s’interroge Pamina Lohrmann, allemande de 22 ans, devant le stand Volkswagen où est exposé un ancien modèle de l’iconique Polo. «J’ai grandi avec les marques allemandes, elles me parlent plus», confie cette jeune propriétaire d’une Opel décapotable, dont la famille roule plutôt en «BMW, Porsche ou Mercedes». «Image de marque» L’image des véhicules reste un point faible, mais déjà une certaine clientèle, jeune et technophile, se montre plus ouverte. Cette dernière est convoitée par la marque premium XPeng, lancée en Chine en 2014 : «Nous visons la première vague d’enthousiastes de la technologie», explique son président Brian Gu sur le salon. Loin de baisser les bras, les constructeurs allemands continuent de «renforcer leur image de marque européenne» avec «un héritage» échappant encore aux entrants chinois, explique Matthias Schmidt, un autre expert. Volkswagen a ainsi rebaptisé son futur modèle électrique d’entrée de gamme «ID.Polo», attendu en 2026 autour de 25.000 euros, pour capitaliser sur la notoriété de sa citadine. Et les Européens imitent les Chinois sur l’intégration du numérique, comme le nouveau système d’affichage par projecteur de BMW, et dans la course à la recharge rapide. Ils adoptent aussi les batteries lithium-fer-phosphate (LFP), moins coûteuses, et intègrent de plus en plus de pièces standards chinoises, afin de réduire les coûts et de combler l'écart technologique, note M. Schmidt. «Ce qui compte, c’est que les fonctionnalités et le prix soient convaincants», note Martin Koppenborg, consultant automobile de 65 ans, bravant la pluie sur un stand de BYD, visiblement séduit. Léa PERNELLE © Agence France-Presse