
Les banques françaises ont réglé leurs comptes au dernier trimestre

La Société Générale va charger ses comptes du dernier trimestre 2017. Elle devrait publier jeudi une perte trimestrielle, estimée en moyenne à 237 millions d’euros par le consensus, non public, que la banque a elle-même établi. Parmi les analystes, Deutsche Bank, Credit Suisse, UBS et Morgan Stanley misent sur un résultat net compris entre -105 millions et -517 millions d’euros.
A l’inverse, BNP Paribas pourrait annoncer mardi matin 1,5 milliard d’euros de bénéfices nets, selon le consensus FactSet, tandis que Crédit Agricole SA (CASA) et Natixis publieraient la semaine prochaine des résultats nets de respectivement 588 millions et 357 millions d’euros.
Des charges fiscales inédites aux Etats-Unis et en France
A la Société Générale, le produit net bancaire (PNB) trimestiel pourrait certes accuser un recul de 4,5% sur un an (à 5,86 milliards d’euros), moins marqué que celui de Natixis (-8,1%, à 2,32 milliards), mais la banque de La Défense devrait surtout souffrir, et davantage que ses compatriotes, d’une série d’éléments exceptionnels, dont un paquet de 455 millions d’euros annoncé le mois dernier.
Primo, la réforme fiscale américaine adoptée en décembre conduira la banque à passer une charge de 307 millions de dollars (255 millions d’euros) en raison de la perte de valeur des crédits d’impôts auxquels elle peut prétendre aux Etats-Unis. A l’inverse, Natixis devrait profiter de la nouvelle donne fiscale outre-Atlantique, selon Credit Suisse. La filiale cotée de BPCE tire environ un tiers de ses revenus des Etats-Unis, pointe Morgan Stanley, grâce à sa forte implantation en gestion d’actifs.
Deuzio, la Société Générale a indiqué qu’elle passerait en France une charge opérationnelle de 200 millions d’euros à la suite d’un contrôle fiscal et d’une décision de justice sur la dématérialisation du traitement des chèques. Ce dernier dossier devrait affecter BNP Paribas à hauteur de 63 millions d’euros, estime Deutsche Bank. La Société Générale sera aussi interrogée jeudi sur le traitement fiscal de l’affaire Kerviel, alors que le Canard Enchaîné a affirmé mi-janvier que l’administration lui a notifié un redressement de 2,2 milliards d’euros au printemps 2017.
Enfin la banque de la Défense avait annoncé fin novembre que la restructuration de sa banque de détail lui coûterait 400 millions d’euros au quatrième trimestre, et une charge de 170 millions d’euros liée à la surtaxe d’impôt sur les sociétés qui touche toutes les grandes banques. Les groupes mutualistes devraient d’ailleurs payer un lourd tribut lié au remboursement de la taxe sur les dividendes, soit 300 millions d’euros pour CASA, selon Deutsche Bank.
Mauvaises performances en BFI et dans la banque de détail
Côté revenus, les concurrentes de la Société Générale peuvent compter au quatrième trimestre des effets de périmètre positifs. «BNP Paribas et CASA ont plus de résilience dans leurs revenus ce trimestre grâce à des acquisitions (Pioneer chez CASA, Opel Bank chez BNP Paribas», relève Deutsche Bank.
Natixis a de son côté acquis les 40% de Natixis Assurances détenus par sa maison-mère BPCE. L’assurance et la gestion d’actifs sont les principaux leviers de croissance de la banque au dernier trimestre, selon Deutsche Bank, qui pointe aussi le rôle moteur d’Amundi chez CASA.
Ces métiers permettent de contrebalancer les mauvaises performances attendues dans la banque de financement et d’investissement, et dans la banque de détail (hors Natixis qui n’a pas de réseau). Les baisses de revenus dans le trading de fixed income (produits de taux, changes et matières premières) pourraient être plus faibles que chez les banques américaines (-20% contre -29% selon UBS), mais les françaises pourraient davantage reculer dans le trading actions (-14% contre -3%), surtout la Société Générale en raison de la faible volatilité, défavorable aux activités de dérivés.
Enfin la banque de détail en France a continué de souffrir, avec une baisse moyenne des revenus annuels comprise entre 1% et 3%, estime Morgan Stanley. CASA, via son réseau LCL, pourrait être le plus affecté au dernier trimestre avec un recul supérieur à 4%. Pour l’ensemble des enseignes, « si les pressions sur la marge nette d’intérêt resteront un défi en 2018, l’augmentation des volumes dans [la banque] domestique en France et la confiance croissante de nos économistes envers une reprise de l’inflation soutiennent notre optimisme pour une amélioration à partir de 2019 », concluent les analystes de la banque américaine.
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Un an après les émeutes, la Martinique renforce son « bouclier qualité-prix » contre la vie chère
Fort-de-France - Un an après les émeutes en Martinique sur fond de mobilisation contre la vie chère, les principaux acteurs de la distribution et les services de l’Etat ont adopté lundi une version étendue du «bouclier qualité-prix» (BQP). «C’est l’aboutissement de trois mois de négociations avec la grande distribution, avec les grossistes importateurs, pour obtenir un bouclier qualité-prix qui soit élargi», a salué le préfet de la Martinique, Etienne Desplanques, à l’issue de la signature de ce dispositif annuel de modération des prix des produits de consommation courante. Il s’agissait d’une des mesures phares inscrites dans le protocole de lutte contre la vie chère, signé le 16 octobre 2024 par le prédécesseur de M. Desplanques et une trentaine d’interlocuteurs locaux, au terme de plusieurs semaines de protestation populaire sur cette île où les produits alimentaires sont en moyenne 40% plus chers que dans l’Hexagone, selon l’Insee. Malgré la signature de ce protocole, les prix ont enregistré en juillet 2025 une progression de 0,8% sur un an en Martinique, indiquait l’institut fin août. «L’Etat s'était engagé à ouvrir une négociation» et «les associations de consommateurs nous le demandaient», a rappelé le représentant de l’Etat. Jusqu’ici limité à 134 articles répartis en quatre «sous-paniers» - produits alimentaires, infantiles, d’hygiène ou d’entretien -, le BQP, dont la nouvelle version entre en vigueur dès mardi, comporte désormais 180 produits, dont 14 fournitures scolaires, catégorie jusqu’ici exclue du dispositif. En outre, une catégorie «BQP bricolage», qui inclut 36 articles vendus dans sept enseignes de l'île, a été créée, en s’inspirant du modèle existant à La Réunion. Ces produits ont été définis «par les associations de consommateurs, qui ont fait état de leurs besoins», s’est félicité Patrick Plantard, le président de l’Observatoire des prix, des marges et des revenus des Antilles-Guyane, qui prend part chaque année à l'élaboration du BQP. Le dispositif annuel devrait être étoffé d’un «BQP automobile» portant sur les pièces détachées et «les services d’entretien des véhicules», a indiqué le préfet. Les négociations avec les acteurs de ce secteur seront lancées «d’ici quelques semaines», a-t-il précisé. © Agence France-Presse -
Allemagne : la justice se prononce sur le meurtre d’un policier attribué à un Afghan radicalisé
Berlin - Un tribunal allemand doit rendre mardi son jugement concernant un Afghan accusé du meurtre d’un policier, lors d’une attaque aux motivations jihadistes, première d’une série qui avait choqué le pays et contribué à la progression de l’extrême droite. Le procureur a requis une peine de prison à perpétuité pour Sulaiman A., 26 ans, assortie d’une reconnaissance de la gravité particulière de la culpabilité qui rendrait très difficile une libération anticipée. Accusé d’un meurtre et de cinq tentatives de meurtre, l’accusé avait gardé le silence sur le motif de son acte présumé à l’ouverture de son procès, mi-février, dans une salle sécurisée de la prison de Stuttgart-Stammheim (sud-ouest). Le 31 mai 2024 à Mannheim (ouest), sur la place du marché, il s’en était pris à plusieurs membres d’une organisation anti-islam, le Mouvement citoyen Pax Europa (BPE), poignardant l’orateur principal, Michael Stürzenberger, déjà condamné pour incitation à la haine raciale. L’accusé a ensuite donné plusieurs coups de couteau à quatre personnes qui voulaient l’arrêter, avant de s’en prendre à un policier de 29 ans. Une vidéo le montrant en train de frapper l’agent à la tête avait largement circulé sur les réseaux sociaux, accentuant l'émotion. La victime était décédée deux jours plus tard à l’hôpital. Mineur non accompagné Selon les enquêteurs, Sulaiman A., un partisan du groupe jihadiste Etat islamique (EI), aurait décidé au printemps 2024 de commettre un attentat en Allemagne contre des «infidèles». Des médias allemands ont affirmé qu’il était arrivé en Allemagne à l'âge de 14 ans, avec son frère, mais sans leurs parents. Ils se sont vu refuser l’asile mais, en tant que mineurs non accompagnés, ont bénéficié d’un sursis, puis d’un titre de séjour. Le verdict est attendu une semaine après la condamnation à perpétuité d’un Syrien pour une autre attaque jihadiste au couteau, à Solingen, qui avait fait trois morts en août 2024. Espacées de trois mois, ces deux attentats avaient pesé sur les élections législatives de l’hiver suivant, marquées par la progression du parti d’extrême droite AfD. Au cours de la campagne, l’Allemagne a connu d’autres violences meurtrières impliquant des ressortissants étrangers qui ont enflammé le débat sur la politique d’asile et la sécurité. Mi-février, l’ouverture du procès de Sulaiman A. avait d’ailleurs coïncidé avec une attaque à la voiture-bélier à Munich, dont l’auteur présumé est également afghan. Elle a fait 2 morts et 44 blessés graves. Un million de réfugiés Juste avant, fin janvier, un Afghan souffrant de troubles psychiatriques s’en est pris à un groupe d’enfants dans un parc à Aschaffenbourg (sud), poignardant à mort deux personnes, dont un garçon de deux ans. La première économie européenne a accueilli plus d’un million de réfugiés, dont de très nombreux Syriens et Afghans, lors de la crise migratoire de 2015-2016. Mais elle a aujourd’hui définitivement tourné cette page associée à l’ex-chancelière Angela Merkel (2005-2021). Pour enrayer l’ascension de l’AfD, le chancelier conservateur Friedrich Merz a opéré un nouveau tour de vis sur la politique migratoire, instaurant notamment le refoulement des demandeurs d’asile aux frontières. En juillet, sa coalition a organisé le rapatriement de 81 condamnés afghans dans leur pays, malgré la présence au pouvoir des talibans. Samedi, le ministère de l’Intérieur a redit à l’AFP son intention de «permettre des rapatriements réguliers et fréquents vers l’Afghanistan», justifiant ainsi des «discussions techniques» avec les talibans. © Agence France-Presse -
Malawi : une présidentielle sous haute tension sur fond de crise économique et de fractures sociales
Lilongwe - Le président sortant du Malawi affronte son prédécesseur mardi lors d'élections présidentielle et législatives dans un pays où la population, majoritairement pauvre, fait face au quotidien à de nombreuses pénuries. Le vainqueur devra relever le défi d’une économie moribonde. Quelque 70% des 21 millions d’habitants vivent avec moins de 2,15 dollars par jour selon la Banque mondiale. L’inflation dépasse 27% en rythme annuel et le secteur agricole, qui emploie plus de 80% de la main d'œuvre, a été durement affecté par deux sécheresses et un cyclone dévastateurs depuis 2023. Dix-sept candidats sont en lice pour la magistrature suprême dans ce pays enclavé d’Afrique australe. Mais selon les analystes, la bataille électorale va de nouveau se jouer entre le sortant et pasteur évangélique Lazarus Chakwera, 70 ans, et son prédécesseur, l’ex-professeur de droit Peter Mutharika, 85 ans. L'élection se résume à un choix entre «deux déceptions», explique à l’AFP le commentateur politique Chris Nhlane. «Les deux hommes incarnent un potentiel inexploité et des espoirs déçus, et pourtant, les Malawiens doivent choisir le moindre mal entre les deux», ajoute-t-il. Les deux hommes, qui se sont affrontés une première fois lors de l'élection 2014 remportée par Mutharika, ont attiré de larges foules lors de leurs derniers meetings de campagne ce weekend. Mais de nombreux jeunes électeurs ne cachent pas leur désenchantement face à l’affiche de l'élection. «Je préfèrerais aller travailler plutôt que de voter», explique Joseph, auto-entrepreneur de 30 ans qui préfère ne pas donner son nom. «Rien ne change», résume-t-il. Environ 60% des 7,2 millions d'électeurs inscrits ont moins de 35 ans et des groupes de la société civile se sont mobilisés pour les convaincre l’aller voter mardi, entre 06H00 et 16H00 (de 04H00 GMT à 14H00 GMT). «Nous n’avons pas besoin d’un leader, nous avons besoin de quelqu’un qui puisse redresser l'économie», explique à l’AFP l’un de ces activistes, Charles Chisambo, 34 ans. Pénuries d’essence Chakwera, issu du Parti du Congrès du Malawi, a fait campagne sur le thème de la continuité, mettant en avant la livraison de plusieurs chantiers d’infrastructures (routes, écoles, hôpitaux...) «Il y a eu des plaintes à propos du coût de la vie, du manque de ressources, des pénuries alimentaires», a-t-il reconnu samedi en meeting à Lilongwe, la capitale. «On va tout redresser», a-t-il promis. Quelques jours auparavant, il avait annoncé une forte diminution du prix des engrais. Lydia Sibale, 48 ans, responsable administrative dans un hôpital, explique maintenir sa confiance au sortant. «Le seul challenge, c’est la crise économique, et elle est mondiale», assure-t-elle à l’AFP, alors qu’elle patiente depuis une heure devant une station-essence pour remplir son réservoir. La population doit s’adapter à des pénuries de carburants récurrentes, alimentées par le manque de devises étrangères pour s’acquitter de ces importations, conséquence d’un déficit commercial marqué et d’une dette aussi élevée que coûteuse. En quête d’un deuxième mandat, Chakwera avait accédé au pouvoir après l’annulation des résultats des élections de 2019 pour des irrégularités. Lors du nouveau scrutin en 2020, il avait obtenu près de 59% des voix et privé d’un second mandat Mutharika, du Parti démocrate-progressiste. Cinq ans plus tard, une forme de nostalgie des années Mutharika, synonymes d’une «relativement meilleure administration», s’est installée, selon l’analyste Mavuto Bamusi. «La prime au sortant Chakwera a été largement entamée par de mauvais résultats économiques», souligne-t-il. En meeting à Blantyre, la deuxième ville du pays, Mutharika a déclaré vouloir «sauver ce pays». «Je vais voter pour APM (Mutharika) car il sait comment gérer l'économie et il a le bien-être des Malawiens à cœur», déclare à l’AFP Thula Jere, étudiant de 31 ans. Si aucun des candidats ne recueille plus de 50% des voix, un second tour est prévu dans les 60 jours. Bronwen Roberts © Agence France-Presse