
Les banques centrales doivent s’attaquer à l’influence des Big Tech

Les banques centrales et les régulateurs financiers doivent de toute urgence s’attaquer à l’influence croissante des grandes sociétés de technologies (Big Tech) dans la finance. L’avertissement a été émis ce lundi par la Banque des règlements internationaux (BRI), l’organisation internationale de protection de la stabilité financière qui rassemble 63 banques centrales.
«Outre les problèmes qui découlent des préoccupations traditionnelles en matière de stabilité financière, il existe des défis nouveaux et inhabituels liés à la possibilité d’une concentration excessive du pouvoir de marché, ainsi que des questions plus larges concernant la gouvernance des données», s’inquiètent dans un bulletin les dirigeants de la BRI, dont son directeur général Agustin Carstens.
Selon la BRI, les Big Tech, comme les américains Google, Apple ou Facebook, ainsi que les chinois Alibaba ou Tencent, tirent leur pouvoir des données collectées grâce aux interactions des utilisateurs sur leurs plateformes, qu’elles soient un réseau social ou un site marchand. «De cette manière, les grandes entreprises technologiques peuvent établir très rapidement une présence substantielle dans les services financiers par le biais de la boucle dite données-réseau-activités (data-network-activities)», expliquent les auteurs du bulletin, ce qui «suscite des inquiétudes quant à l'émergence d’entreprises dominantes avec une concentration excessive de pouvoir de marché et une possible influence systémique sur le système financier».
Selon la BRI, le secteur des paiements est un excellent exemple du pouvoir potentiel des Big Tech. Elle cite notamment le cas de la Chine, où les deux grandes entreprises technologiques Alibaba et Tencent ont pris en seulement quelques années 94% du marché des paiements mobiles.
Face à ces dangers, le cadre actuel de la réglementation des services financiers, en dehors des secteurs de la banque et de l’assurance, qui «suit une approche fondée sur les activités», n’est pas adapté, notamment du fait «d’exigences qui varient selon la juridiction». «Des éléments d’une approche fondée sur les entités pour les grandes entreprises technologiques sont déjà en place dans plusieurs juridictions clés, notamment dans l’Union européenne, en Chine et aux États-Unis», reconnait la BRI. Mais «ces initiatives ont été menées principalement par les autorités de la concurrence et les législateurs», comme c’est le cas en France avec le récent avertissement de l’Autorité de la concurrence, alors que «les questions qu’elles soulèvent empiètent profondément sur la mission des banques centrales et des régulateurs financiers». «Pour ces raisons, il est nécessaire d’assurer une coordination étroite entre les différents régulateurs financiers et non financiers, tant au niveau national que mondial», ajoute la BRI.
Seule la Chine a pour l’instant sauté le pas avec la révision de la réglementation des sociétés holding financières (FHC). Elle exige que toutes les sociétés détenant deux types ou plus d’institutions financières (n’incluant pas nécessairement une banque commerciale) qui répondent à des seuils de taille spécifiques demandent une licence FHC. Cette dernière impose des exigences de fonds propres au niveau de la société holding et des filiales, ainsi qu’un mécanisme de reconstitution du capital et à des mesures de renflouement.
Sous la pression des autorités, Ant Group, la fintech d’Alibaba, a récemment adopté ce statut de FHC.
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