Le projet de scission des banques est compromis

La Commission Juncker envisagerait de retirer purement et simplement le règlement proposé en janvier 2014 par Michel Barnier.
Florence Autret, à Bruxelles
Jonathan Hill, commissaire aux Services financiers © European Union 2014 EP
Jonathan Hill, commissaire aux Services financiers © European Union 2014 EP  - 

On saura le 17 décembre si le projet de réforme des structures bancaires présenté en janvier 2014 par le commissaire Michel Barnier risque bel et bien de passer à la trappe. Selon Reuters, son successeur, Jonathan Hill (photo)a suggéré d’abandonner le projet l’an prochain «si le soutien des Etats membres ne remonte pas». Une crainte justifiée tant l’idée d’une séparation quasi automatique des activités de marché rebute Paris, allié à Berlin et bientôt peut-être à Londres, si le Royaume-Uni voyait disparaître l’exemption ménagée dans la proposition initiale.

La France, dont les banques universelles sont directement concernées, avait réussi ces dernières semaines à rallier le soutien de l’Allemagne et écrit à Frans Timmermans, premier vice-président de la Commission, pour demander le retrait du texte. Celui-ci pose le principe d’une filialisation des activités de tenue de marché au-delà de certains seuils de taille et de risques et sous l’égide de l’autorité unique de supervision.

Depuis sa présentation il y a moins d’un an, les banques françaises s’insurgent contre cette réforme au motif qu’une séparation compliquerait les relations entre banques et entreprises. «Le market making est essentiel au financement de l’économie, insiste une source bancaire. S’il était filialisé, il finirait par être vendu à des étrangers n’étant pas soumis à la même règlementation. Que le market making se fasse à Londres poserait un gros problème d’indépendance économique».

Depuis que la Banque centrale européenne a estimé que l’exemption accordée au Royaume-Uni dans le projet de la Commission n’était pas opportun, la neutralité de Londres n’était plus garantie. Avec trois Etats membres de ce poids hostiles à la réforme, la Commission a refusé de commenter le courrier de Lord Hill. «Nous allons tout faire pour trouver un accord, nous ne retirons pas le projet», explique une source à la Commission où l’on reconnaît toutefois que, compte tenu de cette coalition des trois pays les plus concernés, les chances de la réforme de passer le test d’un «progrès» dans les négociations sont plutôt minces.

Or Frans Timmermans est en train de mettre au point le «programme de travail» de la Commission où les textes en cours de discussion seront répartis en trois groupes: ceux pour lequel la procédure législative doit se poursuivre, ceux que la Commission va retirer, ceux enfin qui sont maintenus sur l’agenda en attendant de voir les progrès des négociations au Conseil des ministres et au Parlement. La réforme bancaire entrerait dans cette troisième catégorie. «Il y a un potentiel d’enlisement au Conseil. Les Français s’y emploient», reconnaissait récemment une source à la Commission.

Bruxelles n’a juridiquement pas besoin de l’aval des députés pour retirer un texte si celui-ci n’a pas fait l’objet d’un vote en première lecture, ce qui est le cas ici. La proposition de règlement de Michel Barnier avait été présentée en janvier 2014… moins de trois mois avant la suspension des travaux pour cause d’élection. Par ailleurs les clivages entre groupes politiques s’annoncent considérables.

Le rapporteur Gunnar Hökmark (PPE) qui devait présenter un projet de position en décembre, s’est montré réservé sur le texte. Les sociaux-démocrates sont divisés. Les Verts, qui estiment que le projet ne va pas assez loin, risquent en revanche de faire entendre leur voix en cas de retrait.

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