
Les institutionnels français s’interrogent sur leur allocation d’actifs à venir

Les investisseurs sortent des premiers mois de crise sans avoir trop souffert. Gonflés par une très bonne année 2019, les portefeuilles pouvaient faire face à un choc. Scor s’était en outre préparé à un retournement de cycle du crédit dès 2019 et avait réduit «de manière significative l’exposition aux obligations d’entreprises privées notamment celles du segment non-investment grade. En outre, notre politique d’investissement durable nous a permis d’être peu exposés aux secteurs directement affectés par la crise Covid-19», souligne François de Varenne, directeur général de Scor Global Investments, dans la lettre de l’AF2I. En dépit d’une gestion «dans l’urgence», la CAVP a «profité de l’élargissement des marges de crédit pour se positionner sur les récentes émissions obligataires », et a «racheté l’essentiel des actions vendues au début de la crise», indique Alain Pestre, directeur financier de la caisse des pharmaciens. La MACSF a su également tirer les marrons du feu en se renforçant sur l’obligataire qui a connu une hausse des spreads. «D’une part, sur le crédit IG avec des entreprises qui ont pu émettre en offrant une prime à l’émission intéressante, au moins les premières semaines de la crise sanitaire. Nous avons, aussi, saisi quelques opportunités sur le Cross over ou le High Yield avec des noms français qui ont le soutien de l’État. Ces dernières opérations se sont faites sur le marché secondaire puisque le marché primaire pour le High Yield est pratiquement fermé. D’autre part, nous avons profité des tensions sur les États de la zone euro pour renforcer notre exposition aux souverains», rapportent Stéphane Dessirier, directeur général et Eric Dubois, directeur financier de la mutuelle. Elle a réalisé plus de 30 % de son activité annuelle normale sur les mois de mars et avril. Mais avec le prolongement de la crise et les incertitudes qui pèsent sur la santé des entreprises et la soutenabilité des dettes des Etats, les investisseurs s’interrogent. Depuis le début de la crise, Scor a gelé toute activité de réinvestissement. «Les flux financiers sont investis en obligations d’État à court terme. Nous avions pris la même décision lors de la crise financière de 2008. Accumuler des liquidités nous semble la meilleure stratégie pour allier flexibilité et rentabilité des actifs. Nous sommes prêts pour saisir les meilleures opportunités dès qu’un recul de la volatilité le permettra», affirme François de Varenne. Préférant s’écarter des actifs cotés, trop volatils, la CAVP se pose malgré tout des questions sur ces investissements futurs dans les actifs non cotés. La crise ne semble pas entamer l’appétit des investisseurs et ne déclenche pas de baisse des prix. «Nous connaissons une crise sanitaire et économique, mais pas une crise financière. Les institutionnels sont à l’achat et ne cherchent pas à se défaire de leurs positions. Les niveaux de liquidité étaient déjà élevés dans les fonds, les prix à des niveaux records : où va donc s’investir tout ce cash s’il n’y a pas de flux vendeurs ?», lance Alain Pestre. Le «dry powder» ne manque pas et les valorisations s’envolent. La CAVP privilégie traditionnellement les investissements en infrastructures, en dette mezzanine et en private equity classique (LBO/MBO) avec des engagements de plus de 600 millions d’euros. La CAVP ne veut pas se tourner vers les actions qui n’ont pas suffisamment baissé et n’offriront pas de dividendes. Solvabilité 2 implique également des coûts importants au regard de la volatilité de la classe d’actifs. La Caisse ne va pas non plus se renforcer sur le non coté. «Nous maintiendrons notre allocation au niveau de l’année 2019, toujours en privilégiant les fonds infrastructures et en dettes mezzanines qui procurent des rendements et, dans une moindre mesure, sur des fonds de PE « classiques », affirme Alain Pestre. La crise économique inquiète Scor pour les secteurs directement touchés par la pandémie (compagnies aériennes, loisirs, hôtellerie, pétrole et automobile) mais aussi pour l’endettement des Etats. «L’éventualité d’une nouvelle crise souveraine ne peut être exclue. Il faudra se méfier des règles de solvabilité II qui considèrent indifféremment la dette des différents pays. Le portefeuille d’obligations souveraines devrait être recentré sur les pays aptes à maîtriser leur politique budgétaire et qui n’ont pas besoin du soutien récurrent de leur banque centrale», prévoit François de Varennes.
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