L’EBA resserre les règles sur les bonus bancaires

Le superviseur européen souhaite mettre fin au flou entourant certaines indemnités fixes.
Julien Beauvieux

Le diable se cache souvent dans les détails. Alors que les dirigeants européens s’étaient entendus en 2013 pour limiter la part de la rémunération variable des banquiers de l’UE à 100% de leur salaire fixe, et jusqu’à 200% avec l’accord des actionnaires, les dérives pointées l’an dernier par l’Autorité bancaire européenne (EBA) ont conduit le superviseur à soumettre hier de nouvelles lignes directrices. Ouvertes à la consultation jusqu’au 4 juin, elles visent notamment à clarifier la frontière entre rémunération fixe et variable.

Rédigées en 2010 par l’ancêtre de l’EBA, le CEBS, les précédentes «guidelines» avaient simplement été mises à jour à la suite de la décision prise trois ans plus tard par l’UE, qui souhaitait brider les rémunérations des banquiers accusées d’avoir favorisé les prises de risque inconsidérées. La nouvelle mouture présentée par l’EBA dans son document de consultation, qui supplantera les précédentes recommandations le 31 décembre, intervient en outre dans un contexte d’intenses tractations, notamment avec les banquiers de la City.

L’an dernier, le Royaume-Uni avait ainsi saisi la Cour de justice européenne, estimant que ce «bonus cap» contrevenait aux dispositions sur la liberté d'établissement et la libre prestation de services. Parallèlement, la Commission européenne avait de son côté épinglé à plusieurs reprises certaines pratiques des banques, en particulier de la City, accusées notamment de contourner la réglementation en reclassant des bonus en indemnités («allowances»).

Dans ce contexte, l’EBA avait publié mi-octobre un rapport qui détaillait ses reproches à l’égard du système des «allowances», assimilant notamment ces primes à des bonus car elles ne sont «pas fixes», «pas permanentes» et qu’elles peuvent être «suspendues ou annulées (...) sur une base discrétionnaire».

«Selon la directive CRD, la rémunération est soit fixe, soit variable; il n’existe pas de troisième catégorie d’émoluments», explique le document de consultation de l’EBA. «La bonne cartographie [des rémunérations] au sein de ces deux catégories est cruciale pour le calcul du ratio entre la partie fixe et variable et pour s’assurer du respect de la limitation», ajoute l’EBA.

Afin de clarifier les règles du jeu, l’EBA a donc explicitement développé dans son projet les critères permettant de juger du caractère fixe d’une rémunération, qui ne doit en aucun cas «inciter à prendre des risques» ou «dépendre de la performance [du groupe]». Si les rémunérations liées à l’expatriation et les indemnités visant à corriger des écarts de salaires dus à l’implantation géographique font partie de cette catégorie «fixe», l’EBA stipule que «les autorités compétentes devraient s’assurer que les ‘allowances’ ne sont pas des véhicules ou des méthodes pour faciliter un non-respect de CRD».

Parmi les banques suspectées d’avoir eu massivement recours à ces procédés figurent notamment HSBC et Barclays. Alors que la Cour de Justice européenne devrait rendre dans les prochaines semaines son verdict concernant la saisine britannique, le début des consultations devrait être marqué par un intense lobbying de la City. En 2012, le Royaume-Uni comptait 2.188 banquiers gagnant plus de 1 million d’euros, avec un bonus moyen égal à 370% du salaire fixe, selon les chiffres de l’EBA.

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