
Les banques européennes à l’orée de stress tests historiques

Jamais un scénario n’avait été aussi sévère depuis la mise en place des premiers stress tests bancaires dans l’après-crise financière. L’Autorité bancaire européenne (EBA) a dévoilé ce mardi 31 janvier la méthode de ce nouvel exercice conduit tous les deux ans. Il sera cette fois mené à grande échelle en testant la résistance aux chocs de 70 banques européennes (dont sept françaises) représentant au total 75% des actifs bancaires du continent, contre 50 banques lors des précédents stress tests en 2021.
Si le précédent exercice s’était déroulé dans le contexte d’une reprise forte de l’activité post-Covid, celui-ci intervient alors que le conflit entre la Russie et l’Ukraine a créé un environnement inédit marqué par de nombreuses incertitudes et un niveau d’inflation sans précédent depuis les années 1990. A tel point que l’EBA, qui travaille habituellement avec des données historiques, reconnaît qu’elle dispose de très peu de recul pour évaluer les risques pesant sur le secteur bancaire.
Coupure totale du gaz russe et récession
Le scénario adverse a été élaboré sur la base des risques les plus saillants identifiés par le Comité européen du risque systémique. Il tient compte des conséquences éventuelles du conflit russo-ukrainien, c’est-à-dire de l’hypothèse d’une coupure totale du gaz russe qui ferait grimper les prix de l’énergie et des matières premières. Il n’inclut pas, en revanche, l’hypothèse d’une dépréciation des actifs russes encore détenus par certaines banques européennes comme Unicredit, ni une possible escalade dans le conflit menant à une guerre entre la Russie et les pays de l’Otan par exemple.
Ce scénario noir repose sur une inflation atteignant 9,7% en 2023, soit trois points de plus que le scénario de base réalisé à partir des projections des banques centrales, une hausse des taux longs de 183 points de base entre la fin 2022 et la fin 2025, et une sévère récession avec un recul de 6% de la croissance européenne et une hausse de 6,1 points du taux de chômage sur cette même période. Ces hypothèses sont couplées à celle d’une correction forte sur les marchés boursiers – de l’ordre de 55% en 2023 et 43% en 2025 – ainsi que sur les marchés immobiliers résidentiel et commercial, avec une baisse respective des prix de 21% et de 29% sur les trois ans. Ces effets seront cependant hétérogènes d’un marché à l’autre.
Les prêts à effet de levier dans le viseur
Pour la première fois, la Banque centrale européenne (BCE) et l’EBA demandent aux banques de détailler les pertes de crédit attendues pour 16 secteurs économiques distincts. La BCE se « plongera profondément sur l’exposition aux prêts à effet de levier d’un certain nombre de banques européennes davantage exposées », prévient-elle dans un communiqué. BNP Paribas et Deutsche Bank sont notamment concernées.
Sujet d’une préoccupation croissante des superviseurs, notamment depuis la crise des fonds de pension britanniques, l’exposition des banques européennes au secteur non bancaire ne fait pas l’objet d’une évaluation des risques en tant que telle. En revanche, le scénario de risque de marché tient compte de l’exposition aux hedge funds ou autres acteurs du shadow banking, tandis que le scénario macro tient compte des impacts sur les prix de marché et les coûts de financement.
Les 70 banques doivent désormais faire tourner leurs modèles internes pour évaluer l’impact du scénario adverse sur leurs bilans et faire remonter les informations à leurs autorités de supervision et à l’EBA à partir du mois d’avril. En France, sont concernées : BNP Paribas, la Société Générale, BPCE, le groupe Crédit Agricole, la Confédération nationale du Crédit Mutuel, la Banque Postale et Bank of America Securities Europe.
Les résultats des stress tests seront publiés d’ici à la fin du mois de juillet. Si l’EBA rappelle comme à l’accoutumée qu’il ne s’agit pas de réussir ou d’échouer aux tests, ces derniers peuvent avoir une incidence sur les exigences de fonds propres au titre du pilier 2. La BCE tient, en effet, compte des résultats des tests de résistance dans sa revue de supervision, le SREP (supervisory review and evaluation process).
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