La Mutuelle du Ministère de la Justice en ordre de bataille après son déréférencement

La Mutuelle du Ministère de la Justice a été confrontée à son déréférencement auprès du ministère il y a un an. Après le choc, elle réagit et se donne de nouveaux objectifs commerciaux. Sur le plan des investissements, la mutuelle santé conserve une approche prudente de ses placements, qu’elle partage avec ses deux gérants.

L’été 2017 aura été orageux pour la Mutuelle du Ministère de la Justice (MMJ). La mutuelle historique du ministère créée en 1944 a été déréférencée par ce dernier lors du renouvellement du marché. Des quatre candidats en lice, la mutuelle des fonctionnaires Intériale (liée par un partenariat au groupe Axa depuis juin 2016) a remporté le marché. Un coup de semonce pour la MMJ. D’autant qu’elle s’estime en partie victime d’une concurrence déloyale. Une procédure de recours a été lancée auprès du juge administratif. Parmi ses griefs, la MMJ reproche à Intériale d’avoir proposé « une offre de dumping qui ne permet pas d’être rentable dans ce secteur à moins que d’autres assurés payent la note », pointe Elisabeth Chabot, présidente de la MMJ. Même si le déréférencement n’oblige pas les assurés à rejoindre la nouvelle mutuelle, il a toutefois entraîné une perte de 10 à 12% des adhérents de la MMJ. Mais cela n’aura pas d’incidence sur le résultat technique, la baisse de cotisations allant de pair avec une baisse de sinistres, assure Elisabeth Chabot. « Nous conservons un bon ratio combiné (sinistres/cotisations), d’autant que nous avons surtout perdu des adhérents qui avaient des familles. Les jeunes enfants sont les plus coûteux à couvrir pour une mutuelle », explique-t-elle. Une nouvelle stratégie Après ce coup de théâtre, la mutuelle a réagi avec le lancement d’une nouvelle offre prévoyance à la rentrée 2018. Cette offre permet aux adhérents de choisir leurs paniers de garanties à la carte avec 14 possibilités de choix au lieu de quatre auparavant. L’offre a été montée avec son partenaire historique, MFPrévoyance, filiale de CNP Assurances qui porte le risque. Elle comporte en particulier une garantie jour de carence. « Nous sommes la première mutuelle de la fonction publique à prendre en charge le jour de carence », se félicite la présidente. « Nous allons sur le terrain d’Intériale » En parallèle, l’organisme a décidé de partir à la conquête de nouveaux marchés en s’ouvrant à toute la fonction publique. Ses premiers objectifs de développement portent sur les métiers de la sécurité qu’elle assure déjà par le biais du personnel pénitentiaire. « Nous visons notamment les forces de police et de gendarmerie, et probablement d’autres métiers de la sécurité, nous irons donc sur le terrain d’Intériale », indique Elisabeth Chabot. La mutuelle compte également s’appuyer sur son partenariat avec AG2R La Mondiale mis en place en janvier 2014 afin de développer son pôle mutualiste, notamment entre la Mutuelle du Ministère de la Justice (MMJ), la Mutuelle Nationale des Sapeurs-Pompiers de France (MNSPF), la Mutuelle des Hôpitaux de la Vienne (MHV) et Territoria Mutuelle. Objectif : conquérir les agents et retraités des trois fonctions publiques. Mais la concurrence s’intensifie. « La MGEN est un des leaders sur le marché de la fonction publique qui compte également des grands acteurs qui se rapprochent comme Unéopole qui regroupe Unéo, la Mutuelle Générale de la Police (MGP) et GMF, avec l’appui de Covéa », explique la présidente de la MMJ. Le rapprochement entre AG2R La Mondiale et Matmut qui s’est lancé depuis peu sur le marché des agents publics pourrait également donner lieu à des opportunités. La gestion d’actifs confiée à deux gérants Du côté de ses investissements, la MMJ détient 79 millions d’euros d’actifs sous gestion à fin juin 2018. Six mois plus tôt, les encours atteignaient encore 85 millions d’euros. « La mutuelle a vendu des actions qu’elle détenait en direct car elle a dû faire face un besoin ponctuel de trésorerie lié à des décisions d’investissement , explique la présidente. Nous gérons également une meilleure diversification par rapport à ces actions ». Pour l’aider dans la gestion de ses actifs, la mutuelle a fait appel à des gérants externes à partir de 2009. Auparavant, les placements étaient dispersés dans plusieurs banques. OFI AM et CM-CIC Asset Management ont été les heureux élus de cette nouvelle politique de gestion. La société OFI AM s’occupe d’un mandat de gestion de 21,5 millions d’euros répartis en actions (25%) et obligations (75%) tandis que CM-CIC Asset Management, la société de gestion d’actifs du groupe Crédit Mutuel-CIC, travaille sur un mandat de gestion de 18 millions d’euros répartis en actions (35%) et en obligations (63%). A ses gérants, la MMJ demande une transparisation totale de son portefeuille une fois par an et contrôle les données de ses mandataires au moyen d’un outil interne. « Nos scénarios ORSA ne nous donnent pas la possibilité d’une gestion risquée » La mutuelle détient également de l’immobilier d’exploitation représentant 17 millions d’euros avec une plus-value latente de 2,7 millions d’euros (au total, les plus-values latentes du portefeuille atteignent 8,13 millions d’euros). La mutuelle détient également des participations pour 4,2 millions d’euros et des dépôts pour 6,4 millions d’euros. Allocation du portefeuille à fin 2017 La mutuelle vise au total une allocation cible de 15 à 35% en actions, de 60 à 80% en produits de taux et de 0 à 10% en monétaire. Sa politique reste très prudente. « Nos scénarios ORSA ne nous donnent pas la possibilité d’une gestion risquée. De plus, la réglementation Solvabilité 2 ne nous permet pas de prendre beaucoup de risques », souligne Elisabeth Chabot . En 2017, son résultat financier s’établissait à 633.000 euros. Le comité de gestion financière de la mutuelle donne les orientations de placements et contrôle ses gérants en suivant l’exécution des mandats. Avec le conseil d’administration, il détermine et surveille le risque de marché. La mutuelle pilote son risque de marché au travers de plusieurs indicateurs : l’allocation stratégique des investissements validée par le conseil d’administration, le rendement financier par mandataire, l’évolution des plus et moins-values latentes, la concentration du portefeuille. Le rapprochement de la mutuelle avec AG2R La Mondiale lui a permis de s’adapter à la réglementation Solvabilité II tout en affichant un ratio de solvabilité de plus 300% et lui apporte un soutien technique. Forts de sa nouvelle offre et de son partenariat, la MMJ espère mieux défendre son portefeuille clients pour cet automne 2018 et repartir sur une logique de conquête. Thibaud Vadjoux

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