
Banques en ligne, l’esprit start-up

Tous les jours, je dois marcher entre 10 et 15 kilomètres au travail. » Non, cette confidence n’émane pas d’un facteur qui ferait encore sa tournée à pied. Rémi Bourrier, 33 ans, est conseiller clientèle chez Axa Banque. « En arrivant le matin, je choisis toujours un bureau qui me permet de travailler debout. Car lorsque je suis au téléphone avec un client, j’aime faire les cent pas à proximité de mes deux écrans au cas où j’aurais besoin d’intervenir sur sa fiche », explique ce jeune conseiller. Il regrette d’ailleurs le tapis de course précédemment installé sur le plateau, qui était devenu pour lui une sorte de deuxième bureau ! « J’aimais bien échanger avec les clients tout en marchant dessus, mais comme j’étais le seul à l’utiliser, il a été retiré », confie-t-il en riant. Titulaire d’un BTS en management des unités commerciales, Rémi Bourrier a rejoint Axa Banque en décembre 2017, après avoir exercé comme conseiller crédit à distance, puis formateur à La Banque Postale Financement, et comme conseiller en agence à La Banque Postale.
Son témoignage paraît certes un brin décalé par rapport à l’image que l’on se fait des plateaux téléphoniques. Mais il illustre le tournant pris par les banques en ligne pour attirer et fidéliser les chargés de clientèle et les conseillers commerciaux, qui passent le plus clair de leur temps à interagir par téléphone, mail ou chat avec les clients ou les prospects.
Afin de se différencier sur un marché de l’emploi très concurrentiel où établissements bancaires et entreprises se battent pour les mêmes profils, Axa Banque a adopté les codes des start-up. « Sur nos plateaux, il n’y a plus de bureau attitré, et 25 % de nos conseillers pratiquent le télétravail », explique Nadège Henry, la DRH de la banque en ligne, qui recrute, chaque année, 90 conseillers clientèle et réseaux pour accompagner la croissance de son activité. « Pour sortir de leur routine, ils ont également la possibilité de s’investir dans des projets transverses qui visent à améliorer des processus ou la qualité du service rendu aux clients. » Pendant les temps de pause, les conseillers peuvent jouer au baby-foot, se détendre à la salle de sport aménagée dans les locaux, suivre des cours de yoga ou jouer à des jeux vidéo dans la ludothèque. Des places en crèche complètent la palette d’avantages offerts aux collaborateurs d’Axa Banque.
Défis
Cet esprit start-up souffle aussi sur les plateaux de Hello bank! (BNP Paribas), avec des défis qui peuvent être lancés par les conseillers eux-mêmes. « En ce moment, nous sommes en train de nous mesurer à une autre équipe sur des ambitions de vente et de flux », confirme Théo Largemain, 23 ans, conseiller commercial sur le site de Lille. Lui qui a auparavant travaillé comme conseiller de clientèle à la Maif à Lambersart, puis comme chargé d’accueil dans des agences du Crédit Agricole et de la Caisse d’Epargne à Montpellier, aime l’ambiance qui règne au sein des équipes d’Hello bank! : « La moyenne d’âge est très jeune, et il y a beaucoup d’animations sur le plateau. Ce qui ne nous empêche pas de travailler sérieusement ! », insiste-t-il.
Signe des temps, les conseillers n’ont plus à se conformer à des scripts détaillés lorsqu’ils dialoguent avec un client ou un prospect. « Nous n’utilisons plus ces ‘scénarios’ qui donnaient un côté un peu robotisé à nos échanges, confirme Rémi Bourrier. Tout ce que l’on nous demande aujourd’hui, c’est de respecter certaines formules de politesse. Pour le reste, je peux employer mes propres mots et rebondir comme bon me semble au gré de la conversation. »
Pour séduire les candidats, les banques en ligne avancent d’autres arguments comme la taille de leur structure, à l’instar de Binck France : « Quand vous rejoignez une entreprise comme la nôtre, qui emploie une quarantaine de collaborateurs, vous avez l’assurance d’évoluer dans un environnement où tout le monde se connaît, et où la polyvalence constitue une qualité essentielle. Ce qui est particulièrement important pour les générations X et Y », souligne Lucy Bone, responsable RH de Binck France, qui va recruter, en 2018, deux nouveaux conseillers commerciaux et un chargé de clientèle. Autre avantage : « Nos conseillers ont une vue d’ensemble sur tous les métiers et sur l’intégralité de la chaîne de vie d’un client », précise-t-elle.
Cette volonté de se démarquer des établissements traditionnels se traduit aussi dans les canaux de recrutement activés par les banques en ligne. La DRH de Monabanq (Crédit Mutuel) participe, par exemple, aux soirées Plug&Work (organisées par Moovijob) afin de rencontrer les candidats dans des endroits insolites. La DRH d’Axa Banque a pour sa part organisé une campagne de recrutement sur Snapchat, application de partage de photos et vidéos éminemment prisée des jeunes générations, pour recruter des alternants. « Cela a été un vrai succès car 90 % de nos 50 postes ouverts à l’alternance ont été pourvus grâce à cette opération », souligne Nadège Henry.
Le choix des profils de conseillers se veut aussi moins conventionnel. Certes, la plupart des banques en ligne privilégient toujours les licences pro banque, les BTS management des unités commerciales, les licences commerce ou les DUT techniques de commercialisation – dont le salaire, pour les jeunes diplômés, se négocie sur le marché entre 25.000 et 35.000 euros. Mais certaines n’hésitent pas à élargir leur terrain de chasse. Dans les processus de recrutement de Monabanq, il n’y a quasiment plus de filtres sur le CV : « Pour les postes de conseiller clientèle, tout le monde a sa chance, assure Anne-France Galet, la responsable ressources humaines. Tous les candidats reçoivent un lien pour passer un entretien vidéo différé où ils peuvent défendre leur candidature, car ce que nous recherchons avant tout, c’est la rencontre avec une personnalité. » Et si le candidat retenu n’a pas de formation ou d’expérience bancaire, qu’à cela ne tienne : « Chaque conseiller intégrant l’entreprise suit un parcours de formation qui lui permet de bien appréhender sa nouvelle mission et d’atteindre ses objectifs », souligne Anne-France Galet.
Des objectifs souvent élevés, mais réalisables, et qui, reconnaît Théo Largemain, rendent les journées animées chez Hello bank! « Chaque jour, je dois répondre en moyenne à une cinquantaine d’appels téléphoniques, à une trentaine de mails et à une quarantaine de questions posées par ‘chat’. Le rythme est d’autant plus intense que nous devons répondre aux mails tout en parlant au téléphone. Cette double activité est un peu compliquée à gérer au début. Mais avec l’expérience, on s’habitue… »
Relation client
Il faut aussi faire preuve d’agilité pour maîtriser un poste de travail composé de deux écrans, comme l’explique Guillaume Houard, 28 ans, responsable de l’équipe cross-selling de Binck France : « Sur celui de gauche, j’affiche en permanence le logiciel CRM (gestion de la relation client, NDLR) et le site Binck, qui me permet d’accéder aux différents outils. Sur l’écran de droite, il y a la messagerie, le ‘chat’ et les outils administratifs. » A la tête d’une équipe de conseillers commerciaux, Guillaume Houard ne se contente pas de développer le portefeuille des clients existants. Il intervient aussi auprès des autres équipes pour évaluer et améliorer la relation client à travers des formations sur le discours, la fiscalité ou la réglementation. « Ce que j’aime dans mon travail, c’est qu’on ne me demande pas de vendre du produit à tout prix. Tout doit partir de la situation personnelle et patrimoniale du client », commente ce diplômé d’une licence pro assurance banque finance qui, hormis un bref passage en agence chez LCL comme conseiller privé, a effectué toute sa carrière dans la banque en ligne.
De quelles évolutions de carrière ces conseillers peuvent-ils bénéficier ? « Chez Binck, il n’y a pas de parcours prédéfinis, expose Lucy Bone. Les mobilités se font en fonction des opportunités qui se présentent. Certains chargés de clientèle évoluent vers des postes de managers sur le même métier, d’autres s’orientent vers le ‘middle-office’ ou le ‘business management’. » Pour la suite de son parcours, Théo Largemain se voit aussi progresser dans son entreprise. « Un poste de ‘team manager’ pourrait m’intéresser, tout comme la possibilité de rejoindre Arval [location de flottes de véhicules aux entreprises, NDLR], une autre filiale du groupe BNP Paribas, parce que j’aime beaucoup l’automobile. » Guillaume Houard envisage, lui, un poste d’encadrement ou une fonction à dimension plus patrimoniale. « Dans cinq ans, Binck aura, je l’espère, une clientèle et une offre de produits plus larges. Un poste de gestionnaire de patrimoine pourrait alors m’intéresser pour sa dimension commerciale, mais aussi parce qu’il impose d’être pédagogue et totalement au service du client. »
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Après Nantes, Rennes, Grigny ou Saint-Denis dans la matinée, les mairies écologistes de Besançon et Lyon ont hissé à leur tour le drapeau palestinien sur le fronton de l’hôtel de ville. «Cette reconnaissance de l’Etat palestinien n’est pas une offense faite à Israël (...). L’absence d'État est un terreau fertile pour tous les groupes terroristes, de Daech au Hamas», a estimé le maire écologiste de Lyon Grégory Doucet, cité dans un communiqué. A Tours, le pavoisement était prévu en début de soirée. «Reconnaître l'État de Palestine (...) c’est rappeler que nulle conquête territoriale par la force ne peut être légitimée et qu’aucune paix durable ne saurait naître sans justice et réciprocité», a déclaré le maire écologiste Emmanuel Denis. A Paris, une dizaine d'élus dont David Belliard, candidat écologiste à la mairie de Paris en 2026, ont déployé le drapeau palestinien depuis une fenêtre de l’hôtel de ville peu après 18H00, contre l’avis de la maire PS Anne Hidalgo. La mairie n’a pas souhaité faire de commentaire. Dimanche, l'édile socialiste avait préféré projeter les drapeaux palestinien et israélien côte à côte sur la tour Eiffel, décision qualifiée lundi de «consternante de stupidité» par le fondateur de La France insoumise Jean-Luc Mélenchon. Dans la matinée, les élus de Saint-Denis, première ville de Seine-Saint-Denis, avaient convié la presse pour ériger le drapeau palestinien sur l’hôtel de ville, aux côtés des drapeaux français et européen. «Depuis des années je me bats pour l'émergence d’une solution à deux Etats comme seule solution durable pour espérer une paix au Proche-Orient», avait déclaré le maire PS Mathieu Hanotin. «Arrêtez le feu» A ses côtés, le premier secrétaire du Parti socialiste Olivier Faure, à l’origine de l’idée de pavoiser les mairies, a relevé que le drapeau palestinien «n’est pas le drapeau du Hamas». En Seine-Saint-Denis, une douzaine de communes ont érigé lundi le drapeau au triangle rouge et aux bandes horizontales noire, blanche et verte, a précisé à l’AFP le préfet du département, qui a écrit aux maires réfractaires sans pour l’instant saisir la justice. Les conseils départementaux du Lot et de la Gironde ont imité les communes, tandis que la maire écologiste de Poitiers le fera mardi. A Malakoff, la maire communiste qui avait apposé la bannière de la Palestine dès vendredi, restée depuis sur le fronton de l’Hôtel de ville malgré l’injonction du tribunal administratif de Cergy-Pontoise de le déposer, s’est vu infliger lundi une astreinte de 150 euros par jour de retard. Elle a annoncé faire appel devant le Conseil d’Etat. A Corbeil-Essonnes, ville jumelée avec Jérusalem-Est, le maire DVG Bruno Piriou avait hissé le drapeau palestinien depuis plusieurs mois et souhaitait distribuer 1.000 drapeaux palestiniens. Deux décisions suspendues par la justice administrative, de même que pour la petite ville de Montataire (Oise). De plus petites villes comme Carhaix (Finistère), Dives-sur-Mer (Calvados) ou Grabels, près de Montpellier, ont emboîté le pas aux grandes. «En mettant ce drapeau, nous disons +arrêtez le feu, arrêtez le génocide+", a déclaré à l’AFP le maire LFI de Grabels, René Revol. A Marseille, le maire DVG Benoît Payan a lui refusé de hisser le drapeau palestinien, préférant annoncer le jumelage de sa ville avec Bethléem, située en Cisjordanie occupée. Ce n’est pas la première fois que le pavoisement des mairies fait polémique. Au décès du pape François, la demande du gouvernement de mettre en berne le drapeau français avait été jugée contraire au principe de laïcité par certains maires. Selon Jean-Paul Markus, professeur de droit public à l’Université Paris-Saclay, "à chaque fois que les tribunaux ont validé les drapeaux, c'était parce qu’il y avait un mouvement national de solidarité», comme par exemple le drapeau israélien après le 7-octobre ou le drapeau ukrainien. Pour Serge Slama, professeur de droit public à l’Université de Grenoble-Alpes, «un maire ne peut pas, à travers un drapeau, exprimer une opinion politique religieuse ou philosophique». «Mais», poursuit-il, «ériger un drapeau parce que le chef de l'État reconnaît la Palestine comme État ne me semble pas manquer au devoir de neutralité, parce que c’est la position officielle de la France ce jour-là». Madeleine DE BLIC © Agence France-Presse -
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